Situation politico-militaire: Quand l’armée faillit à ses missions

8 Mai 2012 - 10:21
8 Mai 2012 - 11:24
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Même si l'histoire ne se répète pas, elle bégaie, disait le Pr. Joseph Ki-Zerbo. Quelque 20 ans après la chute de Moussa Traoré, les militaires « ont remis ça » en déposant avec « élégance » leur Chef suprême de l’Armée, ATT, qui a trouvé aujourd’hui refuge au Sénégal. Mais depuis le coup d’Etat du 22 mars, le pays vacille sur une pente très glissante. Selon les termes de la Constitution, c'est le président de l'Assemblée nationale, Dioncounda Traoré, qui devait assurer l'intérim du pouvoir en cas de décès, de vacance ou d'empêchement majeur du Chef de l'Etat. Mais comme les militaires ne possèdent pas une grande connaissance des textes qui régissent le fonctionnement du pays, ils n'ont pas attendu le bon fonctionnement des institutions et ont fait irruption sur la scène politique pour s'emparer du pouvoir par la force, même s’ils soutiennent le contraire. Le coup d’Etat des militaires de la junte du CNRDRE était prévisible depuis la marche des femmes du camp de Kati. Mais on n’avait pas mesuré toutes ses conséquences car juste après ce coup de force, les villes du Nord sont tombées entre les mains des rebelles et leurs compères terroristes, intégristes,  islamistes... Le mal dans tout cela, c’est que ce jour-là, le peuple malien s'est réveillé avec une « gueule de bois » en apprenant le lendemain qu'un Capitaine avait pris le pouvoir. Un officier a donc succédé à un officier supérieur taxé « d’autocrate ». Mais cette situation n'augure rien de bon quand on sait que le promu n'est qu'un Capitaine et que l'armée malienne regorge d'officiers supérieurs qui accepteraient mal ce fait accompli. Par la suite, on ne connaîtra pas la réaction officielle de la classe politique. Mais les partis politiques devaient  condamner fermement ce coup de force, même s'il y a beaucoup de choses à leur reprocher dans la lutte contre l'autocratie, notamment leur complaisance envers le régime défunt. Les démocrates et les républicains de toutes tendances qui évoluent sous nos cieux et qui croient encore que les coups d'Etat sont terminés doivent revoir leurs analyses après ce qui vient de se passer au pays de Soundiata Kéita. Malgré l'avènement de la démocratie, les armées africaines n'ont pas renoncé à l'exercice du pouvoir politique. Elles se croient même plus prêtes à ce pouvoir qu'à la défense de la patrie et du territoire national. Dès qu'on nomme un officier supérieur au poste de Chef d'Etat-major ou d’Aide de camp, il se met tout de suite à croire à son destin national. Après avoir disjoncté un moment avec ce vieux rêve (après 1968), nos officiers  l'ont repris. Dès lors, ils ne croient plus que la gloire d'un officier est sur le champ de bataille, mais plutôt sur la scène politique où ils courent après les rôles politiques que les civils leur attribuent par crainte du putsch parce que dans les allées et coulisses du pouvoir civil, chaque officier guette en permanence les défaillances de ce pouvoir pour se mettre en selle et...en vedette. Que l'armée reprenne ou confisque le pouvoir au Mali n'a donc rien de surprenant parce que le régime d’ATT devait sa solidité et sa survie au soutien musclé des forces armées et de sécurité. Malheureusement pour lui, il avait lui-même placé une trop grande confiance en l’armée, dit-on. En outre, la faible organisation de la société civile permet aujourd’hui au clan de Sanogo de s'implanter en profondeur dans la société au point de paraître « indéboulonnable » même après la remise en place de la Constitution et des institutions de la République. Après la « mode » des coups d’Etat, le rôle de la classe politique africaine consistera désormais à faire comprendre aux  armées africaines que leur gloire se trouve dans les casernes et non sur l'arène politique. Aujourd’hui, l’armée veut le pouvoir, alors que dans un passé récent, elle a failli à sa mission : ce qui   fait qu’aujourd’hui, le pays est coupé en deux. Paul N’guessan  

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