Le gang fait tout : dénicher la matière première, truquer le numéro du châssis, établir une vraie fausse carte grise.
En cas de problème (police, gendarmerie, etc.), le sous- officier Samaké intervient. Cela s’appelle un trafic d’influence.
Tout le monde ne peut pas se payer une «venant » de France. Encore moins commander une voiture neuve chez CFAO- Motors. Alors on se rabat sur les véhicules d’occasion. C’est ainsi que MMT, la cinquantaine bien frappée vient à Bamako après avoir parcouru plus de 120 km pour s’acheter une petite voiture d’occasion. Il s’adresse à des connaissances. Et de connaissance en connaissance, il trouve l’objet de ses désires. Une petite Peugeot immatriculée D- 4756 MD lui est cédée par Souleymane Samaké. Elle dispose d’une carte grise établie au nom de Mamadou Abdoulaye Koita, habitant à Boulkassoumbougou et comptable de son état. MMT fait confiance d’autant plus que le sergent- chef Ousmane Samaké, le grand frère du vendeur Souleymane Samaké (technicien de bâtiment habitant à Niaréla) est dans le coup.
C’est lui le grand frère qui aurait acheté la voiture pour la donner à Solo, le vendeur. Mais c’est l’autre jeune frère du sous- officier, Sory Samaké, chef du garage administratif à Darsalam, qui aurait exécuté l’achat de la voiture avec un inconnu.
Le villageois MMT ne se pose pas de question. La vue d’un porteur d’uniforme, qui s’est impliqué directement, a enlevé chez lui tout doute. La transaction a eu lieu le 14 avril 2012, sanctionnée par une attestation de vente signée notamment par un autre Samaké (Boubacar) comme témoin.
Les difficultés commencent
Les problèmes commencent pour MMT le 7 mai quand il se présente à l’ONT pour la mutation. Là- bas, les agents bondissent au plafond devant le faux. Le numéro du châssis est trafiqué et la carte grise est un vrai- faux. Ils décident de retenir la voiture, mais devant l’air assommé et affolé du vieux villageois qui les implore de le laisser aller récupérer son argent, ils le laissent partir avec cette carte grise, établie le 6- 2- 1996 et signée par le directeur national adjoint D. Bagayoko dit que le numéro précédent était G- 5641J25 (un numéro bizarre).
MMT se retourne contre le vendeur Solo, mais c’est son grand frère, le sous- officier, qui s’engage pour rembourser la somme due. C’est le début du calvaire pour MMT, car le sergent- chef n’arrête pas de le tourner en bourrique avec des fausses promesses en chapelet et non tenues. Il est d’autant plus perturbé que des sources bien informées lui affirment que s’il était pris avec cette voiture, c’était la prison directe.
La déception et la peur de la prison poussent MMT à venir à Bamako le 5 juin pour se plaindre au Camp 1. Le lendemain, le sous- officier vient au Camp 1et se met à faire le tour des bureaux et des bâtiments voisins. Mais son frère est entendu par les gendarmes. Ils décident qu’il doit rembourser la somme de l’achat et récupérer la voiture. Solo s’engage à tout rembourser le 5 juillet.
A cette date, ni lui ni son frère sous- officier de grand frère ne se présentent au Camp 1. Le lendemain, MMT attendra toute la journée au Camp 1 en vain. La veille, le grand frère avait pris le téléphone, mais ce vendredi 6 aucun des deux frères ne répondent aux coups de fils des gendarmes. Ces derniers demandent à MMT de revenir le lundi 9 juillet. Depuis, il vient et attend en vain toute la journée sans que ni un Samaké ni un autre ne daignent se présenter au Camp 1. On lui donne alors un autre rendez- vous.
‘’ C’est nous qui gardons Aya. Il n’est rien sans nous’’
En fait, le sergent- chef Ousmane Samaké serait à la tête d’un réseau de voleurs de voitures d’occasion. Des rabatteurs sillonnent la ville à la recherche de la matière première. Son frère, le mécanicien et chef de garage du garage administratif truquerait le numéro de châssis. Des émissaires sont envoyés aux correspondants dans l’administration pour établir les papiers.
Un service de vente liquide les véhicules prêts. Le sergent- chef intervient dans les bureaux au début de l’affaire et intervient à la police et à la gendarmerie en cas de problème. Même la justice ne lui fait pas peur.
Mais pourquoi est- ce que le sous- officier Ousmane Samaké est- il sûr de lui ?
D’abord sa tenue et son âge (il n’est plus tout à fait jeune et les jeunes gendarmes le ménagent pour ça), mais surtout aujourd’hui sa position dans l’appareil d’Etat. En effet, pour dire à MMT qu’il perdait son temps, il lui dit ceci : «
C’est nous qui assurons la sécurité de Aya (le capitaine Amadou Aya Sanogo). Sans nous, il n’est rien».
MMT avait eu des doutes sur cette affirmation au début, étant sûr que les gens mentaient. Mais depuis qu’on le fait venir pour rien à répétition, il commence à y croire.
La morale de cette histoire est que la place de ce genre de porteur d’uniforme est la prison et non aux côtés d’un des héros du Mali moderne. Alors si ce qu’il dit est vrai, alors Aya est averti.
A bon entendeur, salut.
Habib Ben O.