Gestion des affaires publiques : Et si «les démocrates» n’avaient pas trahi ?

Le président Modibo Keïta avait coutume de dire: «Lorsque les propriétaires deviennent des spectateurs, c’est le festival des brigands».

26 Mai 2025 - 09:44
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Gestion des affaires publiques :  Et si «les démocrates» n’avaient pas trahi ?

 

Il convient simplement de rappeler que suite au soulèvement populaire, le président Moussa Traoré est tombé le 26 mars 1991. Le bilan des événements fut effroyable pour notre peuple, il a perdu plus de deux cent vingt-quatre (224) de ses enfants. Force est de s’incliner pieusement devant leur mémoire. Le mot d’ordre qui avait galvanisé les forces vives, c’était: «le Kokadjè», «Antè kôrôlé fê fo koura».

Notre peuple s’est mis débout comme un seul homme pour dire à Moussa Traoré que «Trop c’est trop». Sous la direction de ce que l’on appelait «Mouvement démocratique», notre peuple s’est débarrassé de l’apache régime de Moussa Traoré. Notre jeunesse était à l’avant-garde de ce combat héroïque de son peuple. Un vieux proverbe de chez nous dit que «la journée qui sera bonne s’annonce par les éclats de la veille».

Le contraire, ne le disons pas ! Mais rappelons que, dès l’annonce de l’arrestation de Moussa Traoré par Amadou Toumani Touré (ATT) et des militaires patriotes, des «démocrates» se sont donnés à cœur joie à la nébuleuse sensibilisation sur le «bien-fondé» de la suspension du «Kokadjè» au motif qu’à force de laver, le bébé risque de couler avec l’eau de bain. Et depuis, les esprits avertis ont compris que la cause est désormais entendue: «le Kokadjè» était un mot d’ordre qui devait et qui a été créé dans le cœur des masses populaires du Mali, la détermination sans faille dans la lutte pour la chute de Moussa Traoré. Il n’y avait pas ce «démocrate» qui osait dévoiler ce vœu sacré et secret des hauts perchés du Mouvement démocratique de lâcher le peuple et de trahir les victimes des évènements une fois Moussa hors-jeu. La suite n’a échappé à personne: «Moussa Traoré a été condamné à ‘‘mort’’ pour vivre sa retraite dorée à Djicoroni-Para. Quelle grosse poudre des ‘‘démocrates’’ aux yeux de notre peuple travailleur» !

Ces «démocrates» assoiffés de profiter de la sueur du peuple se sont livrés à la recherche effrénée des places pour brouter à la faveur du pouvoir dit «démocratique». Comme si lesdits «démocrates» ont reçu du ciel la latitude de sucer le sang des populations au grand dame de ceux qui ont donné leur vie pour l’avènement de la «démocratie».

En tout état de cause, les affres de nos masses laborieuses se sont développées sous les régimes dits démocratiques comme du ridicule, les pseudo-démocrates n’ont tiré aucune bonne leçon de ces pensées de feu président Modibo Keïta: «Quand un peuple est dans l’esclavage, la dignité consiste à conquérir sa liberté, mais quand cette liberté est conquise, la dignité consiste à faire décemment, c’est-à-dire dans des conditions matérielles satisfaisantes et stables alors que la grande majorité ne dispose pas toujours de l’indispensable…».

Le constat est amer: la délinquance financière, les détournements de deniers publics, la surfacturation, la corruption, le clientélisme, l’affairisme (pour ne citer que ces pratiques peu recommandables) ont gangréné les structures socio- économiques, politiques et culturelles de notre pays à tel point que bien de Maliennes et de Maliens en quête de dignité ont regretté la chute du régime du général Moussa Traoré.

Ironie du sort, la «démocratie à la malienne» a développé dans toutes les directions la désagrégation du tissu socio- économique national. Pour tout dire, les élections au Mali ont toujours été le moyen et le gage d’embrigadement des consciences populaires.

Ces élections, il faut le dire, ont été le moyen de jeter à la poubelle la lutte héroïque de notre peuple pour l’avènement d’un Mali nouveau.

L’on ne saurait s’empêcher de dire que la «démocratie à la malienne» s’est muée en fripouille électoraliste avec à la clé l’achat des consciences, le nomadisme politique. Cette démocratie a brillé par son incapacité à redonner confiance à ce peuple au nom duquel les démocrates ne cessent de jurer sans la moindre honte d’avoir désabusé les masses populaires du Mali.

Pour tout observateur averti, le destin de cette démocratie était de forger de toutes pièces les conditions nécessaires de sa désagrégation. Les contradictions d’intérêts entre «les démocrates» ont atteint leur point culminant lors des législatives du second mandat du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK): on a assisté à des contestations de résultats et à des querelles de clochers pour des juteux postes et des strapontins. Ces législatives ont donné lieu à des désordres indescriptibles. La conséquence n’a échappé à personne.

Après moult cafouillages, le régime du président IBK est déchu le 18 août 2020. Des militaires patriotes ont sonné la fin de la récréation et de la bamboula des démocrates affairistes. Ils ont mis à nu le caractère crapuleux de la démocratie malienne.

En rappel, Amadou Toumani Touré (ATT) a passé le trône à Alpha Oumar Konaré pour que celui-ci lui remette le pouvoir après ses deux (02) mandats de gestion démocratiste des affaires de la République. L’on ne peut s’empêcher de dire que bien de grades de général avaient pour dessous la volonté d’Alpha d’éviter d’être déchu par un putsch militaire. C’est bien dans le même souci qu’il faut situer sa fameuse flamme de la paix qui avait consisté à brûler nos «Kalachnikov» pendant que l’armée de ses consciences en France se tapait la poitrine pour la possession de l’arme nucléaire, des avions de combats les plus sophistiqués comme les Jaguars, les Mirages, des chars d’assaut à la taille de la puissance de la France impérialiste. Le prétexte que la «démocratie n’a pas besoin des armes ? mais des matériels agricoles» est tout simplement l’un des éléments du saupoudrage politique de ces démocrates qui ont brillé par leur incapacité à servir honorablement le peuple travailleur du Mali. Où peut-on donc classer la «Flamme de la paix» de Alpha si ce n’est au cœur des actes de trahison de notre peuple par ces démocrates en mal de crédibilité ?

Les démocrates Maliens ont répondu à la misère du peuple malien par la farce politicienne. Ils ont seulement ignoré ou oublié cette pensée chère à Louis Auguste Martin qui disait: «Le silence d’un peuple qu’un effet de contrainte et non pas une adhésion volontaire à la servitude; c’est, le plus souvent, le couvre-feu d’une révolte à venir».

On peut simplement dire que la grosse montagne des bluffs démocratistes a accouché d’une piètre souris. La gestion calamiteuse de la démocratie au Mali est la raison fondamentale des coups d’État dans notre pays. Chaque fois, ce sont les «démocrates» qui se mettent dans la rue pour faire chuter le président élu. Ce sont les mêmes «démocrates» qui sortent pour réclamer la démocratie.

Quelle farce politicienne ! Si l’on veut servir le peuple malien, les élections sont loin d’être une panacée à la crise existentielle de notre peuple. Comme pour dire que pour le bien de ce peuple, les élections sont loin d’être une priorité ! Cela est d’autant plus exact que depuis la chute de Moussa Traoré, nous assistons dans notre pays à la gestion calamiteuse des affaires de l’État. Comment donner donc espoir à notre peuple qui n’a que trop souffert de la gabegie, de la corruption, de la bamboula et de l’affairisme érigés en mode de gouvernance dans notre pays par les pseudo-démocrates en mal de crédibilité ?

Emile Fottorino n’a pas manqué d’avertir les démocrates en ces termes: «La démocratie ouvre la porte à la liberté qui débouche sur la revendication. Une fois recouvrés leur dignité, les hommes ne supportent plus l’insupportable. Démocratiser sans développer, c’est allumer une poudrière».

Comme pour dire que la démocratie n’a de sens lorsqu’elle œuvre à la satisfaction des besoins vitaux et de développement des peuples étant entendu qu’au sens étymologique la démocratie se veut «le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple». Il est malveillant de faire croire à un peuple qu’il est au pouvoir lorsqu’il manque de tout, à savoir un logement décent, des soins de santé décents, une nourriture décente. Au Mali, pendant que le peuple manque de l’indispensable à sa survie, les «démocrates» regorgent de tout.

Il est donc temps et donc grand temps d’arrêter de distraire notre peuple et de le railler au nom de la «démocratie». L’urgence et l’utile pour notre peuple est aujourd’hui le travail patriotique de construction nationale en lieu et place de la farce démocratique que notre pays connaît jusqu’à la chute du président IBK.

En conclusion, le Mali doit avancer dans le sens et la direction de l’honneur, de la dignité et du travail patriotique en dépit des gesticulations politiciennes et des jérémiades des «démocrates» qui ne sont que l’ombre d’eux-mêmes. Notre peuple a vu bien de ces «démocrates» à l’œuvre. Ils ont laissé sur la scène politique un brouillard épais de désolation et de gabegie maquillé par une phraséologie creuse et honteuse sans craindre d’être jugés au tribunal de l’Histoire.

Nous ne retenons essentiellement de la gestion de ces «démocrates» de toutes les couleurs que copinage, coquinage, affairisme, corruption, népotisme, clientélisme, achat de consciences, détournements de deniers publics, concussion, tripatouillage des innovations pédagogiques pour tuer notre système éducatif national (sans avoir le courage de le reconnaître au moins pédagogiquement).

Bref, les «démocrates» ont tout fait sauf redonner confiance à notre peuple travailleur. La déperdition scolaire a atteint un seuil très inquiétant. Les hôpitaux étaient devenus des mouroirs pour les masses populaires au grand bénéfice des cliniques privées. Ces «démocrates» ont tout simplement oublié la prise en charge des causes pour lesquelles notre peuple a perdu bien de ses dignes fils lors des événements de 1990-1991.

À ce sujet, rappelons cet adage latin qui dit: «Sublata Causa, tollitur effectus» (la cause supprimée, l’effet disparaît). La jeunesse malienne a bien décodé les discours interminables et mielleux des pseudo-démocrates du Mali. Aussi, s’est-elle rendue à l’évidence de la véracité de l’adage de chez nous qui dit que «l’intestin de la poule ne peut se tenir droit que lorsqu’il contient un bâton». L’on comprend donc que derrière les jérémiades des «démocrates», il y a les ennemis de notre peuple camouflés comme l’autruche dans le sable.

Notre jeunesse a compris ce précieux conseil de Lénine en ces termes: «Les hommes ont toujours été et seront toujours en politique les dupes naïfs des autres et d’eux-mêmes, tant qu’ils n’auront pas appris, derrière les phrases, les déclarations et les promesses morales, religieuses, politiques et sociales à discerner les intérêts de telles ou telles classes».

La jeunesse malienne responsable a déjà appris à saisir par le sens élevé du discernement qui dit quoi, qui est qui et qui fait quoi au nom de la démocratie. Ce n’est donc plus le moment d’écouter les gesticulations de ces démocrates qui ont fait toute leur preuve négative dans le travail de construction nationale. Il n’y a plus rien de bon à apprendre et à recevoir d’eux. Le Mali doit repartir cette fois sur des bases saines, fiables et prometteuses.

Le Mali nouveau que le peuple appelle de tous ses vœux ne peut se construire sur fond de promesse de ceux qui l’ont mis à genou. Ce nouveau départ est une impérieuse nécessité pour tous ceux qui se battent pour le Mali, pour son peuple. Pour ce faire, chaque patriote doit faire sienne cette célèbre leçon de Palmiro Togliatti qui disait: «En fait, notre pays doit être aujourd’hui, rénové, reconstruit, mais il doit être reconstruit de façon nouvelle, différente; nous ne devons pas refaire une maison destinée à tomber sur la tête de ceux qui y habiteront à un moment décisif; nous devons profondément transformer la structure économique, politique, sociale de notre pays. Pour cela, il faut une nouvelle classe dirigeante. Mais cette nouvelle classe dirigeante ne pourra provenir d’un seul groupe social».

Et si les «démocrates» maliens n’avaient pas trahi notre peuple ?

Fassayon KONTAGA, Analyste Politique

 

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