Bandiougou Dante aux obsèques du président du Parena : "Tiébilé Dramé fut un infatigable défenseur de la paix, de la liberté d'expression et de la liberté de la presse"
Au nom de la presse malienne, Bandiougou Danté, président de la Maison de la presse, a rendu un vibrant hommage à feu Tiébilé Dramé, ancien ministre et Président du Parena, lors de ses obsèques, le vendredi 15 août 2025.

Alhamdoulillah,
Gloire à Dieu, l'Eternel qui a voulu que cette grande assemblée se réunisse autour de la disparition de notre frère, confrère, ami, collaborateur, compagnons pour certains, fils, père, grand père et époux pour d'autres.
Le destin a voulu que je me présente devant vous en ce vendredi saint pour porter la parole de l'ensemble de la presse malienne. Suis-je la personne la mieux indiquée ? L'on s'interroge et je m'interroge également.
Interrogations légitimes. Légitimes puisque les contemporains de Tiébilé, les plus proches collaborateurs de Tiébilé, des hommes de médias de valeur inestimable très proches de Tiébilé sont nombreux. Mais acceptez, que je sois, en tant, que président de la Maison de la presse la personne consensuelle en laquelle les différentes sensibilités de la presse proche de ce grand homme se reconnaissent.
Les journalistes se disent historiens du présent. Alors quand on demande à l'historien, qui s'essaye dans le journalisme depuis lycéen de parler d'un homme public qui a marqué l'histoire contemporaine de son pays pendant un demi-siècle, il remonte le temps, recueille des informations en confrontant les sources, les analyse pour trouver la vraisemblance historique. Les pionniers de la presse plurielle malienne comme le président Alpha Oumar Konaré, Me Mountaga Tall, Soumeylou Boubèye Maïga, etc. ont été des acteurs majeurs de l'avènement de la démocratie au Mali.
Tiébilé Dramé fait incontestablement partie de ceux qui ont vite compris la nécessité d'accompagner les premiers pas de la Presse démocratique.
Tiébilé Dramé a été un véritable homme de communication et de conviction. Qu'il s'exprime au micro ou à travers les pages du Républicain, il a toujours défendu la liberté d'expression, la dignité et la vérité.
Tiébilé Dramé l'animateur radio :
Avant de s'imposer comme l'un des grands acteurs de la vie politique malienne, Tiébilé Dramé a d'abord été une voix familière et chaleureuse pour la communauté africaine en France. Dans les années 1980, il anime à Paris l'émission de la Radio Diaspora 2000 (Tropic FM), un espace où se mêlaient informations, débats et musique, et où il portait haut les préoccupations, les espoirs et les luttes des Maliens et Africains de l'extérieur. Son passage derrière le micro fut marqué par son éloquence, sa culture et son sens de l'écoute. Il savait créer un lien authentique avec ses auditeurs, les faire voyager par les mots et les idées, tout en restant profondément ancré dans les réalités de son pays d'origine.
Journaliste et parton de Presse :
Après la Transition démocratique de 1991-1992, au cours de laquelle il fut ministre dans le gouvernement de la transition, Tiébilé Dramé fonda en 1992 l'hebdomadaire Le Républicain. Cette publication devient rapidement une tribune libre et courageuse, portant un regard critique sur la vie nationale, défendant les valeurs démocratiques et offrant un espace à la réflexion collective.
Aux dire de nombreux acteurs politiques et médiatiques de l'époque, il n'hésita pas à faire appel à de grands journalistes dont le grand frère, le doyen Saouti Haïdara qu'il est allé chercher à Dakar.
Tiébilé Dramé voyait grand et faisait tout en grand. Le Républicain est alors lancé avec un tirage de 20.000 exemplaires. Très vite, le titre est devenu une référence au Mali. Soucieux de la qualité et du contenu de son journal Tiébilé Dramé a toujours conseillé à ses journalistes la rigueur, le sérieux et le professionnalisme.
Le Fondateur de "Edicom Le Républicain" et premier directeur de publication du journal "Le Républicain", au moment de son lancement en septembre 1992, Tiébilé Dramé animait personnellement l'éditorial appelé : La lanterne. Cet éditorial aura contribué à animer le débat public.
Plusieurs grands noms de notre corporation, qui ont eu la chance d'apprendre à ses côtés, retiennent de lui le journaliste très professionnel doublé du patron de presse très responsable. Une véritable école.
Journaliste, Tiébilé était, témoignent-ils, une force de proposition qui avait le flair de détecter les sujets dignes d'intérêt et le souci de veiller à leur traitement sous le meilleur angle. Son riche carnet d'adresses était toujours là pour faciliter les contacts. Tant pour les recoupements d'informations auxquels il tenait mordicus que pour les interviews et autres formats médiatiques : reportages, enquête, etc.
A la pointe de l'information, Tiébilé n'était jamais pris au dépourvu par les événements. Il savait susciter l'intérêt avec des rappels opportuns.
Certaines grandes interviews réalisées ou inspirées par lui sont de véritables documents. "L'enfer de Taoudenni" le livre témoignage du sergent Samba Sangaré sur les atrocités du tristement bagne-mouroir, dont il est un rescapé, est à l'origine d'une interview réalisée par la rédaction du journal Le Républicain à l'initiative de Tiébilé Dramé.
Journaliste engagé, Tiébilé s'est régulièrement investi dans l'accompagnement des efforts de paix, persuadé que quand les hommes ouvrent leur cœur pour s'exprimer, la solution des problèmes est plus facile à trouver.
Aussi les colonnes de son journal étaient-elles ouvertes à tous les acteurs de la paix.
Grâce à lui, "Le Républicain" a pu faire parler, pour la première fois dans la presse privée, les leaders signataires du Pacte national, comme un certain Iyad Ag Aghaly, Raïssa Ag Sidy Mohamed et bien d'autres.
Courtois, pondéré, d'une rigueur professionnelle admirable, Tiébilé Dramé avait le souci constant de la correction, de la perfection. Jusque dans le moindre détail.
Le rôle joué par Le Républicain dans l'ancrage et la consolidation de la démocratie, le respect des droits humains de tous ordres, la relance économique du pays, les alertes aux crises socioéconomiques, sécuritaires et politiques, la gestion et la résolution de ces crises, etc. n'est à démontrer à aucun Malien, d'hier ou d'aujourd'hui, épris de vérité, de paix et de justice. Les écrits du journal reflètent-ils l'opinion politique de son fondateur ? Pas forcément, pas fondamentalement. Dans la pratique, la rédaction, tenante de la ligne éditoriale, publiait certes les activités de Tiébilé, mais les journalistes étaient libres de leurs écrits et de leurs commentaires, à condition que ceux-ci soient conformes à l'éthique et à la déontologie du métier.
Ces témoignages sont ceux d'anciens et émérites journalistes passés par là et qui ont servi et continuent à servir la Nation à diverses fonctions. J'ai nommé Ibrahima Traoré dit Franky, Dr. Brahima Fomba, Dr. Ibrahim Maïga, Cheickna Hamala Sylla, Sékou Tamboura. Tous ceux dont les noms n'ont pas été évoqués veulent bien trouver l'expression de mon respect. D'autres ne sont plus de ce monde, à l'image de Lamine Tiécoura Coulibaly et son compagnon de banc au lycée de Badala, celui de Londres durant son temps d'exil, de collaboration au Républicain et, désormais, de l'au-delà, j'ai nommé le très estimé chroniqueur, jamais égalé, feu Adam Thiam.
Tiébilé Dramé fut un infatigable défenseur de la paix, de liberté d'expression en général et de la liberté de la presse en particulier. Avec Amnesty International, il a œuvré dans la médiation politique. Chaque propos, chaque geste de l'homme montrent à l'observateur averti son amour profond pour le Mali. Que son héritage inspire les générations présentes et futures. Au nom de la grande famille de la presse malienne, nous présentons à ses familles, ses collaborateurs, son épouse, ses enfants nos condoléances.
Puisse Dieu lui réserver une meilleure place dans Son paradis éternel !"
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