Au cours de la conférence de presse animée par les responsables de la classe politique malienne hier, jeudi 16 février 2012 à la Maison de la presse, le président de l'Adéma-PASJ et porte-parole, Pr Dioncounda Traoré, ne s'est pas fait prier pour asséner ses quatre vérités sur " la situation extrêmement grave " créée dans le pays par les récentes attaques des bandits armés dans le septentrion. Pour le candidat investi par le PASJ, si les élections ne se tiennent pas à dates constitutionnelles échues, tout peut se passer. Même un coup d'Etat n'est pas à exclure. Ce serait alors un regrettable recul pour la démocratie malienne citée en exemple de part le monde. La République même sera en péril. C'est pourquoi, assure Dioncounda Traoré, il faut tout mettre en œuvre pour que les élections se tiennent à dates constitutionnelles échues.
[caption id="attachment_48658" align="aligncenter" width="600" caption="Dioncounda Traoré"]

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Cette rencontre avec les hommes des médias se situe dans le cadre de la volonté de la classe politique d'expliquer à l'opinion nationale et internationale les initiatives qu'elle a prises en proposant un plan d'actions pour sortir de la crise actuelle née des attaques de bandits armés contre leur pays, le Mali, un et indivisible.
Le conférencier en chef, le président de l'Adéma-PASJ non moins candidat investi par ce parti à l'élection présidentielle du 29 avril 2012, Pr Dioncounda Traoré, a rappelé brièvement ces événements douloureux qui ont endeuillé plusieurs localités du Nord du pays. Ce sombre feuilleton a commencé le 17 janvier 2012 par les attaques criminelles des bandits armés sur Ménaka et s’est poursuivi par des agressions et massacres de militaires perpétrés par ces voyous du désert à Tessalit et Aguelhoc du 18 au 24 janvier ; Anderamboucane et Léré le 26 janvier, le 31 et 1er février à Nianfunké, etc. Le summum de ces crimes a été atteint à travers l'exécution froide des éléments de l'Armée nationale à Aguelhoc. Bilan, selon le conférencier une centaine de victimes (95 militaires plus précisement). Cela a été suivi des émeutes et des manifestations insurrectionnelles à Kati, Bamako et dans d'autres villes du pays les 1er et 2 février 2012, avec à la clé des menaces sur des populations touarègues ...
Et Dioncounda Traoré de poursuivre que les attaques se sont poursuivies à Tinzawaten le 8 février, la reprise de Léré par l'Armée nationale… "Tout cela a provoqué une psychose généralisée et un exode massif des populations qui se sont réfugiées dans des pays voisins dans des conditions de vies précaires", a déploré Dioncounda Traoré avant de faire remarquer que les auteurs de ces attaques, les éléments du MNLA, revendiquent l'indépendance d'un territoire appelé l'Azawad.
"Avec cette situation extrêmement grave, il est apparu aux partis représentés à l'Assemblée nationale qu'il était urgent de se concerter afin de mettre fin aux amalgames et à la confusion, de faire taire les armes, de rassurer les populations, d'engager, sans délai, un dialogue pour la paix et la stabilité", a expliqué le Pr Dioncounda Traoré. Avant d'ajouter que les partis se sont alors réunis successivement les 2 et 3 février 2012 et ont décidé de dépêcher une délégation auprès du président dela République. Ladélégation a été reçue le 4 février par le Chef de l'Etat et lui a soumis un projet de Forum national pour la paix et la stabilité au Mali. Un plan d'actions a été ensuite élaboré, présenté au Chef de l'Etat qui l'a approuvé. Celui-ci a édifié les acteurs politiques sur la genèse et l'évolution de ce dossier récurrent du Nord-Mali. Il les a rassurés sur les capacités opérationnelles de l'Armée nationale.
Des actions ambitieuses
L plan d’actions comporte des axes majeurs présentés par Dr Choguel Kokalla Maïga du MPR. Ces propositions d'actions sont : " exposer le projet à l'ensemble de la classe politique, organiser une conférence de presse pour exposer les grandes lignes du projet, obtenir un temps d'antennes sur les radios et les télévisions pour expliquer le projet, mettre au point un plan de communication interne et externe, rencontrer les leaders religieux, les syndicats, les organisations de la société civile, les autorités coutumières de Bamako pour leur exposer le plan d'action, rencontrer les chefs de toutes les institutions dela République, renforcer la confiance au sein des forces armées et de sécurité : en renforçant leur capacités, leur motivation, en les assurant du soutien dela Nationtout-entière pour rétablir la sécurité sur l'ensemble du territoire national en vue de créer les conditions d'un cessez-le- feu, entreprendre toute actions nécessaires pour renforcer la cohésion nationale, éviter les amalgames et la stigmatisation et ressouder le tissu social, tenir un meeting à Bamako et dans les régions; des mouvements de solidarité en direction des familles des militaires morts sur le champ de bataille, des soldats au front, des compatriotes victimes d'amalgame ".
Il est prévu également de "contacter les personnalités qui ont quitté le Mali et qui se trouvent dans les pays voisins, d'envoyer une délégation à Kidal, Gao et Tombouctou pour rencontrer les chefs traditionnels et leaders d'opinion ; d'organiser une rencontre avec les députés et les conseillers nationaux, rencontrer à Bamako les leaders d'opinion et représentants des populations du nord, aller à la rencontre de nos compatriotes réfugiés dans les pays voisins, prendre les contacts nécessaires en vue de l'instauration d'un cessez- le feu, prendre attache avec les gouvernements susceptibles d'apporter leur concours à l'ouverture d'un dialogue avec les groupes rebelles, rencontrer à Bamako les ambassadeurs et représentants des pays et organisations susceptibles d'appuyer les initiatives de paix, tenir une réunion d'information avec l'ensemble du corps diplomatique et les représentants des organisations internationales, organiser le forum pour la paix et la stabilité dès que possibles "
Pour le président de l'Adéma-PASJ, tous les efforts de la classe politique visent à ramener la sérénité en faisant taire les armes et en amenant tous les fils de ce pays au dialogue. L'objectif final, en filigrane, étant l'organisation dans les délais constitutionnels des prochaines élections.
Démocratie en péril?
A la question de savoir qu'adviendra-t-il si l'on n'arrivait pas à aller à ces consultations électorales, le conférencier dira : "s'il n'y a pas d'élections, tout peut arriver. Ce sera un recul de notre démocratie pour laquelle nous avons consentis beaucoup de sacrifices. S'il n'y a pas d'élections, notre démocratie serait en péril.La Républiquemême serait en péril. S'il n'y a pas d'élections, même un coup d'Etat peut arriver et cela nous ne le souhaitons pas pour notre pays. C'est pourquoi, nous faisons tout pour que ces élections puissent se tenir à dates échues ", a indiqué Pr Dioncounda Traoré.
Pour l'orateur, il n'y a pas lieu de verser dans des supputations, dans des petits calculs du genre une transition que lui n'est pas prêt à diriger. Il faut seulement se mobiliser pour sauver l'unité et la cohésion nationale, pour la défense de l'intégrité du territoire et mettre tout en œuvre pour organiser les prochaines élections à dates constitutionnelles échues.
Le candidat investi par le parti majoritaire du paysage politique malien, non moins président dela Représentationnationale a en outre mis un accent particulier sur le rôle important de la presse en ces moments où l’unité nationale est menacée. «Nous devrons, tous ensemble, remporter aussi la guerre de la communication avec tout ce qui se dit sur les médias internationaux notamment les médias français».
Et Dioncounda Traoré de laisser entendre qu’il a attiré l’attention du ministre français dela Coopération, Henri de Raincourt sur cet état de chose lors de son dernier passage à Bamako. Quelques piques ont été adressées par des intervenants sur le rôle dela Francedans cette crise.
Concernant le rôle qu’a joué l’Assemblée nationale dans ce dossier, l’orateur dira que l’Hémicycle n’a jamais cessé de rappeler que le Nord était une zone où la question sécuritaire est plus que préoccupante. Il a expliqué qu’il attire l’attention dans ses discours sur la volatilité de situation sécuritaire des régions Nord où le trafic de drogues, les prises d’otages, le banditisme s’étaient beaucoup développés.
A propos de ceux qui pensent que les négociations sont inopportunes et qu’il faut aller à un réglement militaire du problème, Dioncounda Traoré affirme le contraire. «On ne peut pas faire éternellement la guerre. Il faut, à un moment ou un autre, faire asseoir les gens autour d’une table. Même si c’est par la force, il faut aller au dialogue, s’écouter, se comprendre...».
Le conférencier a soutenu qu’il ne faut jeter l’anathème sur qui que ce soit dans ces moments difficiles. «Nous sommes tous responsables de cette situation. Nous devons nous donner la main pour trouver les solutions pour un retour définitif de la paix».
A propos du financement des activités prévues dans le plan d’actions, le Pr Traoré a indiqué qu’une partie sera financée par le Gouvernement et une autre par les partis politiques.
Bruno D SEGBEDJI