La France doit faire plus qu’une simple reconnaissance de l’État palestinien

La reconnaissance de la Palestine par la France est une mesure positive, mais elle restera lettre morte si elle n’est pas suivie d’actions concrètes contre l’occupation israélienne, notamment l’arrêt des ventes d’armes, l’imposition de sanctions et la poursuite des criminels de guerre.

12 Mai 2025 - 16:24
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La France doit faire plus qu’une simple reconnaissance de l’État palestinien

La décision de Paris de reconnaître la Palestine comme un État indépendant et souverain est un pas dans la bonne direction, mais il reste encore beaucoup à faire. La France suit ainsi la Slovénie, l’Espagne et l’Irlande, États membres de l’UE ayant déjà reconnu la Palestine, portant à 11 le nombre total de pays européens. Cette annonce, faite par le président Emmanuel Macron le 9 avril 2025, signale l’intention du gouvernement Renaissance de franchir le pas lors d’une conférence des Nations unies en juin, une décision qui a déjà suscité des réactions en Israël.

Pourtant, la question palestinienne ne se limite pas à la simple reconnaissance de l’État palestinien, comme doit le reconnaître l’État français. Il s’agit de mettre fin au génocide, d’imposer des sanctions à Israël, de suspendre les relations commerciales avec le régime d’apartheid, de cesser le financement des colonies, d’empêcher la vente d’armes au gouvernement Netanyahou et de faire pression sur Israël pour qu’il respecte les conditions préalables à la création d’un État palestinien souverain.

La France, en particulier, doit être consciente de ces réalités compte tenu de son histoire en tant que puissance coloniale, de sa répression des mouvements de résistance et de son héritage controversé en Afrique et au-delà.

La responsabilité morale de la France ancrée dans l’histoire
L’histoire de la France sur des continents tels que l’Afrique est marquée par la controverse. Elle est entachée d’une exploitation flagrante et de la répression étatique des mouvements de libération. Cela n’est nulle part plus évident que dans le pays nord-africain qu’est l’Algérie, où près de 500 000 officiers coloniaux français ont eu recours à des pratiques atroces contre les Algériens indigènes, notamment des exécutions sommaires et la torture, afin de soumettre le Front de libération nationale, un mouvement de résistance légitime qui cherchait à renverser le colonialisme français. La guerre d’Algérie, qui a duré huit ans, de 1954 à 1962, a fait 1,5 million de morts, dont une majorité d’Algériens. Malgré des décennies d’indépendance vis-à-vis de la France, cette guerre définit toujours la conscience nationale algérienne.

Le Cameroun n’a pas non plus été épargné par la brutalité et l’exploitation françaises. Comme les Algériens, les Camerounais ont cherché à se libérer du colonialisme français par la résistance, sous la forme de l’Union des peuples du Cameroun (UPC), subissant déportations, massacres et assassinats par les autorités françaises. Ce pays d’Afrique occidentale a également été victime de l’exploitation de son tissu social par la France, qui a mené une répression sanglante contre les insurgés, faisant des milliers de morts. Comme en Algérie, ces crimes odieux contre l’humanité ont laissé une empreinte indélébile dans l’histoire du Cameroun.

La France, en tant que puissance coloniale, a également pratiqué l’esclavage dans ses nombreuses colonies. Le commerce des esclaves a joué un rôle essentiel dans la croissance économique du pays et a été alimenté par l’extraction des matières premières et l’activité agricole intensive assurée par le travail forcé des esclaves. La Compagnie française des Indes occidentales, par exemple, détenait le monopole au Sénégal et était impliquée dans la production de tabac grâce à ses nombreuses plantations, exploitées par des esclaves originaires d’Afrique et des Caraïbes. Environ 13 000 esclaves africains ont été vendus aux Antilles françaises chaque année depuis 1778, une situation qui continue de peser sur les pays africains, dont beaucoup ont fait pression sur la France pour qu’elle verse des réparations pour ses anciens méfaits liés au colonialisme, à l’exploitation et à la répression.

Si la France a présenté ses excuses et s’est engagée à verser des réparations, nombre de ses activités actuelles aggravent la situation des populations de certains des pays les plus pauvres du monde. Le Niger, par exemple, possède l’un des plus grands gisements d’uranium au monde, mais la société française Orano est impliquée dans une controverse pour l’extraction de ses ressources, contribuant à la pollution de l’environnement et encourageant les externalités néfastes pour les populations autochtones. Les extractions d’Orano n’ont également pratiquement aucune incidence sur la population locale ou la croissance économique du Niger, ce qui constitue là encore un exemple de néocolonialisme en plein essor.

Le soutien de la France à la Palestine doit être sous-tendu par des actions concrètes
L’héritage historique de la France nécessite clairement des réparations adéquates et des actions en faveur des États qui souffrent du néocolonialisme. Cela inclut les territoires palestiniens, occupés depuis des décennies et qui continuent d’être bombardés par la machine génocidaire d’État d’Israël. La France a été témoin de ce chaos, et choisir de rester un spectateur silencieux n’aide en rien la cause palestinienne.

Au contraire, le gouvernement Macron doit suspendre toute vente d’armes au régime génocidaire, sous toutes ses formes. Un rappel des deux millions d’euros de composants électroniques et de systèmes de communication pour les drones israéliens, fournis par Paris entre 2018 et 2023. La France doit également renforcer la transparence et l’obligation de rendre compte de ses ventes d’armes à Israël, qui sont restées opaques et entourées de secret. Le rapport du ministère français de la Défense de 2024 révèle que les livraisons effectives et les licences autorisées par la France à Israël se sont élevées à 31 millions de dollars d’équipements militaires, soit le double du montant de 2022.

En outre, la France a accordé l’immunité à Netanyahou après que la Cour pénale internationale a émis des mandats d’arrêt contre lui. De nombreuses entreprises françaises continuent également de soutenir le «projet de colonisation génocidaire» malgré la condamnation par Paris en 2024 de la construction de 3 500 logements en Cisjordanie occupée.

Ces réalités exigent clairement un changement de cap de la part de la France, qui va bien au-delà de la reconnaissance de l’État palestinien. Une campagne soutenue de boycott, le respect des voix palestiniennes au niveau national et un rôle actif en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, en adoptant des résolutions contraignantes appelant à la fin du projet de colonisation israélien, à l’imposition de sanctions économiques et diplomatiques à Israël pour violation du droit international et au renvoi des affaires devant la Cour pénale internationale, restent les éléments clés permettant à la France de concrétiser la reconnaissance de l’État palestinien par des mesures concrètes.

À défaut, la France n’aura réagi que trop peu, et trop tard. Le meilleur scénario pour Paris consiste donc à concrétiser sa reconnaissance de l’État palestinien par des mesures concrètes et tangibles contre Israël.

Source: https://reseauinternational.net/

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