ACCORDS D’ALGER:Impunité pour les armes, intolérance pour les idées?

Après la signature des accords d’Alger, place maintenant à l’explication du texte. Côté officiel, tout y passe pour convaincre de la justesse de l’option choisie. Au risque de faire montre d’intolérance vis-à-vis des idées contraires alors que l’on prêche en même temps la...

30 Nov -0001 - 00:00
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Après la signature des accords d’Alger, place maintenant à l’explication du texte. Côté officiel, tout y passe pour convaincre de la justesse de l’option choisie. Au risque de faire montre d’intolérance vis-à-vis des idées contraires alors que l’on prêche en même temps la tolérance à l’égard des insurgés.
 
La raison d’être qui a prévalu à la paix des braves, débouchant sur le texte des accords d’Alger, est liée au refus de la guerre. Au nom de ce principe auquel le président ATT croit, les insurgés enturbannés de la bande de Hassan Fagaga et consorts (des déserteurs de l’armée) profitent de la tolérance des pouvoirs publics pour ne pas être soumis aux sanctions disciplinaires et exemplaires qu’ils méritaient après les actes de forfaiture qu’ils ont posé, le 23 mai dernier, à Kidal et à Ménaka. Mais, de l’autre, notamment les hommes de médias qui ont exprimé leur désaccord face au texte des accords, sont traités avec une certaine intolérance qui en dit long sur l’état d’esprit des décideurs nationaux.
Si la tolérance est utilisée pour gommer le fait des insurgés, c’est désormais l’intolérance qui est pratiquée contre ceux qui expriment différemment leurs opinions sur les accords d’Alger dits de la reddition. En effet, ce sont les insurgés qui sont traités avec indulgence. Histoire d’arracher d’eux une sorte de paix de braves dans la logique d’empêcher au pays une aventure. En revanche, ceux des Maliens qui ont dénoncé cet état de fait et qui ont trouvé que les accords ne sont pas bons pour l’image de notre pays, dans le contexte de cette violence de Kidal, sont ceux-là mêmes qui sont accusés de travailler contre le régime du président ATT. Voilà une facette de l’intolérance verbale qui pourrait être prendre à la longue des formes plus violentes.
Cette attitude des pouvoirs publics, dont le président ATT est lui-même le précurseur, depuis qu’il s’est assigné comme mission d’expliquer le texte à l’opinion publique, porte en elle-même le malaise qui entoure les accords d’Alger. Comment peut-on traiter avec la raison, comme on le prétend, une attaque armée de camps militaires dans certaines contrées du pays et ne pas avoir la même attitude de compréhension vis-à-vis de ceux qui expriment différemment leurs opinions sur le traitement réservé à ce dossier ? Comment et pourquoi peut-on envisager, dans ce contexte démocratique comme le nôtre, que les citoyens aient la même lecture (unanimiste) d’un texte à portée hautement politique et même idéologique ? Les uns et les autres n’ayant pas la même perception sur le rôle et la place de l’Etat dans le contexte africain post-colonial dont on sait que les frontières sont à la fois arbitraires et artificielles ? Doit-on continuer à renforcer la culture de la pensée unique quand dans de nombreux pays du continent, il suffit de peu pour tout remettre en cause ? Exprimer une opinion différente de celle, plus officielle exprimée par les pouvoirs publics, équivaut-il à un sacrilège puni avec sévérité ?
En vérité, le pouvoir prêche quelque chose et son contraire en même temps. Point de cœur pour appréhender et traiter la question de Kidal, il faut plutôt faire montre de beaucoup de raison. Mais on laisse son cœur l’emporter au lieu de la raison (la contradiction des idées et des débats) en ce qui concerne les personnes qui ont les avis divergents sur lesdits accords d’Alger. «Je suis pas d’accord avec vous, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire », a enseigné le philosophe des lumières démocratiques et républicaines.  
 
Par Sékouba SAMAKE    

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