On s’y attendait depuis quelques mois sans oser l’affirmer, mais c’est maintenant clair comme de l’eau de roche : Jeamille Bittar est partant pour la course présidentielle d’avril prochain. Il a déclaré sa candidature, hier dimanche, au cours d’une cérémonie organisée à l’hôtel Laïco Amitié par l’UMAM, le mouvement de soutien acquis à sa candidature. Quelques heures auparavant, son parti, le PDES dont il est le premier vice-président, venait de déclarer officiellement qu’il ne présentera pas de candidat à l’élection présidentielle. En d’autres termes, le PDES se dérobe, alors que Bittar fonce droit vers la ligne de départ de la course pour Koulouba.
A 90 jours de la date du premier tour de l’élection présidentielle, les milieux politiques sont en effervescence et le dernier virage est amorcé pour la classe politique malienne. Plusieurs candidats ont été investis. Certains par leur parti politique, d’autres par une fusion de partis alliés et quelques uns, dits indépendants, sont candidats pour répondre à l’appel des sirènes, en acceptant de répliquer à la sollicitude des mouvements, associations et clubs de soutien. Jeamille Bittar, fait partie de cette dernière catégorie. En acceptant de déclarer officiellement sa candidature, il a répondu favorablement à l’appel à de l’Union des Associations Mouvements du Mali (UMAM). En effet, Jeamille Bittar se dit prêt à briguer le suffrage des Maliennes et Maliens pour accéder à la magistrature suprême de notre pays, le Mali. L’actuel président de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (CCIM) et président du Conseil économique, social et culturel (CESC) a donc décidé, sans broncher, de participer au marathon qui mène à Koulouba.
En effet, il a décidé de partir à l’élection présidentielle comme candidat indépendant, sans l’armature du parti politique duquel il est vice-président, le Parti pour le développement économique et la solidarité (PDES). Un acronyme pour faire allusion au programme pour lequel le président de la République, ATT, a bénéficié d’un quasi plébiscite du peuple malien, lors de la dernière élection présidentielle, en avril 2007. La cérémonie de déclaration de candidature de Jeamille Bittar s’est dissemblée de celles que l’on a l’habitude d’observer, de par son aspect jet set. En effet, la cérémonie avait tout d’une rencontre de haut niveau et peu d’un rassemblement politique de précampagne électorale. On y notait la présence des ambassadeurs et des consuls de plusieurs pays amis. Notamment, celle remarquée des premiers conseillers des ambassades de France et de Chine. C’est très significatif car la France, c’est bien notre métropole et la Chine, notre partenaire de demain. Jeamille Bittar a, aussi, réuni autour de lui ses proches et amis. Son épouse était également à ses côtés, au moment où il prononçait son discours d’investiture.
Ses motivations
Vingt ans après l’avènement de la démocratie, beaucoup de choses restent encore à faire, sinon à refaire ou parfaire. Après une intense évaluation de ce que la classe dirigeante des vingt dernières années a fait, en qualité de commerçant, industriel et homme politique, Jeamille Bittar estime que cette dernière a montré ses limites : des discours, des théories et qu’il temps de passer concrètement au fonctionnel . « J’ai marqué une patiente attente et multiplié les appels en direction de mes compagnons politiques [ndlr du PDES], qui m’ont répondu par leur silence, leur indécision, pour qu’ensemble nous agissons, en vain», a-t-il confié à son auditoire, qui attendait, apparemment, d’autres révélations ou commentaires.
«Quand je serai Président… »
C’est conscient de la délicatesse de la mission, qu’il demande le suffrage des citoyens de ce pays. Jeamille Bittar a abordé, en premier lieu, la fameuse question de la stabilité dans le Nord du Mali. A ce sujet, il propose une solution radicale: «Le dialogue doit aussi faire place à la fermeté car la patrie est en danger». En second lieu, il compte mettre au service du Mali ses compétences d’opérateur économique, en faisant venir des investisseurs pour créer des usines. En matière d’économie, Jeamille Bittar envisage, une fois élu président de la République, de faire du Mali une société de production et non de consommation, en faisant du pays une grande puissance agricole. Son flair de chef d’entreprise l’a poussé à toucher le sujet des ouvriers licenciés de nos usines, il s’est prononcé là-dessus en ces termes: «Je ferai renouer le dialogue sur la base des opportunités qui peuvent s’offrir aux travailleurs qui ont perdu leur emploi, suite à des licenciements abusifs ou à des fermetures d’usines ou d’entreprise, par manque de compétitivité».
Sur un tout autre plan, selon lui, une bonne gouvernance commence tout d’abord par le renforcement de l’autorité de l’Etat ; et il compte s’y atteler, dès qu’il sera à Koulouba. Il promet une justice digne de ce nom aux Maliens et s’engage à assurer leur sécurité. A l’intention de la jeunesse, dont les plaies sont la crise scolaire et le chômage, Jeamille Bittar a lancé «l’école, cette institution qui a pour mission de former l’élite, le citoyen de demain, est en panne, suite à cette crise aigue qui la traverse, hypothéquant l’avenir du pays et l’exposant aux pires incertitudes. Je suis candidat (…) principalement pour les jeunes».
En attendant ce que le scrutin du 29 avril prochain réserve aux Maliennes et Maliens, il est à avancer, sans réserve, que sur le plan politique, notre pays innove. Le vice-président d’un des plus grands partis politiques de la place va briquer la magistrature suprême sans l’accompagnement du parti auquel il appartient, c’est du jamais vu. Mais pourquoi justement son parti a choisi de ne pas présenter un candidat ? Lire l’article ci-après: «Pourquoi le PDES renonce à présenter un candidat».
Rokia Diabaté