L’hivernage à Kalaban : Habitants entre inquiétudes et assurance

L’hivernage commence de plus en plus à battre son plein sur les quartiers et communes de Bamako. Kalabancoura, un quartier situé entre deux marigots, a connu sa forte part d’inondation l’année dernière.

10 Juillet 2025 - 01:41
 0
L’hivernage à Kalaban : Habitants entre inquiétudes et assurance

Cette année aussi, ça craint chez bon nombre de personnes malgré les autorités locales rassurent. 

Aux environs de 13h, nous voilà dans un quartier animé de la Commune V de Bamako. Kalabancoura ! Dans une ruelle en terre battue, le regard de plusieurs riverains se tourne vers un point précis : Les marigots qui traversent leur quartier. Silencieux en saison sèche, ils deviennent menaçants dès l’arrivée des premières pluies. Une eau stagnante devenue ordinaire. Les marigots, censés faciliter l’évacuation des eaux pluviales, sont aujourd’hui remplis de déchets, de plastiques, de carcasses d’objets abandonnés.

En cette période d’hivernage, l’eau y stagne et est malodorante. Des enfants s’en approchent, pieds nus, inconscients des dangers. « Regardez, c’est devenu une poubelle à ciel ouvert » se désole Madame Samaké, une habitante depuis 15ans, indexant le marigot. « Chaque année, on demande le curage, mais rien ne change. » Un danger sanitaire constant. « Ici, tout le quartier souffre du palu. Nos enfants sont malades tous les mois. » Affirme Madame Diarra.

Le marigot est aussi devenu un foyer de moustiques. Paludisme, infections cutanées et maladies hydriques sont en hausse pendant l’hivernage. Le manque de canalisations appropriées aggrave la situation. L’indifférence des autorités, malgré les plaintes répétées les autorités locales tardent à réagir. Une tentative du curage a été entreprise l’année dernière, mais ce n’est pas aller en avant faute de moyens. « On attend toujours une vraie solution, ce n’est pas seulement notre problème, c’est un problème de santé publique. » Lance un jeune du quartier Diaguely Ganega impliqué dans une association de salubrité.

Moussa Z Doumbia maire de la commune V :

« Les marigots ne sont pas des poubelles »

Pour le maire de la Commune V, accompagné de son premier conseiller Madou D. Camara non moins chef de quartier de Kalabancoura, et coordinateur des chefs de quartier de la Commune V, il faut cesser d’utiliser les caniveaux et les marigots comme des poubelles pour remédier à l’inondation. Il donne des détails dans cette interview accordée notre journal.

Mali Tribune : Monsieur le Maire de Kalabancoura, l’hivernage approche quelles sont les mesures que vous avez prises pour cette année ?

Moussa Z. Doumbia : D’abord nous sommes en Communes V, il n’y a pas de maire de Kalaban Coura mais il y’a un maire de la Commune V. Kalaban Coura est un quartier mais pas une commune. Donc ces questions devraient se poser au maire de la Commune V ou au troisième adjoint qui est chargé de l’assainissement de la commune. Mais si vous voulez que je réponde à ces questions aucun problème.

Mali Tribune : Oui allez-y !

M.Z.D. : Le problème ne vient de pas de l’assainissement, comme vous l’avez si bien dit. L’hivernage de l’année dernière, nous gardons de très mauvais souvenir à cause d’énormes difficultés. Je pense que les autorités sont entrains de prendre des mesures pour prévenir l’hivernage qui s’annonce. La preuve en est que je suis actuellement avec le conseillé chef de quartier et il est justement là pour une mission précise à Kalaban.

Nous avons deux grands marigots dont ils sont entrain de dégager les ordures de ces marigots à 10 mètres de part et d’autre qui est une  mission nationale. En plus de cela, vous avez remarqué le curage des caniveaux. Vous voyez que les caniveaux sont en train d’être curés un peu partout dans le quartier. Donc je peux vous dire que c’est ça les mesures prises pour prévenir une éventuelle inondation pour l’hivernage prochain.

Mali Tribune : A Kalaban on a des marigots, faut-il craindre les risques d’inondation Monsieur le Maire ?

M.Z.D : Nous avons deux marigots à Kalaban ; il y’a un marigot qui est entre Niamakoro et Kalabancoura et également un autre au niveau du pont tordu de Niamakoro. Dont ils sont en train d’identifier les maisons à démolir. Le nom de ces marigots en bambara « Thiéflthié » ils se trouvent tous au niveau du fleuve Niger.

Mali Tribune : Monsieur le maire, avez-vous un message à la population de Kalaban ?

M.Z.D : Je tiens à dire à la population de ne pas se servir des caniveaux comme une poubelle. Les ordures ménagères doivent se conserver de la bonne manière, car la population est accompagnée par la mairie. De plus dans tous les marchés vous allez voir des grandes caisses qui sont déjà déposées par la mairie pour la conservation des ordures. Lors du mandat passé la mairie a investi au niveau de Bacodjicoroni, des matériels pour la conservation des ordures à peu près de deux milliards. Mais cela n’a pu aboutir à quelques choses, car la rue de Bacodjicoroni a été polluée. La mairie est entrain de déployer d’énormes efforts pour l’assainissement de la commune. Dites à la population de ne pas utiliser les caniveaux et marigots comme poubelle. C’est ce message que j’avais à lancer.

MICRO-TROTTOIR

Les craintes des populations

L’hivernage à Kalabancoura, avez-vous des craintes d’inondations cette année aussi?

Hady Daff : « un vieux du quartier »:

« Tous ceux qui ont des problèmes en période d’hivernage, en général, ce sont des problèmes liés à la construction car les Maliens prennent les maçons et leur confie la construction de leurs bâtiments comme ça. Or ceux qui ont confié leurs terrains à des architectes, n’ont pas de problèmes d’une telle ampleur. Ils ont des bâtiments bien solides et bien structurés. Même si l’hivernage fait des dégâts ils n’en ressentiront que 50%.

Si tu construis ta maison. Si tu viens montrer le terrain a un architecte, tu lui demandes de te confectionner un plan mais on vient seulement dire j’ai ce plan, la dimension est de 15/20 ou 30/25. Je veux se bâtiment, d’autre même vont montrer le plan de quelqu’un d’autre disant qu’ils veulent la même chose (4 chambres salon). Normalement l’architecte doit se déplacer sur le terrain regarder les lieux voire l’état après la pluie. Comment est la terre

Aujourd’hui tu prends un maçon, tu lui montres ton terrain. Tu lui dis, je veux 4 chambres salon, je veux 5 chambres salon. Du coté soubassement je veux construire tel étage. Ils construisent selon vos dires. Et lorsque la pluie tombe, ça fait des problèmes car l’eau ne laisse jamais sa route.

Ce n’est rien a par nos propres erreurs c’est-à-dire les propriétaires de maison et les maçons qui font le travail sans poser de problème ».

Harouna Alassane « un jeune du quartier »

« Oui parce que l’année passée ici a Kalaban vraiment, c’était difficile. Tout le monde en a entendu parler. Il y’a eu beaucoup de pluie à un tel point que même les Imams de la mosquée ont beaucoup prié pour que la pluie s’arrête. La pluie est tombée, pour ceux qui ont des villas, l’eau s’est infiltrée par les toitures, dans les salons. Ça a causé beaucoup de dégâts surtout au niveau des appareils électriques comme les télés, les réfrigérateurs etc... Ce qui a provoqué des masses électriques dans la zone. Sans mentir ça a causé d’énormes dégâts. Cette année nous prenons nos dispositions pour que ce qui s’est passé l’année dernière ne se reproduisent plus. On fait des douas aussi pour que cette année nous soit plus favorable ».

Alassane Dabo : « entrepreneur à Kalaban »

« Bon sur l’hivernage de Kalaban, cette année, on peut dire que ça débute bien mais on ne sait pas comment ça vas finir. Surtout avec l’impact qu’il y’a actuellement quand il pleut. Sinon ça va pour le moment. C’est ce que je peux dire quand même. Mais ce que j’ai à conseiller aussi à tous les habitants de Kalaban, c’est de prendre des précautions pour que l’hivernage de cette année ne déborde pas jusqu’à causer des dégâts ».

Mme Assetou Koné : « commerçante à Kalanban »

« L’an passé, ça a causé énormément de dégât. La pluie nous a causé des pertes énormes. Nous sommes même désespérées et effrayées à l’idée de revivre un tel moment. Aussi nous ne voyons aucun changement ».

Boubacar Bakayoko : « menuisier »

« Pour moi c’est à cause des caniveaux, ils sont petits et quand la pluie arrive les caniveaux débordent d’eau jusqu’à inonder les rues. C’est ce qui dérange les gens dans leurs activités. Le problème réside au niveau des caniveaux car les voies par lesquelles, l’eau passe sont bouchées. Avec l’inondation nos travaux s’arrêtent et nous sommes obligés de fermer nos portes jusqu’à ce que l’eau soit dégagée. Donc nous craignons. On ne peut qu’espérer avoir l’aide des militaires au pouvoir pour nous aider à trouver une solution à ce fléau ».

DIAGUELY GANEGA :

« Nous sommes tous coupables »

Pour ce jeune 24, Diaguely Ganega, leader d’associations à Kalabancoura, l’hivernage est vraiment difficile. Parce que selon lui, l’un des problèmes qui existe à Kalaban, c’est dans le lit du marigot, il y’a trop d’ordures. Et quand il pleut, l’eau ne coule pas comme il le faut. C’est obliger que si l’eau n’est pas évacuée, il va rentrer dans les bâtiments des gens.

A ses dires, lorsque le ciel menace à Kalaban, les habitants du quartier commencent à s’inquiéter. Surtout ceux qui sont au bord des marigots. Parce que l’eau ne s’évacue pas comme il faut. « On a fait de tout notre possible pour empêcher les gens de jeter leurs déchets dans le marigot mais rien. Les gens continuent à y jeter leurs déchets », regrette le jeune.

« On avait installé une plaque interdisant le dépôt d’ordures, mais y’a des gens qui l’ont fait disparaitre. La nuit pendant que les gens dorment, ils viennent jeter leurs ordures et partent. C’est ce qui bouche la voie à l’eau et qui finit par inonder le quartier. C’est un réel problème qui existe ici », déplore le jeune Ganega.

Pour cette année aussi, Ganega estime qu’ils sont dans le même problème car il ne voit pas de changement. « Jusqu’au moment où les gens vont comprendre qu’il faut impérativement arrêter de venir jeter leurs ordures car ça cause énormément de dégât aux personnes qui vivent à côté du marigot », pense-t-il pour demander de les sensibiliser sinon, l’hivernage de cette année se passerait comme les autres années, croit-il avant de condamner : « Si ça ne s’aggrave pas, ça ne va pas s’améliorer. Cela va continuer à perdurer avec toujours les mêmes difficultés ». « Arrêtons de jeter les ordures dans le lit du marigot », a-t-il préconisé aux habitants de Kalaban.

Dossier réalisé par

Sibba Abdou Maïga

Rougyatou Binta Dème

Bintou Touré

Almouhamoudou Cissé

(stagiaires étudiants ESC-Mali)

Quelle est votre réaction ?

Like Like 0
Je kiff pas Je kiff pas 0
Je kiff Je kiff 0
Drôle Drôle 0
Hmmm Hmmm 0
Triste Triste 0
Ouah Ouah 0