Us, coutumes et traditions : Du « foura tchi » en milieu rural au « kognon » en milieu urbain

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Une pièce de monnaie trouée ou non : c’est ce qui va déterminer si la nouvelle mariée était vierge ou non. Cette pièce sera jetée dans le trousseau qui sera défaite à l’occasion du départ de la mariée chez son conjoint  après le « foura tchi » c’est-à-dire les cérémonies consacrant la légitimité du mariage.

Après cette cérémonie, si la fille est trouvée vierge, son mari paie une chèvre (« ba diaga ») qui, pour des raisons coutumières, n’est d’ailleurs jamais suffisant ni satisfaisant. Dans le cas contraire, celui qui l’a « déviergée » fournira le même « badiaga » en guise de réparation de sa forfaiture. Les coutumes et traditions diffèrent  selon les milieux. Ainsi, en milieu bamanan, le «foura » consacre la légitimité du mariage d’une jeune fille après les première, deuxième et troisième kolas. Autrement dit, le « foura tji » en milieu rural est ce que le « kognon » est pour les filles en milieu urbain. Dans le Bèlèdougou, lorsque la main de la fille qu’on cherche en mariage est autorisée après les premières démarches symboliques et après que  les trois kolas règlementaires aient été acceptées, la nouvelle mariée va effectuer chez son mari de brefs séjours qui peuvent être plus ou moins nombreux selon la disponibilité du couple. C’est après ces visites que le mari saura si sa femme conserve encore ou non sa virginité ? Si elle donc vierge, son mari payera alors le « ba diaga ». Alors, on annonce la virginité de la nouvelle mariée aux « foura tji la », entendez à la foule d’artistes, de spectateurs, de messagers et autres gens du mari qui  s’en vont tous au village de la fille pour célébrer le mariage par une cérémonie appelée « foura » dont les festivités durent à peu près trois jours. Ensuite, les parents du mari et de la mariée procèdent au déballage du trousseau de la mariée devant tout le monde avant de procéder aussitôt à l’emballage immédiat du même trousseaux pour conduire la nouvelle mariée chez son mari.

Trouée ou non, la pièce de 5 francs  retrouvée dans le trousseau de la mariée a un sens

Si le mari ’annonce à ses parents que sa femme n’était plus vierge au moment où  il l’a « connue », ces derniers prennent alors les   dispositions adéquates. Tant pis : ses parents mettront une pièce de monnaie de 5 FCFA trouée dans le trousseau de la nouvelle mariée. Par contre, si le mari dit qu’il a trouvé son épouse avec toute sa virginité, tant mieux : ses parents mettront une pièce non trouée dans les bagages de la mariée. C’est donc après déballage dudit trousseau qu’on saura si la mariée était vierge ou non.

Le « ba diaga »  est fait pour récompenser ou réparer le dommage

Si, pendant les visites avant  le « foura » de sa femme chez lui, le mari constate que cette dernière a perdu sa virginité, il en informe ses parents qui prennent des dispositions qui s’imposent. Dans ce cas, une pièce de 5 FCFA trouée sera placée dans le trousseau de la mariée. C’est cette dernière qui dévoilera  elle-même le nom  de celui qui l’a « déviergée », ou c’est le garçon à qui elle était confiée qui le  dira. Dans tous les as, on finira par le savoir. Et l’auteur de la forfaiture aura mangé du « fadén tô » (« tô de l’ennemi »). « Toucher » la femme d’un confrère ! Ce pervers deviendra du coup l’esclave du mari légal de nouvelle mariée. Et c’est plus tard que les effets déshonorants peuvent frapper en premier lieu la mère de la fille  et peut même entraîner le divorce de cette dernière par le père de la mariée. Alors, la honte et le déshonneur envahissent la famille, le clan, la tribu et toute la communauté de la nouvelle mariée. Malgré tout, ce mariage qui vient d’être scellé restera contre vents et marées car quoi qu’il advienne, « le bamanan ne donne pas pour reprendre, encore moins pour se débarrasser », dit-on. En revanche, et dans le meilleur des cas, si le mari constate que sa femme a conservé sa virginité, il l’annonce à ses parents. Dans ce cas précis, c’est une pièce non trouée de 5 FCA qui sera mis dans le trousseau de la nouvelle mariée. Au déballage et à l’emballage du trousseau devant, la pièce sera  retrouvée au fond des bagages de la mariée : ce qui honorera la mariée et justifiera sa fidélité et prouvera qu’elle a reçu une bonne éducation : ce qui va à l’honneur de ses parents. Quant au mari, il donnera  une chèvre (« ba diaga ») à ses beaux parents pour prouver son  sérieux et sa bonne conduite. Mais ce « ba diaga » n’est jamais à hauteur de souhait. Aussi, le mari doit « compléter ses cornes qui sont moins longues » par de l’argent, « arrondir ses oreilles qui sont déchirées » ou « la rendre encore plus grosse » tout cela avec de l’argent. C’est dire que la chevre en question est toujours incomplète. Dans un mariage en milieu bamanan du Bèlèdougou, rien n’est du ni n’est laissé au hasard : tout a un sens et un rôle.

Abdoulaye Faman Coulibaly

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