Mali-France : Une escalade diplomatique aux conséquences incertaines
Au-delà des joutes protocolaires et des communiqués de Paris et Bamako, la confrontation diplomatique a une victime invisible mais bien réelle : les populations. L’orgueil politique est passé par là.

La tension diplomatique entre le Mali et la France franchit un nouveau cap. Après l’arrestation à Bamako, en août 2025, d’un agent diplomatique français, Paris a riposté en suspendant sa coopération antiterroriste avec Bamako et en expulsant deux diplomates maliens. Ces derniers, membres de l’ambassade et du consulat du Mali en France, ont été déclarés persona non grata et sommés de quitter le territoire français avant samedi dernier, selon une source diplomatique citée par l’AFP. La France dit suspendre sa coopération antiterroriste avec le Mali.
Nous avons également appris qu’en réplique, Bamako a expulsé cinq diplomates français de l’Ambassade de France.
Il faut dire que cette escalade vient confirmer la dégradation continue des relations entre les deux pays, autrefois partenaires historiques, désormais enfermés dans une spirale de défiance et de représailles.
Au-delà des joutes protocolaires et des communiqués, cette confrontation diplomatique a une victime invisible mais bien réelle : les populations.
Derrière ces passes d’armes diplomatiques, ce sont les populations qui risquent de payer le prix fort. A chaque mesure de rétorsion, ce sont les citoyens ordinaires qui payent la facture.
Des milliers de Maliens vivent en France, tout comme une importante communauté française réside au Mali. Chaque mesure d’expulsion, chaque suspension de coopération, fragilise davantage leur quotidien.
Pour les Maliens de France, déjà confrontés à des difficultés administratives, la détérioration des relations bilatérales pourrait compliquer les démarches de régularisation, l’accès à certains services, ou encore aggraver les discriminations.
Du côté malien, les Français installés à Bamako et dans d’autres grandes villes voient peser sur eux un climat de suspicion croissante, alimenté par les tensions politiques.
Jusqu’où ira l’escalade ?
La rupture est-elle inévitable ? L’histoire récente des relations Mali-France laisse craindre une spirale difficile à enrayer. Paris et Bamako semblent s’enfermer dans une logique de fermeté, au risque de tourner le dos à toute perspective de dialogue. Or, les conséquences d’une rupture totale dépasseraient le cadre diplomatique : elles toucheraient directement à la coopération économique, éducative et culturelle, autant de domaines vitaux pour les populations des deux pays.
Les gouvernements parlent de « souveraineté » d’un côté et de « fermeté » de l’autre. Mais derrière ces mots solennels, une réalité crue s’impose : la diplomatie se transforme en un champ de bataille où les peuples sont utilisés comme boucliers ou comme leviers de pression.
Paris et Bamako préfèrent jouer la carte du bras de fer plutôt que celle de la responsabilité partagée.
Au fond, ce n’est pas la sécurité des populations qui guide ces choix, mais la volonté d’affirmer une autorité, de sauver la face et d’envoyer des signaux d’intransigeance.
En vérité, ce duel n’aura pas de vainqueur. Ni Paris ni Bamako ne sortiront renforcés de cette spirale. Les seuls perdants seront les citoyens qui travaillent, étudient, voyagent, aiment et vivent entre les deux rives.
La question reste entière : jusqu’où cette escalade diplomatique peut-elle nous mener ? Et surtout, qui en sortira réellement perdant : les gouvernements qui s’affrontent ou les peuples qui subissent ?
En clair, cette querelle de chancelleries illustre une vérité brutale : quand les diplomates se disputent, ce sont toujours les peuples qui embatissent.
B.S.
(Doctorant en science politique)
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