Santé de la Reproduction au Mali: La Nécessité d’une Nouvelle Loi S’impose!

En Afrique de l’Ouest, le Mali se distingue par son engagement envers la santé de la reproduction, ayant été l’un des premiers pays à adopter une loi en la matière, la loi n°044 de 2002.

9 Sep 2025 - 09:49
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Santé de la Reproduction au Mali: La Nécessité d’une Nouvelle Loi  S’impose!

Cependant, 23 ans après sa mise en œuvre, une évaluation récente menée par l’Office National de la Santé de la Reproduction (ONARS), en partenariat avec des acteurs du secteur, révèle des insuffisances significatives dans cette législation. Ces insuffisances concernent notamment les besoins évolutifs de la population, en particulier des jeunes et des personnes atteintes de maladies chroniques. Cela justifie et impose la révision de la loi pour une nouvelle législation, plus inclusive et « révolutionnaire », comme l’a souligné le Directeur de l’ONARS, Dr Ben Moulaye Idriss, afin d’assurer une santé de la reproduction moins coûteuse tant pour l’État que pour les ménages.

Selon Dr Ben Moulaye Idriss, le Mali est parmi les premiers pays en Afrique de l’Ouest à avoir une loi sur la santé de la reproduction, la loi n°044 de 2002, bien connue du public. Vingt-trois ans après, une évaluation a été effectuée pour déterminer si cette loi répondait aux besoins des populations. Il a ajouté que ces besoins évoluent énormément au fil des décennies, ce qui a conduit au constat des insuffisances, notamment en matière d’offres de services et de protection des prestataires et des patients. Face à cela, l’ONARS a jugé nécessaire d’évaluer la situation. Les insuffisances identifiées ouvrent la voie à une nouvelle proposition de loi. C’est dans ce cadre que, depuis 2024, l’office a commencé un processus d’évaluation et d’élaboration.

Dr Ben Moulaye Idriss  a poursuivi en soulignant que le processus d’élaboration d’une nouvelle loi comprend de nombreuses étapes, car une loi doit émaner de la population. Dans ce cadre, toutes les parties prenantes ont été invitées à donner leur avis lors des ateliers organisés par l’ONARS depuis 2023. Parmi ces acteurs, on trouve des associations de femmes leaders, des groupes religieux, des jeunes, ainsi que des associations de malades du VIH, de drépanocytose, d’hépatite et d’hémophilie, qui ont tous contribué à cette réflexion. Il a précisé qu’il en ressort plusieurs grandes idées révolutionnaires et pertinentes.

À ce stade, la proposition de loi se trouve au niveau du processus de soumission au Conseil élargi de Cabinet avant l’étape de la publication du contenu, a fait savoir Dr Ben  Moulaye Idriss . Et d’ajouter que cette loi est révolutionnaire et que son processus d’élaboration est presque parfait. Selon lui, la nouvelle loi permettra de protéger les prestataires et d’offrir de nombreuses possibilités aux bénéficiaires. Par ailleurs, il souligne que cette loi a une vision à long terme pour garantir une population en bonne santé. En effet, les drépanocytaires représentent 12 % de la population malienne, et le Mali enregistre 3 % de personnes atteintes d’hépatites, sans compter un grand pourcentage de malades d’hémophilie et d’autres maladies.  Face à cela, le DG de l’ ONASR déclare « Nous sommes dans une dynamique d’avoir une loi qui va protéger à long terme et garantir une population en meilleure santé, réduisant ainsi le poids de la santé sur les foyers et sur l'État, car une population en meilleure santé sollicitera moins les structures de santé et les chefs de famille », ajoutant qu’avec cette loi, le Mali aura moins de malades drépanocytaires, d’hépatites et d’hémophilie, car cette loi attendue comporte des volets révolutionnaires qui peuvent aider le pays pour les siècles à venir.

La Nécessité d’une Nouvelle Loi ! 

Le Pr Youssouf Traoré,  gynécologue, déclare également  qu’il est impératif de doter le Mali d’une  nouvelle loi sur la santé reproductive (SR) pour plusieurs raisons. Il souligne que la santé reproductive est très sensible et implique des acteurs de spécialités différentes (gynécologues obstétriciens, sages-femmes, pédiatres, infirmiers).  Et qu’elle  aborde des questions tout aussi délicates, notamment en Afrique, telles que la fertilité, la planification familiale, l’infection à VIH, les violences basées sur le genre et les avortements.  Selon le Pr Youssouf Traoré, pour ces raisons, la disponibilité d’une nouvelle  loi est indispensable pour encadrer les attitudes et protéger à la fois les prestataires et les bénéficiaires.  A ses dires, l’actuelle  loi SR, qui date de plus de 20 ans, est insuffisante tant dans la forme que dans le fond.  Soulignant  plusieurs articles sont imprécis, parmi lesquels il cite : « Le concept d’infertilité a évolué, l’article sur la problématique du VIH dans les couples, les critères d’interruption de la grossesse (âge de la grossesse au moment de l’interruption, le cas de la mineure enceinte du fait d’un tuteur, etc.). Les terminologies telles que les VBG sont des notions nouvelles qui ne sont pas prises en compte. », le Pr Traoré rejoint le DG de l’ONASR ainsi que d’autres acteurs pour soulever la pertinence de voter une loi plus inclusive et révolutionnaire.

Concernant les avantages que pourrait apporter la nouvelle loi, il note qu’elle permettra, entre autres, de protéger les femmes, les adolescents et les mineurs, ainsi que d’améliorer la santé de la population en facilitant l’accès à certains services (planification familiale, avortement sécurisé dans les limites de la loi au Mali)

Dans le même sens, Ibrahima Ballo, membre de l’Alliance Droits et Santé, estime qu’il est nécessaire de relire la loi afin qu’elle prenne en compte les spécificités des besoins de chaque groupe cible, notamment les jeunes, qui sont très important et sur qui repose l’avenir de la Nation.

Une Loi VBG pour Renforcer les Efforts de la Loi SR

Outre la Loi SR (Santé de la Reproduction), des observateurs pensent qu’il est nécessaire de la soutenir par une loi sur les Violences Basées sur le Genre (VBG) pour renforcer ses objectifs. En effet, selon Ibrahima Ballo, une loi sur les VBG sera utile pour lutter contre les mutilations génitales féminines et autres violences basées sur le genre. Bien que le nouveau code pénal a pris en compte de nombreux aspects liés au VBG, M. Ballo déplore toute fois que la pratique de l’excision et l'âge légal du mariage ne soit pas clairement abordé dans ce nouveau code. D’où pour lui, la necessité de l’élaboration de textes spécifiques pour condamner et réprimer la pratique de l’excision et les mariages d’enfants au Mali par une loi VBG.

 Abondant dans le même sens, la présidente de l’Association pour le Progrès et la Défense des Femmes Maliennes  (APDF), Diawara Bintou Coulibaly, également membre de l’Alliance, note qu’en dépit de l’absence d’une loi spécifique sur les Violences Basées sur le Genre (VBG), le nouveau code pénal marque quelques avancées en matière de lutte contre ces violences. Dans ce cadre, elle précise que certains éléments de l’avant-projet de loi sur les VBG ont été intégrés dans le nouveau code pénal. Toute fois, elle regrette à son tour que cette loi soit surtout bloquée au niveau du Conseil National de Transition (CNT) en raison des points relatifs aux Mutilations Génitales Féminines (MGF). «  On nous demande de continuer avec la sensibilisation, ce que nous faisons depuis les années 1960! Nous soutenons qu’il nous faut cette loi, car une loi n’ est pas uniquement répressive, mais elle est surtout dissuasive. Si des gens quittent le Burkina Faso et d’autres pays frontaliers pour pratiquer l’excision au Mali, cela démontre que non seulement nous ne protégeons pas nos filles, mais cela démontre surtout que nous encourageons l’excision d’autres enfants sur notre territoire, ce qui est très grave», s’est –elle révoltée , en ajoutant : « Il est plus facile de réveiller quelqu’un qui dort que celui qui fait semblant de dormir 

Quant à M. Ballo, il précise qu’au sein de l’Alliance, des plaidoyers sont menés auprès des décideurs pour allouer une ligne budgétaire spécifique aux Droits à la Santé Sexuelle et Reproductive (DSSR), y compris la prise en compte des besoins spécifiques des jeunes et des adolescents.

 Concernant la pratique de l’excision et les mariages d’enfants, il rappelle qu’une plainte a été déposée auprès de la Cour de Justice de la CEDEAO. Bien que le Mali ait quitté la CEDEAO, Ibrahima Ballo indique que les efforts se poursuivent au niveau de la Cour de l’Union Africaine. Selon lui, l’Alliance continue d’utiliser d’autres voies permettant d’interpeller le Mali pour l’amener à voter une loi contre les mariages d’enfants. 

Ces différentes interventions prouvent si besoin en était  la nécessité d’une nouvelle loi SR qui viendra soutenir les efforts de l’ État et ses partenaires pour une population en bonne santé et plus productive !   

 

Khadydiatou Sanogo/maliweb.net

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