Centre du Mali : Chemins vers la paix
Les conflits intercommunautaires qui secouent les régions de Mopti et Ségou figurent parmi les plus complexes et les plus meurtriers du Mali contemporain.

Opposant principalement des communautés, ces affrontements s’enracinent dans une compétition féroce pour les ressources naturelles, des tensions identitaires exacerbées, et un effritement profond de l’autorité étatique. Quels sont les facteurs qui nourrissent cette spirale de violence ? Quelles en sont les répercussions sur le tissu social et les conditions de vie des populations ? Et surtout, quelles initiatives locales émergent pour restaurer le dialogue, reconstruire la confiance et réinventer la paix au cœur de ces territoires meurtris ?
Selon Mohamed Abdellahi Elkhalil, spécialiste des dynamiques sociales et sécuritaires au Sahel, ces conflits sont nourris par une combinaison de facteurs. « La lutte pour l’accès à la terre, à l’eau et aux pâturages, la marginalisation de certains groupes ethniques, l’influence croissante des groupes djihadistes et la faiblesse de l’État, la corruption et l’absence de gouvernance locale. Ces éléments créent un terreau fertile pour les violences, qui se transforment souvent en affrontements meurtriers », explique le M. Elkhalil.
Pour lui, les répercussions de ce conflit intercommunautaire sont dramatiques pour les populations. « Déplacements massifs et exodes ruraux, destruction des moyens de subsistance, aggravation de la pauvreté, atteintes graves aux droits humains et perte de confiance et rupture du tissu social », cite-il.
Le Dr Moussa Coulibaly, sociologue à l’École normale supérieure de Bamako, insiste sur les dimensions invisibles du conflit comme les blessures morales et psychologiques. « Ces tensions, souvent plus graves que les violences physiques, provoquent un éloignement affectif et une perte d’équilibre au sein des communautés ».
Initiatives locales : vers une paix enracinée
Face à cette crise, plusieurs initiatives locales émergent pour restaurer la cohésion sociale. Parmi ces initiatives, on peut citer le dialogue communautaire et médiation, la réhabilitation des infrastructures partagées et surtout l’implication des jeunes et des femmes dans les processus de paix.
Le Dr Coulibaly plaide pour un retour aux valeurs ancestrales pour mettre fin à ce conflit. « Les cousinages à plaisanterie, les mariages exogamiques, les pactes de non-agression et les traditions de bon voisinage sont autant de leviers culturels à réactiver. Chaque culture est une main tendue vers l’autre », dit-il.
Pour renforcer le dialogue, le sociologue propose également des rencontres régulières entre communautés, animées par les autorités coutumières et administratives, des espaces d’échange ouverts pour désamorcer les tensions et une revalorisation des pratiques traditionnelles de médiation.
Ce conflit, bien qu’ancré dans des réalités locales, interroge les fondements de la nation malienne surtout sa capacité à faire vivre ensemble ses diversités. La paix ne viendra pas uniquement des sommets politiques, mais aussi des villages, des traditions, et des voix qui refusent la haine.
Assitan Koné
(Stagiaire)
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