Requiem pour Tiébilé Dramé
Ce vendredi 15 août 2025, jour de l’Assomption, Bamako s’est figée dans un silence que même la pluie n’osait troubler.

Les cloches et les khoutbas se sont mêlées dans une même prière, celle du deuil et de la mémoire. Le Mali a perdu l’un de ses plus illustres fils : Tiébilé Dramé, journaliste, homme d’État, intellectuel, patriote. Il s’est éteint à Paris le 12 août, à l’âge de 70 ans, jour symbolique de la Journée internationale de la Jeunesse - comme pour rappeler que son combat fut toujours tourné vers l’avenir.
Tiébilé, que nous appelions affectueusement le “Vieux Lion”, n’a jamais cessé de rugir contre l’injustice, l’ignorance et la résignation. Son rugissement n’était pas celui de la colère, mais celui de la lucidité. Il portait haut la voix du Mali, avec la plume comme sabre et la parole comme bouclier.
Formé à l’École normale supérieure de Bamako, puis à Paris I en histoire de l’Afrique, il fit de la connaissance un outil de libération. Il ne se contentait pas d’enseigner : il éveillait. Il ne se contentait pas d’écrire : il éclairait. Il ne se contentait pas de parler : il incarnait.
Son journal, fondé en 1992, fut plus qu’un média. C’était un sanctuaire de pensée, une école de rigueur, un bastion de liberté. Il y forma des générations de journalistes, non pas à la technique, mais à l’éthique. Il nous rappelait sans cesse : «Le journalisme n’est pas un métier. C’est une mission au service du peuple».
Tiébilé Dramé fut aussi un diplomate, un ministre, un artisan de paix. Mais jamais il ne cessa d’être journaliste. Même dans les couloirs du pouvoir, il gardait cette posture d’homme libre, de veilleur, de passeur de vérité.
Ce requiem est plus qu’un hommage. C’est une promesse. Celle de ne pas laisser mourir son héritage. Celle de continuer à écrire, à questionner, à défendre. Celle de faire vivre la presse libre qu’il a tant aimée, tant protégée, tant incarnée.
À ses proches, à ses confrères, à son peuple, nous offrons ce chant de mémoire. Et à lui, nous adressons cette prière ultime :
"Requiem aeternam dona eis" — "Donne-leur le repos éternel".
Khaly-Moustapha Leye
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