La volte-face des militaires réduit Dioncounda à un rôle de pantin

25 Sep 2012 - 03:30
25 Sep 2012 - 03:30
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Tout le monde avait remarqué et applaudi le ton neuf apporté par Dioncounda Traoré dans la relation entre le Mali et la CEDEAO au bord de la rupture lorsque Dr Cheikh Modibo Diarra tenait les commandes de l’Etat avec la double casquette de Premier ministre de « pleins pouvoirs » et de président de la République intérimaire. On en était  à un ultimatum fixé au 31 Juillet 2012 au terme duquel le gouvernement d’union nationale, prévu dans l’Accord-cadre du 6 avril précédant, devait être mis en place, faute de quoi le Mali serait suspendu de toutes les activités de l’organisation sous régionale. Dr Cheikh Modibo Diarra ne se trouvait pas dans la salle où cette décision  avait été prise à Ouagadougou, le 7 Juillet. Une double explication possible : soit il n’avait pas reçu le carton d’invitation pour participer à la deuxième réunion du Groupe de contact de la CEDEAO sur le Mali, qui se tenait à cette date-là, soit il avait choisi de la boudé. [caption id="attachment_56902" align="alignleft" width="310"] Saouti Labass Haïdara, Dirpub L'Indépendant[/caption] Revenu de son exil médical parisien de deux mois, grâce surtout aux sollicitations pressantes de la CEDEAO( ses adversaires les plus déterminés ne cachaient pas leur souhait de le voir finir ses jours sur les bords de la Seine ) Dioncounda aura pour elle  des mots de remerciement très forts et l’assurera de sa disponibilité entière à travailler avec elle pour libérer « très rapidement » le Nord du Mali alors que l’ex-navigateur interplanétaire n’écartait pas l’hypothèse d’un embourbement (ensablement conviendrait mieux à la situation ) sur « dix ans » comme c’est le cas en Afghanistan avec les forces alliées de l’OTAN. Pour faciliter les échanges et renforcer la confiance  rétablie  avec Bamako, l’Organisation ouest africaine  prendra soin de  nommer un haut représentant auprès du président de la transition malienne. Malgré cette précaution supplémentaire, la requête que Dioncounda a fait  parvenir à Alassane Ouattara  pour aider le Mali à reconquérir son septentrion a bien failli ne pas aboutir. En effet, celle-ci déclare « sans objet » un déploiement des troupes ouest africaines à Bamako et les confine à un rôle de gendarme « dans les villes reconquises » par l’armée malienne. Des chefs d’Etat ont perçu derrière cette décision la main des militaires qui avaient affirmé, plus d’une fois, que « pas un soldat de la CEDEAO ne mettra les pieds à Bamako » et que « le nord du Mali sera prioritairement libéré par l’armée malienne elle-même » à condition que soient mis à sa disposition le matériel et la logistique dont elle a besoin. Un plaidoyer qui n’a pas emporté leur conviction. Cas du président Blaise Compaoré, médiateur dans la crise, qui a estimé, la semaine dernière à Paris où il séjournait, que les réserves formulées par Bamako ne garantissent pas l’efficacité d’une intervention militaire de la CEDEAO. Conséquence :celle-ci a notifié, le 20 septembre, à Dioncounda Traoré qu’elle renonçait  à l’intervention militaire envisagée si un terrain d’entente n’était pas trouvé entre les deux parties. Une réponse qui a désarçonné le président intérimaire au point qu’il s’est  gardé de l’évoquer dans son message à la Nation prononcé le lendemain 21 septembre et qu’il ait cru devoir trouver le salut du Mali dans « le dialogue et la négociation » d’où la litanie que  ces deux  mots lui ont inspirée et qui traduit bien plus sa désespérance que sa foi. Dioncounda sait, en effet, qu’aucune paix n’est possible avec les salafistes  qui y mettent comme prix l’application  de la charia dans  tout le territoire national. Ils l’ont répété encore au lendemain de son discours. Voici donc le Mali sommé de choisir entre une république laïque (où toutes les religions s’exercent librement, restent l’affaire des seuls citoyens et en dehors de toute interférence de l’Etat) démocratique et respectueuse des droits humains tels que définis par les conventions internationales et un Etat dont l’unique source de droit est la charia. Les Maliens qui, dans leur majorité, ont pris goût à la démocratie et à ses retombées non négligeables, au cours des vingt années passées, ne sont pas prêts  à l’échanger contre un système obscurantiste, importé d’une autre époque et difficilement adaptable à leur environnement actuel. La communauté internationale, qui fait vivre le Mali par ses largesses et ses investissements, n’est sûrement pas disposée à cautionner et faire prospérer un système aussi rétrograde et déshumanisant. Les militaires, qui détiennent la réalité du pouvoir, ont compris, eux aussi, que la fin de non-recevoir opposée par la CEDEAO à la requête qui lui a été présentée, conduirait le pays à une situation pire que celle qu’il connait actuellement. Sans la CEDEAO, il ne peut tenter l’aventure militaire en solitaire. Il ne peut compter non plus sur l’aide des partenaires internationaux qui l’écouteront poliment sans poser le moindre geste. C’est pourquoi, l’espace de quelques heures, ils ont fait volte-face, tourné casaque. Eux qui avaient fait écrire dans la requête à la CEDEAO que des troupes communautaires combattantes ne seront pas déployées sur le sol malien  acceptent  désormais que ce soit le cas. Le quartier général (QG) du contingent sera installé à Bamako, de même que la base logistique. Ce qui préfigure bien le déploiement sur le terrain. On peut comprendre que ce  déploiement se fasse hors de Bamako,  non pas pour éviter la colère des populations comme l’a prétendu le ministre de la Défense, le colonel major Yamoussa Camara, mais probablement pour épargner aux militaires maliens ce qu’ils croient être une humiliation de plus. En recevant dimanche le ministre Ivoirien de la Défense, Joseph Koffi Koffi, Dioncounda affichait  un air  contrarié. Il n’est jamais agréable, en effet, d’assumer un acte aujourd’hui et son contraire demain. Cela projette de la personne concernée une image de pantin. Mais l’essentiel est que le Mali soit sauvé des détracteurs de la CEDEAO qui ne sont pas forcément ceux qui servent le mieux ses intérêts. Loin s’en faut. Saouti  HAIDARA         

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