Griots à l’ère numérique : Mémoire ancestrale et influence digitale

À l’heure où les récits se diffusent en stories et les généalogies s’archivent en podcasts, une question s’impose : Que devient le griot dans cette ère numérique ?

Les griots, ou Djéli comme ils préfèrent être appelés, incarnent la mémoire vivante de l’Afrique. Leur rôle ne disparaît pas avec le numérique, mais se transforme. Ils font face à de nouvelles opportunités, tout en luttant contre les risques de dilution de l’identité orale.

Bourama Soumano, griot reconnu, éclaire cette transition.

"Le terme ‘griot’ nous a été attribué par le colonisateur. Nous, nous nous appelons Djéli. Notre rôle est avant tout social : nous sommes les régulateurs de la société, à l’écoute, et porteurs d’une parole que d’autres n’osent pas prononcer. Nous sommes éducateurs, historiens, et médiateurs de la cohésion sociale", précise-t-il.

"Le Djéli détend l’atmosphère, fait rire ou même peur quand il le faut. Il rappelle les codes de vie à chacun. Dans notre société, qu’elle soit traditionnelle ou moderne, le Djéli est un pilier incontournable de la cohésion sociale", martèle-t-il.

Lors des baptêmes, mariages ou funérailles, les griots jouent un rôle central.

Au baptême, ils prononcent le nom du nouveau-né, détendent l’atmosphère, et assurent la médiation entre les familles. Au mariage, ils facilitent les échanges entre les deux familles, animent la cérémonie, prodiguent des conseils au jeune couple, et veillent à l’harmonie.

Aux funérailles, ils assurent l’accueil, transmettent les messages, organisent les rites, et accompagnent les familles du début à la fin.

Le griot est à la fois maître de cérémonie, médiateur, animateur et garant des équilibres familiaux.

Avec l’avènement des réseaux sociaux, certains griots deviennent des influenceurs, diffusant leurs récits sur YouTube ou TikTok. Le numérique élargit leur audience, touchant des milliers de followers.

"Le numérique peut faciliter la préservation du patrimoine. Chacun l’utilise à sa manière. Ceux qui veulent vraiment valoriser notre fonction peuvent en faire un outil puissant", estime Bourama Soumano.

Malgré les bouleversements, le griot conserve sa place dans la médiation sociale. Sa parole, même numérisée, reste un vecteur de cohésion, de dignité et de transmission.

Bintou Haïdara

(Stagiaire)