Le projet de révision de la constitution du 25 février 1992 est entré dans une phase de concrétisation avec la nomination, le 14 janvier dernier du Comité des experts pour la rédaction de l’avant-projet du texte. Mais, il semble que le processus n’est pas sans reproches…
-Maliweb.net- Dans une interview accordée à notre confrère Aujourd’hui-Mali, publiée dans le vendredi dernier, le président du Comité des experts sur la révision constitutionnelle aurait pu éviter une bourde non anodine. « On va écouter tout le monde, mais il n’est pas dit que dès que tu es écouté, tes propositions seront prises en compte», a déclaré Pr Makan Moussa Sissoko. Par ces seuls propos, le président du Comité des experts de la révision constitutionnelle explique sans peut-être sans rendre compte que ses consultations actuelles sont loin d’être la preuve de l’inclusivité du processus.
En effet, si le Comité doit écouter les uns et les autres sans nécessairement prendre en compte leurs proposition ou avis, alors on se demande à quoi sert ce beau décor de voir Makan Moussa Sissoko et sa suite se promener pour de fameux «échanges fructueux ». Ce constat s’impose surtout que plusieurs observateurs estiment que le Comité aurait dû recevoir une feuille de route claire définissant les grandes lignes de la réforme constitutionnelle envisagée. En clair, pour nombre d’acteurs politiques majeurs, le chef de l’Etat doit au préalable soumettre au Comité un document comportant les points essentiels à modifier dans la Constitution actuelle. Ce qui n’est pas le cas.
Ensuite, certains observateurs arguent qu’une révision constitutionnelle est un acte éminemment politique et qu’il est nécessaire que ce Comité de rédaction soit constitué aussi de cadres politiques aux côtés des universitaires et autres juristes. Cette appréhension part du postulat selon lequel l’on ne peut pas valider un travail qui n’aura pas pris en compte les préoccupations politiques du moment. Or, le président du Comité vient de laisser entendre que rien n’oblige le Comité des experts à consigner toutes les préoccupations de leurs interlocuteurs. Ce qui laisse perplexe sur la volonté réelle de conduire un processus révisionnel inclusif dans un Mali où l’on sait qu’une récente tentative de relire la Loi fondamentale a été bruyamment rejetée en 2017.
Pourtant, Pr Makan Moussa Sissoko déclare ceci : « On n’a pas d’apriori. Dans notre mandat, il nous est demandé de prendre en compte des tentatives de précédents processus, ce, depuis le forum politique de 1998. A ces assises, des problèmes avaient été identifiés… ». L’on est tenté de se demander si notre expert constitutionnaliste a oublié qu’en politique aussi les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Ces appréhensions apparaissent dans la mesure où l’accueil réservé au Comité par plusieurs partis politiques et des acteurs de la société civile est plutôt mitigé. Il nous est revenu, en effet que Pr Makan Moussa Sissoko et ses collègues n’ont pas été reçus les bras ouvert au FARE AnkaWuli de Modibo Sidibé ni par les communautés du Nord du pays, la semaine passée. Les interlocuteurs du Comité se sont plutôt épanchés sur leurs réserves sur la démarche du gouvernement ayant conduit à la création du Comité d’experts. « Les réformes envisagées n’ont pas une vision globale refondatrice… ». C’est la conclusion qui leur a été servie… Toute chose qui fait croire que le processus de révision constitutionnelle de cette année 2019 semble aussi mal amorcé. Ou presque. Surtout que certains acteurs politiques et des cadres de la société civile s’interrogent toujours sur la question de l’intégrité du territoire national. Condition sine qua non de la conduite à terme d’un projet de réforme constitutionnelle.
Boubou SIDIBE/Maliweb.net