Dette, intervention du FMI... Quelles seraient les conséquences d'une démission de François Bayrou pour l'économie française?

La possible démission de François Bayrou après le vote de confiance du 8 septembre renforcerait l'instabilité politique et accroîtrait sans doute la pression sur la dette française. Mais les experts excluent le risque d'une intervention du FMI à court terme contrairement aux mises en garde du gouvernement.

26 Août 2025 - 14:05
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Dette, intervention du FMI... Quelles seraient les conséquences d'une démission de François Bayrou pour l'économie française?

Empêtré dans une équation budgétaire impossible, François Bayrou joue son va-tout. En annonçant lundi solliciter la confiance des députés le 8 septembre sur une déclaration de politique générale, le Premier ministre a fait le choix de mettre son poste en jeu alors que son plan d'économies de près de 44 milliards d'euros est à ce stade rejeté par une large partie de l'Assemblée nationale.

"Notre pays est en danger parce que nous sommes au bord du surendettement", a une nouvelle fois mis en garde le chef du gouvernement pour tenter de convaincre sur la nécessité de redresser rapidement les finances publiques. Mais ses chances de succès sont extrêmement minces, les principaux partis d'opposition ayant déjà annoncé qu'ils n'accorderaient pas la confiance au locataire de Matignon... qui serait donc poussé vers la sortie.

Vers une envolée de la charge de la dette?

Un scénario qui ouvrirait une nouvelle période d'instabilité politique et probablement de tensions sur les marchés. D'autant que le taux d'intérêt des obligations françaises a dix ans a déjà progressé au-delà de 3,50% depuis la prise de parole de François Bayrou lundi. Il se rapproche désormais de celui de l'Italie (3,592%), longtemps vue comme la lanterne rouge, mais qui bénéficie depuis plusieurs mois d'une meilleure perception des investisseurs en termes de croissance économique et de limitation des dépenses. Autre signe de fébrilité: les actions des banques, qui détiennent en masse des titres de dette française, chutaient nettement à la Bourse de Paris ce mardi.

L'échec de François Bayrou à obtenir la confiance des députés conjugué à une possible dégradation de la note de la dette tricolore par l'agence Fitch qui rendra sa prochaine évaluation le 12 septembre, risque d'accroître davantage la pression sur le marché obligataire avec une nouvelle envolée des taux. Or, "une hausse importante des taux d'intérêt" serait "bien plus coûteuse pour les Français que la mise en oeuvre du plan Bayrou", a assuré sur BFMTV l'économiste Philippe Aghion.

Le ministre de l'Économie Éric Lombard est allé encore plus loin en affirmant que l'instabilité générée par la démission du gouvernement pourrait conduire à un emballement du coût de la dette, au point qu'une intervention du FMI ne serait plus à exclure. Un scénario "qui est devant nous et que nous souhaitons éviter" mais "je ne peux pas vous affirmer que le risque d'une intervention de l'institution internationale n'existe pas", a-t-il dit sur France inter.

Le (faux) risque d'une tutelle du FMI

"Je ne pense pas qu'on soit au bord du cataclysme. Demain, le FMI ne va pas venir", tempère toutefois sur BFM Business Thomas Grjebine, responsable du programme macroéconomie et finance internationales au CEPII. D'autant que même en cas de grave crise, ce n'est pas l'institution de Washington qui interviendrait mais la Banque centrale européenne qui a la capacité d'acheter des obligations sur le marché secondaire pour réduire la pression sur les taux d'intérêt.

En outre, s'il y a bien "une inquiétude sur les marchés avec l'instabilité politique, on peut nuancer cela parce qu'on a l'impression qu'on est entré dans une espèce de rythme de croisière de cette instabilité politique" poursuit Thomas Grjebine.

"On imagine qu'il y aura beaucoup d'agitation, de discussions pendant un mois ou deux et finalement, il y aura un nouveau gouvernement qui sera nommé", ajoute-t-il.

Économiste chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg, Erwann Tison remet aussi en cause les propos alarmistes d'Éric Lombard tout en reconnaissant qu'une hausse des taux d'intérêt serait préoccupante: "La vraie question, c’est celle de la dette: est-ce que (les marchés) vont continuer à nous prêter pour financer notre train de vie extrêmement dispendieux? Oui, on continuera à nous prêter mais la question c’est à quelles conditions".

"Il y a un vrai coût de l'inaction"

Thomas Grjebine se dit "beaucoup plus inquiet" de l'impact de l'instabilité politique et de l'état des finances publiques à long terme sur l'économie française qui tourne déjà au ralenti. Car cette situation incite les Français a davantage épargner (et donc à moins consommer) alors que le taux d'épargne atteint déjà des niveaux records, tandis que les entreprises mettent en suspens leurs investissements. "Il y a un vrai coût de l'inaction", alerte Philippe Aghion.

Surtout, "on voit que notre dette ne fait qu'augmenter depuis 30 ans, qu'on a des déficits structurellement de plus en plus importants et que contrairement à nos voisins on n'arrive jamais à revenir en arrière, souligne encore Thomas Grjebine. La conséquence, c'est l'atrophie progressive de notre tissu productif parce qu'on a des taux d'imposition trop élevés (...) et des déficit commerciaux qui s'accumulent et qui accompagne la désindustrialisation".

Il rappelle que "ces déficits et cette dette rendent les marges de manoeuvres encore plus faibles" alors que "le monde est en plein bouleversement" avec des "investissements massifs qui sont faits aux États-Unis et en Asie". Face à cela, "on a l'impression que l'Europe et la France sont complètement sclérosées et ne peuvent plus bouger. Ca nous empêche d'agir", déplore l'économiste.

Quel budget en 2026?

La démission du gouvernement de François Bayrou risque de surcroît de conduire à la même situation que l'an passé avec la chute du gouvernement Barnier qui avait temporairement privé la France d'un budget.

"Il va y avoir un problème de calendrier. Admettons que François Bayrou tombe le 8 septembre. Le mois suivant, il faut présenter un Budget en conseil des ministres", note sur BFMTV le constitutionnaliste Benjamin Morel.

En l'absence de budget voté avant la fin de l'année, il faudra de nouveau doter la France d'une "loi spéciale" qui permet uniquement de continuer à prélever les impôts et de reconduire les crédits prévus par la précédente loi de finances. Autrement dit, un fonctionnement a minima de l'État qui ne favoriserait pas les investissements dans les domaines prioritaires et grèverait le pouvoir d'achat des ménages.

Source: https://www.bfmtv.com/

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