Infos ou intox : Friperies institutionnelles et Fripiers politiques

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«Quand la honte cède au goût», le marché de friperie à Bamako devient un commerce «florissant et ambivalent» (L’Albatros, 11-18 juillet 2011). Selon le confrère, la capitale malienne est envahie de fripiers qui proposent des marchandises –vêtements usagés ou passés de mode en provenance de l’Occident – pour tous les goûts et toutes les bourses. Il est vrai que la friperie s’est imposée au fil des années dans tout le pays, et non pas à Bamako seulement, pour d’autres articles que les fringues. Au Mali, on les désigne sous nom générique de «yougou yougou»A l’heure actuelle, on y trouve chaussures, chaussettes, bas, chapeaux, et même perruques.

On n’oubliera pas les véhicules, les motocyclettes, les appareils électroménagers, les jouets et autres colifichets. Dans un domaine plus crucial, il y a les «médicaments par terre», par forcément des DCI, et les «médecins de fortune».

Mais le phénomène le plus inquiétant, c’est que la friperie est en train de prendre corps et forme dans des domaines nettement plus sensibles comme la gouvernance, la politique, l’économie, le développement. On importe les modèles, on les tropicalise sans pour autant les aseptiser, et, au finish, personne ne s’y reconnait plus. Ainsi, à ce jour, le Mali compte plus de 120 partis politiques, dont la plupart n’ont aucune idée de programme de société ou de gouvernement, plus de 100 000 associations et GIE, qui ne sont fondés sur aucun projet de développement.

Il en va de même de la conquête du pouvoir. Pour la chefferie de village, de fraction ou de quartier, la mairie, l’Assemblée nationale, la présidence de la République, on voit se multiplier les candidatures les plus loufoques, folkloriques, et «yougou yougou»

La friperie est partout. Car elle vient même d’investir l’Etat de la Nation. Notamment, les autorités ont décidé de concocter des réformes institutionnelles et politiques importées de la France coloniale et du Mandé féodal (Kurukan Fuga).

Les associations et clubs à…, qui se sont multipliés et substitués aux partis politiques pour mieux abuser et escroquer des candidats assez prétentieux pour croire qu’ils peuvent encore susciter de la sympathie ou des amitiés, faussent et fripent le jeu politique.

En plus de ces clubs et associations, l’un de ces candidats, Modibo Sidibé, pour ne pas le nommer, serait bénéficiaire de la grande mobilisation de plusieurs partis politiques (Le Coq «cocorico», 18 juillet). En fait de grande mobilisation, il s’agit seulement de six partis «yougou yougou» (sur plus de 100). Et quels partis ! MPLUS-RAMATA d’Abdoulaye Amadou Sy, RDS de Younouss Hamèye Dicko, PIDS de Daba Diawara, FAMA d’Amadou Soulalé, UFD et PEI. Tous les responsables, cadres et militants de ces six partis réunis ne pourraient remplir une petite salle de cinéma de quartier. De plus, aucun des responsables ne jouit d’une réputation de fidélité à toute épreuve, chacun d’eux ayant migré dans plusieurs partis avant de se raccrocher à une ultime planche de salut. Modibo Sidibé ne tardera certainement pas à se rendre compte de la réalité de ce soutien «yougou yougou», lui qui veut briguer la magistrature suprême. Il lui en faut beaucoup plus.

Une situation qui pourrait le servir, c’est l’impasse dans laquelle s’est engouffré le PASJ, et le clash en cours à l’URD. A en croire un confrère, L’Indépendant, une personnalité, maire de son patelin, aurait décidé de croiser le fer avec Soumaïla Cissé pour lui ravir l’investiture du parti. Un vice-président du parti le traite de «farfelu » et le soupçonne de vouloir profiter de l’argent des Américains. Toujours est-il que la guéguerre qui s’annonce arrangera les affaires de Modibo Sidibé. A ce rythme, l’ex-Premier ministre n’aura plus de candidat de grand parti à affronter. De toutes les manières, les autorités, qui ont imposé le RACE et son fichier électoral «yougou yougou» pour piper les dés, qui imposent des divergences internes aux grands partis pour les fragiliser, imposeront Modibo Sidibé pour continuer et perpétuer les règnes «yougou yougou» de ses maîtres et saigneurs, ATT et AOK.

A moins que le salut ne vienne d’un très (trop ?) jeune parti politique, la CNAS. Aux dires de Le Soir de Bamako, 19 juillet 2011, «les Maliens de la Côte d’Ivoire sollicitent la candidature de Zoumana Sako» à la présidentielle de 2012. Un appel à candidature qui vient en sus de ceux des «régions, cercles, villages, hameaux et quartiers des différentes localités du Mali». Sûr que le Premier ministre de la transition (1991-1992) jouera sa partition. Il a tous les atouts en main pour ce faire, et constitue le dernier rempart contre les menaces en vue. En tout cas basta, les «yougou yougou»
Cheick Tandina

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