Discriminatoire envers les femmes maliennes, Le code de la famille nous piétine
Le code de la famille a été voté le vendredi dernier. Toutes ces femmes qui, pauvreté oblige, ont investi l’espace public et, de ce fait, contribuent à la gestion financière de leur foyer, ne peuvent être dans le rang de l’infériorité par la soumission. Ces femmes ne devraient pas rester dans l’ombre, car elles ont un rôle important à jouer dans les foyers et dans ce sens, elles ont droit à une répartition équitable du pouvoir au sein de la famille.
Où se cachent les associations des femmes du Mali?
Après une longue lutte et un effort inlassable engagé depuis quelques années pour défendre les droits des femmes, les associations des femmes se sont cachées derrière les grands boubous des hommes en leur donnant carte blanche à l’Assemblée pour bafouer tous leurs droits. Au lieu que ces associations s’impliquent davantage pour défendre les femmes, elles sont restées à l’écart : une incompréhension totale. Comment peut-on créer des associations dans ce sens et rester inactives ? Cela n’a pas de sens !
Nous savons qu’au sein d’une société comme la nôtre, le changement de mentalité n’est pas facile et implique du courage. Mais ces mouvements sont faits pour cela. Sans revendications de nos droits, comment s’inscrire dans une avancée de l’histoire? En vérité, c’est de notre émancipation et de notre libération que dépend la construction démocratique.
Manque de communication
Depuis le début de ce problème de code de la famille, la communication a fait défaut. Et pourtant, les associations sont là pour faire comprendre aux femmes l’importance de l’enjeu. Le gouvernement aussi a manqué de tactique en matière de communication. Malgré les difficultés, si on avait développé une pratique du réseautage, l’ancien code serait aujourd’hui un acquis. Avec une ample mobilisation marquée par une approche innovante en matière de communication, le code aurait obtenu une grande acceptation, compréhension et un bon accueil de la part de l’opinion publique. Nous les femmes maliennes, nous avons un long chemin à faire. Nous devons redoubler d’effort et de courage, travailler dans le sens de la communication, continuer à revendiquer nos droits à l’encontre des décideurs et de l’opinion publique qui débouchera tôt ou tard sur une prise de conscience et de faire en sorte qu’il ne soit plus possible que les droits des femmes soient ainsi bafoués. Pour finir, il est nécessaire de s’attacher à changer les comportements et les attitudes. La promotion d’une culture de l’égalité est la plus grande des batailles et certainement la plus difficile.
Les valeurs que les femmes défendent doivent être présentées, diffusées et défendues auprès des jeunes, des hommes et des femmes pour qu’ils puissent se les approprier, les porter et les défendre avec le mouvement. Mais comment les valeurs d’égalité, de liberté et de tolérance peuvent-elles être portées et défendues si ce nécessaire travail n’est pas fait par nous-mêmes les femmes?
Ce qui se fait pour vous, sans vous, se fera contre vous !
NNC
Code des personnes et de la famille :
Enfin un laborieux consensus
Après son adoption en août 2009 par l’Assemblée nationale, le Code des personnes et de la famille avait été renvoyé à une seconde lecture par le Président de la République Amadou Toumani Touré, suite à un soulèvement populaire des religieux à travers le pays et un grand rassemblement contestant le Code. A cet effet, 51 Articles ont fait l’objet d’amendements sur les 1 143 que contient ce Code.
Ces amendements ont été apportés sur certains points comme le divorce, la filiation de l’enfant naturel, l’adoption, la tutelle, la succession, l’héritage et la légalisation du mariage religieux, entre autres. L’Assemblée nationale vient de l’adopter à l’unanimité le 2 décembre 2011. Aussi, des citoyens livrent leurs impressions par rapport à l’adoption de ce Code. Si les uns ont leurs avis là-dessus, les autres ne sont même pas au courant de ce Code qui avait pourtant fait tant de bruits.
Mamadou Ben Chérif Diabaté, griot :
« L’adoption du Code des personnes et de la famille est une très bonne chose. Je l’ai dit depuis le début. Le réseau des communicateurs traditionnels avait même organisé une conférence d’informations sur la nécessité et l’importance du Code. Compte tenu de l’évolution du temps, il faut que la société et l’Etat acceptent de s’améliorer. Le RECOTRADE a estimé cette amélioration de la société malienne. Et, l’adoption de ce Code est très salutaire. Les amendements apportés sont très bien parce qu’un texte n’est jamais parfait. Il faut toujours l’améliorer. Et ces amendements contribuent à l’amélioration du Code ».
Mme Coulibaly Sanata Diallo, vendeuse de carottes :
« L’adoption du Code des personnes et de la famille est une très bonne chose pour le pays et surtout pour nous les femmes en ce qui concerne la légalisation du mariage religieux. Vraiment, je remercie les initiateurs du Code ».
Mme Mariam Traoré, vendeuse de légumes :
« C’est ma première fois d’entendre parler d’un Code de personnes et de la famille. Ce qui m’intéresse, c’est mon petit commerce. Je quitte très tôt le matin et je reviens tard la nuit ; donc je ne suis pas informée de ces trucs. Ce que je peux dire, si cela est bien pour notre pays, c’est une bonne chose. Comme tu viens de m’informer sur la légalisation du mariage religieux. C’est encore mieux. Les gens ne peuvent plus faire n’importe quoi ».
Sékou Dembélé, secrétaire exécutif du RECOTRADE :
« L’ancien Code des personnes et de la famille ne faisait pas l’unanimité. C’est vrai qu’il y a eu des débats au niveau local, régional et national autour du Code, et les religieux y ont été approchés. Cependant, quand il a été adopté, les gens ne se sont pas reconnus dans le Code transcrit. C’est vrai que l’Assemblée nationale avait déjà adopté le Code, mais les gens ont fait valoir leurs droits dans le Code, notamment les gens du culte. C’était assez difficile parce que l’Assemblée nationale avait déjà retenu le Code, et il restait seulement que le Président de la République le promulgue, étant donné qu’il y a eu toutes ces résistances et même des marches de protestation contre le Code. Le Président Amadou Toumani Touré a été sage de renvoyer le Code à une seconde relecture. Ce qui signifiait qu’il fallait associer à cette relecture tous ceux qui ont protesté contre le Code. Parce qu’il fallait à notre pays un Code consensuel, accepté par tous et où chacun se reconnait et respecte les droits de chaque citoyen. C’est ce qui a été fait. L’Assemblée nationale a pris le temps qu’il fallait pour faire cette concertation. Aujourd’hui, nous sommes heureux de l’adoption du Code des personnes et de la famille. Un Code consensuel par l’Assemblée nationale qui ouvre de nouvelles perspectives aux citoyens, femmes, enfants et hommes de ce pays. Nous sommes heureux que cela aboutisse ainsi. On ne fait que s’en féliciter, féliciter le Président de la République pour sa sagesse, féliciter l’Assemblée nationale pour l’ouverture dont elle a fait preuve envers tous ces contestataires. Nous sommes heureux pour nous-mêmes parce que cela concerne nous tous ».
Mme Keïta Assitan Dembélé, agent commercial :
« Je dirai que tout est bien qui finit bien. Je salue vraiment l’adoption du Code des personnes et de la famille et surtout la sagesse des uns et des autres, parce que cette histoire pouvait aller très loin si les uns et les autres n’avaient pas été compréhensifs. J’ai eu l’occasion de lire en vrac le Code. Les droits des personnes et de la famille sont judicieusement analysés. Je pense que chacun y trouve son compte. Surtout un point salutaire : la légalisation du mariage religieux».
Mme Mariko Korotoumou Théra, femme politique, combattante pour plus d’équité et de justice pour les femmes :
« D’abord par rapport au renvoi du Code des personnes et de la famille, c’est mon point de vue : je pense que quelque part, il a manqué un suivi du dossier. D’aucuns me diront que dans la commission, tout le monde était membre, et que les mêmes personnes qui étaient membres de la commission sont ceux-là mêmes qui se sont opposés au vote favorable du Code à l’Assemblée nationale. Il y a eu beaucoup de bruits autour de plusieurs questions, dont la question de l’héritage avec un enfant né hors mariage, l’adoption, etc. Essentiellement, là où il y avait un problème, c’était la question de l’héritage parce qu’il y a eu un affrontement entre les défenseurs des règles de gestion de la vie des familles de la religion musulmane et puis, les principes et règles de gestion de la vie selon les textes et lois. Je pense que les gens ne cherchent pas souvent à savoir ce qui est dit par le Coran, qu’est ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas. De mon point de vue, selon la religion musulmane, quand tu as un enfant hors mariage, tu es libre de lui léguer la part que toi-même tu désires lui donner et cela, de ton vivant. Partant de là, je ne voyais pas de difficultés. Par rapport à l’adoption, ce qui est mentionné là-bas est juste et me convient parfaitement. Malgré mon âge, je suis de la vieille école. Donner un enfant à quelqu’un pour l’adoption, il faut vraiment avoir des garanties par rapport au devenir de cet enfant, parce que l’éducation de base détermine tout. L’enfant doit évoluer dans un milieu et dans des conditions lui permettant d’être en harmonie avec sa société. J’ai lu également la partie qui concerne les divorces. Ce qui est là-dedans n’est pas mauvais, mais je pense qu’il faut encore améliorer, parce qu’il y a trop de divorces. Autant il y a des mariages, autant il y a beaucoup de divorces. Je pense qu’il faut aller un peu plus encore dans les exigences vis-à-vis du couple pour qu’on connaisse moins de divorces. L’Article qui parle de la dot : avant, on disait que la dot était symbolique ; mais dans le nouveau code, on dit qu’elle est obligatoire et symbolique. De mon point de vue, elle ne doit pas être obligatoire, elle doit être symbolique. Je suis très contente de la légalisation du mariage religieux. Je suis très contente de la légalisation du mariage religieux, car les Maliens avaient pris l’habitude de se moquer de la Loi, surtout les hommes qui se marient sous le régime monogamique. Aujourd’hui, si le mariage religieux est reconnu officiellement, c’est fini, on ne peut plus aller se marier sous le régime monogamique et aller se remarier ailleurs ».
Salimata FOFANA
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