Accord d’Alger et présidentielle 2007 : « Je ne suis pas un farouche mécontent, mais un supporter déçu »

Dans une réaction à la publication dans notre édition d’hier de sa contribution au débat sur l’accord d’Alger, «Désabusé » apporte des précisions et des éclairages sur le site des accords-dalger.net...

Info-Matin

1 Sep 2006 - 09:43

Dans une réaction à la publication dans notre édition d’hier de sa contribution au débat sur l’accord d’Alger, «Désabusé » apporte des précisions et des éclairages sur le site des accords-dalger.net.

C'est avec un soupçon de fierté que j'ai lu les deux pages que le journal m'a accordées ce matin, sans oublier la UNE. Néanmoins, quelques précisons s'imposent entre toi et moi (si vous permettez le tutoiement, sinon, en bon journaliste, considérez tous les "tu" à venir comme des "vous", et faites les corrections grammaticales nécessaires). Je ne suis pas aussi endurci comme opposant que toi (même si souvent tu dis le contraire, en tant que fidèle lecteur, je reste convaincu que tu es endurci, malgré les quelques démentis que tu fais). Je n'ai rien contre la personne de notre premier dirigeant, et je suis un de ses partisans, mais, comme je l'ai dit à la fin du courrier en question, parfois je me demande si il n'est pas perdu. Certains aspects de sa politique me désolent, me découragent. Malheureusement, ce ne sont pas les aspects les moins importants. Les accords me déçoivent et me décevront de n'importe quel angle sous lequel ils me seront présentés. Le consensus .... je préfère ne pas en parler ! Même si certains prestidigitateurs osent dire que le consensus n'est pas le choix du général-président.

«Observateur et acteur du développement»

Par contre, étant dans le monde du développement, et étant à la fois observateur et acteur, je dois avouer qu'en matière de développement économique et social, Monsieur Touré a axé sa politique sur les domaines les plus sensibles : la prise en charge des populations par elles-mêmes, leur participation à leur propre développement, la priorité des communes rurales, la décentralisation, etc. D'après l'expression, "Bamako est sur répondeur". Parce que l'argent sert à développer les régions défavorisées, et, pour le développement de ma patrie, je veux bien accepter ce sacrifice, même si la crise économique actuelle me touche autant que tout le monde. Je suis peut-être issu d'un milieu privilégié, et ceux qui ont faim du matin au soir pourront m'en vouloir sur ce que je dis. Mais à Bamako, quand on a un voisin, on n'a pas faim du matin au soir. Et la crise économique actuelle touche tout le monde, car mon pouvoir d'achat a autant diminué que celui de chaque citoyen lambda. Les régions sont une priorité, acceptons de souffrir à Bamako pour que les régions avancent. Elles entraîneront tout le pays dans leur avancée.

«ATT se débrouille à merveilles»

En bref, ATT se débrouille à merveilles sur la voie du développement, et il n'y a aucune région du Mali qui ne vous dira pas du bien de lui en gros (dans les détails, il y a de petites erreurs, mais il y en a même dans les nations les plus "civilisées"). Et c'est pour ça que je ne peux pas m'empêcher d'aimer le bonhomme comme un père. Pour tout ce qu'il a fait jusqu'ici, et pour ce qu'il continue de faire. C'est d'ailleurs ce qui m'a poussé à lui écrire ce courrier à la fois haineux, nostalgique et mélancolique (en tous cas, c'est ce que moi je ressentais en l'écrivant, j'attends l'avis du lecteur X). En clair, aujourd'hui, je suis face à un grave dilemme. Du haut de mes 24 ans (quoiqu'on dise, c'est quand même beaucoup), je n'ai jamais vu personne faire avancer mon pays comme il avance aujourd'hui (on est en démocratie, dites-moi le contraire si vous voulez). Et je ne parle pas de ronds-points ou d'échangeurs, de routes mal bitumées mais brillantes. Ces choses-là ne se mangent pas. Je ne parle pas non plus de vider les caisses de l'Etat pour déverser les fonds dans la rue. Je ne parle pas de l'époque où un fonctionnaire pouvait voler 20 milliards et construire 15 maisons, de telle sorte que l'argent passe de l'état au maçon, du maçon à la petite vendeuse, de la petite vendeuse au boutiquier, du boutiquier à l'industriel, de l'industriel à sa famille et ses proches, de telle sorte que tout le monde en aie un peu dans la poche (quoique ce système ne soit pas complètement révolu). Ces systèmes enrichissent une partie du pays, mais pas tout le monde. Je parle du vrai développement, celui où chaque enfant a un toit, une école, un centre de santé, un repas suffisant, sain, propre. Et c'est sur ce chemin que ATT nous a conduits.

Mais quand il signe (ou fait signer) des papiers bidons, et qu'il me parle de consensus, quand il insiste, persiste (il a déjà signé avant d'insister), au point de vouloir que j'accepte, je me pose des questions. Voilà donc la question que je me pose : faut-il rester ATTiste parce qu'il construit le pays, ou faut-il dire merde parce qu'il est en train de déconner ? J'en suis toujours au stade de la balance du pour et du contre. Donc, je lui propose des solutions, et j'attends de voir. S’il persiste à vouloir nous convaincre sur les accords, et avec son consensus, je réaliserai qu'il n'est pas aussi grand et noble que je le pensais. Et j'irai ailleurs (mais où? il n'y a pas de vraie opposition). Pour le moment, on est en démocratie, et j'ai tenu à dire fermement les points où je ne suis pas du tout d'accord. Je ne suis ni consensussiste (oups), ni accordalgeriste.

«Gros coup de gueule»

C'est sur ces deux points que porte mon gros coup de gueule. Et mes positions ne changeront pas, je sais que je suis dans le vrai. Regarde ce site Internet par exemple. Il fait l'objet d'une publicité à la télévision nationale aux heures de grande affluence. Les artistes, les footballeurs, les enfants, tout le monde y fait de la pub pour les accords. Et ils ont fait un site Internet pour en rajouter à la campagne de communication. Mais tu conviendras comme moi que la plupart des réactions sur le forum du site sont anti-accords. Parce que les mêmes qui les applaudissent dans la rue peuvent venir ici et dire ce qu'ils pensent réellement à visage non découvert. Même les modérateurs qui, avant, effaçaient nos messages, maintenant, les laissent traîner plus longtemps. Le temps que Info-Matin s'en empare. Pour notre campagne de communication à nous, nous avons les outils de leur campagne de communication à eux. Ah, l'ère du coupé décalé!!!!!!

«Un message qui me vient du cœur»

Par contre, grand frère, la présentation de l'article, les titres que tu as rajoutés, donnent l'impression d'avoir affaire à un farouche opposant. Peut-être que ça vient de moi, et du simple fait que mon texte de base a été (très légèrement, je reconnais) modifié à quelques titres près. Dans tous les cas, cela ne me dérange pas, puisque je suis déjà ému du fait qu'un journaliste de ton niveau ait choisi ma petite contribution parmi les centaines qui sont sur ce site, et qu'il l'ait mise en UNE. Mais j'ai juste peur de voir changer un peu (ou beaucoup) la nature d'un message qui me vient du coeur. Je ne te demande pas de republier l'article sans tes titres, et en enlevant ton "Je ne voterai pas ATT". Je veux juste qu’entre toi et moi (et aussi entre moi et moi-même), le message soit clair. Je ne suis pas un farouche mécontent, mais un supporter déçu. Mais j'avoue que si ça continue, le changement n'est plus pour longtemps. Merci grand frère.

Note de la Rédaction

Nous partageons ton souci de clarté et la pertinence de ton approche quant au débat d’idées. Malgré la modestie dont tu fais preuve (question d’éducation et de culture), ta contribution est l’une des plus inspirées et des plus pertinentes qu’il nous soit arrivé à lire sur les différents forums qui discutent de ce problème, oh, comment vital pour l’unité et la cohésion de notre Nation. Voilà, le choix qui nous a motivé pour publier ton papier.

Pour le reste, nous osons espérer que les lecteurs ont fait la part des choses entre le message et les rajouts des titres et intertitres qui ont été signés de la rédaction. Mais, Dogo (puisque tu nous accordes le privilège et l’honneur de Koro), nous vous mettons à l’amende (de la cola) pour nous avoir étiqueté et classé «opposant endurci », pour ne pas dire «aigri » ; oh ! la langue de Molière ! Journaliste, nous le sommes ; opposants, on nous a souvent qualifié comme tel, mais endurci, nous le rejetons. Nous sommes sûrs que vous savez, comme les fidèles lecteurs du quotidien des sans voix que notre combat n’est et n’a jamais été une question de personne, mais de principes sur lesquels, toi et nous (et la majorité des Maliens du reste), nous nous retrouvons. Comme journalistes, nous assumons nos positions ni pour ni contre un régime ou un responsable, mais en toute conscience.

C’est pourquoi Dogo, nous disons que nous ne sommes et nous ne serons ni un farouche mécontent ni un supporter déçu encore moins opposant endurci; mais, peut-être, pour rester dans tes limites, nous sommes entre farouche mécontent et supporter déçu. Voilà pourquoi, avant la prière du vendredi, tu dois nous envoyer ton papier de colas.

Encore une fois, les intertitres sont de la rédaction.