Reconquête du Nord : Pile ou face ?

14 Nov 2012 - 04:48
14 Nov 2012 - 04:48
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 S’il y’a une évidence aujourd’hui qui ne souffre d’aucune contestation au Mali : c’est bel et bien l’imminence de la reconquête des régions occupées et la libération très prochaine du pays des mains des groupes islamistes et terroristes. [caption id="attachment_98416" align="alignleft" width="200"] Fousseyni Maiga, Dirpub "Le Flambeau"[/caption] A la question de savoir si cela se fera par la négociation (pile) ou la guerre (face), il faut être dans le secret des Dieux pour avancer une réponse exhaustive. Néanmoins, force est de reconnaitre que les réalités sont en train de changer sur le terrain même si demeurent encore de nombreuses zones d’ombres et beaucoup de paradoxes qu’il faudra clarifier pour éviter toute erreur de jugement. En termes des zones d’ombre, soulignons, entre autres les ambigüités de la médiation burkinabé-algérienne, les manigances et tractations en cours en vue de ‘’l’acquittement’’ du MNLA et d’Ansardine et bien entendu le silence presque dolosif du MUJAO et d’AQMI quant au changement de camp de leurs partenaires. Quant aux paradoxes suscités par la question, il serait intéressant, dans un premier temps, de se demander les raisons qui poussent d’aucuns à dissocier le MNLA et Ansardine d’AQMI et du MUJAO sachant bien qu’ils ont tous combattu ensemble le même pays, commis les mêmes atrocités et partagent les mêmes ambitions quand bien même leurs modus opérandis diffèrent quelque peu. En second lieu, il s’agit d’analyser l’option politique envisagée par le MNLA et Ansardine face à la perspective de l’intervention armée qui se peaufine de jour en jour. Toutes ces préoccupations, eu égard à la diplomatie du bâton (avec la France, la CEDEAO…) et celle de la carotte (sous l’impulsion de l’Algérie et du Burkina) entreprises de part et d’autre, devront aboutir à des réflexions critiques sur les deux options (politique et militaire) qui se présentent actuellement dans la résolution de la crise du Nord. L’option politique et ses impératifs : Les négociations en vue de la résolution de cette crise sont placées principalement sous l’égide de la CEDEAO, à travers le Burkina Faso et, accessoirement, de l’Algérie. La médiation algérienne, au-delà de l’aspect stratégique, remonte à des années. Tandis que le choix du Président du Faso, émanant de la CEDEAO, dénote de l’idée selon laquelle l’homme serait apparemment le seul diplômé de ‘’l’école de médiation’’ de la sous région pour ne pas dire ‘’le négociateur Afrique agréé’’ de la France de Sarkozy. Ces deux médiations, compte tenu de certains évènements suspicieux, méritent d’être analysées en profondeur. L’histoire a prouvé que la médiation algérienne, dans la crise malienne, a plus profité à l’Algérie qu’au Mali. Tous les accords signés en la matière ont été facilités par Alger. Qu’à cela ne tienne, le problème s’est empiré et les accords piétinés d’où la nécessité de remettre en cause cette médiation et aller vers une approche plus neutre de la crise. L’influence de l’Algérie dans les différentes crises maliennes n’a contribué qu’à déplacer le problème et protéger les intérêts des touaregs au détriment de ceux du peuple malien et ce, avec la complicité de nos différents régimes politiques. Quant au Burkina, sa médiation est de plus en désavouée par la majeure partie des maliens, à cause du fait qu’il accueille et entretient plusieurs responsables du MNLA. Dans le souci de préserver la crédibilité du dialogue et bannir toute prise de position, il urge de déléguer de  nouveaux interlocuteurs plus neutres, crédibles et susceptibles de peser sur le plan international. Le Sénégal et le Niger pourraient jouer ce rôle. Aussi, quelles sont les promesses faites au MNLA et Ansardine en guise de leur éloignement du MUJAO et d’AQMI ? Pourquoi l’Algérie et le Burkina s’obstinent à sauver ces deux mouvements et surtout de les présenter comme des solutions pour la reconquête du Nord ? Certainement pour combattre leurs partenaires terroristes ou camoufler les affinités qui les lient peut-être. Le deal entre les médiateurs de la crise malienne et ces mouvements armés, passibles de poursuite au même titre que les terroristes, va-t-il dans l’intérêt du peuple malien ? Autant de questions qu’il faille répondre avant de blanchir le MNLA et Ansardine. Autre élément d’analyse : les relations entre Ansardine et le MUJAO qui revendiquent tous deux l’instauration de la charia. Est-il possible que ces deux mouvements se dissocient ? Difficile de répondre par la négative. Ils n’ont pas hésité à se débarrasser du MNLA, faute de convergence de la cause de ce dernier avec la leur. La logique voudrait donc qu’AQMI et le MUJAO déclenchent des représailles contre Ansardine compte tenu de sa volonté aujourd’hui de leur tourner le dos. Toutes ces réflexions prouvent que l’option politique, s’il doit y avoir, nécessite des impératifs dont la transparence, la crédibilité et la justice et, par ricochet, de nouvelles bases et de nouveaux interlocuteurs (le Sénégal et le Niger par exemple). Sinon, la seule alternative qui reste serait l’intervention armée dont la dynamique est déjà enclenchée. Laquelle mérite également un certain nombre de précautions. L’option militaire et ses précautions : Des questions de fond demeurent quant à cette seconde hypothèse. Il s’agit de l’état de préparation des militaires maliens, la concordance de vue entre le Mali et ses partenaires (CEDEAO, pays voisins, pays occidentaux) en termes de stratégies et d’intérêts, etc. Ces différentes préoccupations, bien que soulevées lors des rencontres en la matière, n’ont toujours pas fait l’objet de mesures et/ou d’actions concrètes. Par ailleurs, il est important de mener une réflexion sur les acrobaties politico-diplomatiques dont font montre certains acteurs de la crise malienne pour dissocier le MNLA et Ansardine d’AQMI et du MUJAO. Cette tentative de séparation est à la fois dangereuse et aventureuse pour le Mali. Il est important de faire la part des choses, au risque de les légitimer et jeter les bases d’une collaboration compromettante. L’instrumentalisation de ces deux mouvements pour combattre les terroristes d’AQMI et du MUJAO reviendrait tout simplement à piéger le Mali et obliger les maliens à accepter des personnes par le biais desquels les terroristes ont pris le contrôle des 2/3 du territoire national. Le MNLA et Ansardine ne valent pas mieux que le MUJAO et AQMI. S’ils veulent prouver le contraire, cela doit être sans conditions. Il est du ressort de la communauté internationale, sous l’impulsion du Mali bien entendu, de comprendre que la volonté de négociation des ces deux mouvements relève plus d’un aveu d’impuissance que d’une réelle volonté de solution négociée. La guerre, pour la reconquête du Nord, pour des précautions devra être menée contre tous les groupes armés et terroristes. Quitte au MNLA et Ansardine de déposer les armes sans conditions et en toute responsabilité (c'est-à-dire répondre de leurs actes devant la justice) et se rallier avant le déclenchement des opérations militaires. Notons que la séparation fallacieuse que les uns et les autres tentent d’opérer entre MNLA-Ansardine-MUJAO-AQMI ne demeure, jusque là, qu’un jeu de mots et non une solution définitive au problème. Si le plus important reste la libération du Nord et la restauration de l’intégrité du territoire national ; l’enjeu est que, d’une part, la négociation en faisant revenir le MNLA et Ansardine dans le jeu politique pourra leur faire gagner ce qu’ils n’ont pas pu avoir par la guerre (notamment le MNLA), et, d’autre part, la guerre si elle est mal préparée et mal menée conduirait à une afghanisation du Mali. Fousseyni MAIGA 

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