Mokontafé Sako, cantatrice : À quand la reconnaissance nationale de l’immortalité ?

2 Octobre 2025 - 02:11
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Mokontafé Sako, cantatrice :  À quand la reconnaissance nationale de l’immortalité ?
Mokontafé Sako,une grande canatatrice qui a dédié

En regardant (le 21 septembre 2025) le grand show de « la Nuit de la renaissance culturelle du Mali » (avec les Ami Koïta, Mah Kouyaté N°1, Naïny Diabaté, Abdoulaye Diabaté, Djénéba Seck, Oumou Dédé Damba, Oumou Sako, Babani Koné, Biguini Bagaga, Mariam Bah, Téninyini Damba, Kala Bulo de Bourama Soumano), organisée dans le cadre du 65e anniversaire de l'indépendance du Mali, nous n’avons pas pu nous empêcher de penser à une Dame, une patriote atypique, une cantatrice à l’engagement intemporel puisque la patrie survit toujours à ses serviteurs, même aux plus loyaux et aux plus fidèles. Nous avons nommé Mokontafé Sako ! Malheureusement, aucune reconnaissance de la nation à cette grande patriote depuis son décès le 25 décembre 2002. Pas à notre connaissance en tout cas. C’est pourquoi le ministère de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme doit profiter de cette « Année de la Culture » pour rectifier le tir, corriger cet oubli en immortalisant par une œuvre, une infrastructure, un prix lors par exemple de la prochaine Biennale artistique et culturelle ! Elle le mérite amplement !

 

« Mali denw, agné aw djanto Malila » ! Un titre qui résonnera toujours comme la dernière volonté de Mokontafé Sako ! L’ultime engagement en faveur de la patrie. Une chanson intemporelle et qui est toujours d’une pertinence inouïe en ce moment où tout nous divise aux dépens des intérêts de la patrie. Cette grande cantatrice s’est préoccupée du sort du Mali jusqu’à son dernier souffle. Aujourd’hui, les grands événements du Mali sont orphelins de sa voix et de son engagement à toute épreuve quand il s’agit du… Mali ! En effet, Mokontafé Sako restera à jamais une figure emblématique de l’histoire contemporaine du Mali. C’est pourquoi, l’indifférence de la nation vis-à-vis de sa mémoire est incompréhensible, à la limite révoltant.

Elle a été parmi les principales chanteuses maliennes pendant les deux premières décennies après l'indépendance. Après l'éclatement de la Fédération du Mali en août 1960, Mokontafé a quitté Dakar dans la délégation de feu le président Modibo Keïta afin de rentrer à Bamako, dans le même train que feu le Général Abdoulaye Soumaré. Et selon de nombreux témoignages, c’est elle qui a alerté les soudanais et mobilisé les femmes quand Senghor a envoyé les policiers pour arrêter Modibo Keïta à Dakar. Certains lui en veulent pour son implication dans la vie politique du temps de l’Union démocratique du peuple malien (UDPM, parti unique) et de l’Union nationale des femmes du Mali (UNFM) après avoir été « une figure artistique emblématique » du régime de feu Modibo Kéita. Mais, c’est aussi oublier qu’elle est une griotte, sans doute attachée à des valeurs de loyauté et de fidélité qui ne lui interdisaient pas de continuer à s’engager pour le pays qui est au-dessus de toutes les autres considérations.

« Par son courage et son désir de voir le Mali aller de l’avant, elle a beaucoup œuvré pour la prospérité du pays et l’entente entre les Maliens. Elle est était d’un engagement viscéral à la patrie. Comme dirait l’autre, Mokontafé avait le Mali chevillé au corps. Ne serait-ce que pour cela, elle mérite tous les honneurs et surtout la reconnaissance nationale à travers une infrastructure qui l’immortalise », nous rappelle l’artiste et instrumentiste virtuose, Idrissa Soumaoro. Beaucoup d’autres témoignages ont abondé dans le même sens.

« Mali denw, agné aw djanto Malila… Si les Maliens pouvaient comprendre le message contenu dans ce titre et se l’approprier, je pense qu’on allait faire fi de beaucoup de faux problèmes, nous donner la main pour relever ce pays et aller de l’avant », rappelle un officier de police qui a requis l’anonymat. « Mokontafé Sako m'a dit un jour : Boubacar, le Mali est plus important que nos deux modestes personnes. C'est vrai, je suis malade, mais je t'en prie partons faire le clip de cette chanson, elle est importante pour moi », se rappelle aussi (sur Facebook) Boubacar Sidibé, réalisateur et aujourd’hui membre du Conseil national de la Transition (CNT).

« Deux semaines plus tard, à ses funérailles, j'ai compris que le clip que j'ai réalisé au Mémorial Modibo Kéita avec elle était sa chanson testament pour le peuple malien », ajoute-t-il. Il s’agit du clip de « Mali denw, agné aw djanto Malila ». La cantatrice demande aux Maliens de bien prendre soin du Mali. En d'autres Termes, rappelle Boubacar Sidibé (Administrateur des Arts et de la Culture), « Maliens prenez soin du Mali sur le plan sécuritaire, sur le plan de la santé, sur le plan de l'éducation, sur le plan socio-économique et juridique, sur le plan politique… Prenez soin du Mali, car vous êtes un grand peuple ».

 

Une carrière artistique consacrée à l’engagement patriotique

Née en 1934 au Mali, dans une grande famille de griots, Mokontafé Sako fut une des grandes divas de la musique mandingue version « bamananfoly », la musique bambara qui occupe une place prépondérante dans la culture malienne. Chanteuse très populaire pendant les deux premières décennies après l'indépendance du pays, Mokontafé Sako a été parmi les principales chanteuses maliennes durant les deux premières décennies après l'indépendance. Elle a pesé dans la formation de l'Ensemble national instrumental du Mali (EINM). Elle a d’ailleurs longtemps assisté le directeur de l'ensemble, Bourama Sako.

Pendant les années 1970, Mokontafé a enregistré quatre albums pour le label Sonafric. Mais son importance pour la musique et la société malienne dépasse largement celle des quatre albums, car elle était là au moment où l'histoire de son pays s'écrivait, au moment de l'indépendance et durant les premières décennies où elle a chanté aux occasions importantes. Sa musique était diffusée à la radio du Mali pendant les jours de fête et Mokontafé était respectée et estimée pour sa voix, son charme et son sourire.

Elle s’est retirée de la musique et de la vie publique en 1990, même si en 2002 elle a encore composé une chanson à l'occasion de la Coupe d'Afrique des nations de football, CAN « Mali 2002 ». Sa discographie est riche de « Mokontafé Sako et son Ensemble traditionnel » (Sonafric SAF /1977), « Les Aigles du Mali » (Sonafric SAF /1976), « Biennale spéciale du Mali » (Sonafric SAF/1976), « Farafina Musow » (Sonafric SAF/1975). Chanteuse la plus populaire des années 1960 au Mali, Mokontafé Sako est décédée le 25 décembre 2002.

Malheureusement, le Mali ne lui a jamais rendu un hommage à la hauteur de son talent, surtout de son attachement viscéral à la patrie, à son image et à son honneur.  « L’Année de la Culture » offre aux autorités l’opportunité de réparer ce tort en immortalisant Mokontafé Sako par une œuvre, une infrastructure, un prix… La prochaine Biennale artistique et culturelle (BAC), « Tombouctou 2025 », en offert aussi une très belle opportunité. Ce ne serait que justice rendue à sa mémoire !

Moussa Bolly

 

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