Rapport du Fonds Mondial sur le Mali (21 avril 2011) - 7 Signatures et cachets scannés pour de vrais - faux ordres de missions et factures

30 Juin 2011 - 00:00
30 Juin 2011 - 00:00
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Lorsque l’on sait scanner signatures, cachets et autres en-têtes, pour fabriquer de vrais – faux documents, même une chienne aurait des difficultés à y retrouver ses petits. L’OIG a décortiqué les disques durs des ordinateurs du staff du PLNT et la collecte de faux en tous genres fut riche. Même l’ex Ségal du ministère de la Santé n’a pas été épargné! En attendant mieux? Lisez plutôt la 7ème partie de notre traduction

Ces documents auraient dû être délivrés par les fournisseurs pour le programme en échange de paiements pour les biens et services fournis aux fins d'exécution de celui-ci. Au lieu de cela, les responsables du programme ont créé des factures par leurs propres moyens. Puisque ces documents ont été fabriqués par le personnel du programme, et non émis par des fournisseurs , il est hautement improbable que les biens et services énumérés dans ces factures aient jamais été effectivement fournis.
L’OIG a également constaté que les ordinateurs du PNLT et de la DAF renfermaient plus de 200 documents imitant des documents officiels du MoH (Ministère de la Santé) ou des DRS (Directions régionales de la Santé), y compris des ordres de mission. Les fichiers découverts par l’OIG incluent des images numérisées de signatures et de tampons officiels du MoH, qui ont été apposées sur des fichiers de traitement de texte Word pour leur donner l'apparence de documents émis par des officiels habilités à le faire. L’OIG a pu faire correspondre à ces documents des justificatifs de dépenses présentées par le programme, à l'appui de frais de déplacements présumés. Encore une fois, étant donné que ces documents étaient des faux, et qu’il n'y a aucune autre preuve que les voyages approuvés par ces documents aient jamais eu lieu, il existe une probabilité extrêmement grande qu'il n’aient pas existé.

Il faut noter que l’OIG a trouvé d’importants chevauchements entre les documents contenus dans les ordinateurs utilisés par deux responsables du PNLT, l'Individu C et l’Individu B. Ce fait permet raisonnablement de postuler qu’il y avait inférence entre ces deux fonctionnaires du PNLT, et que chacun était au courant des pratiques illégales de l’autre, qu’ils semblent d’ailleurs avoir coordonnées entre eux.

(i) Fausses pro forma, fausses factures et faux bons de livraison

73 noms de fournisseurs ont été retrouvés dans les fichiers des ordinateurs du comptable de la DAF, l’Individu A, du Coordinateur du PNLT, l’Individu B et du Directeur de la planification du PNLT, l’Individu C. Voici quelques exemples illustratifs qui montrent comment ces responsables ont fabriqué des documents au nom de ces supposés fournisseurs, aux fins de justifier des retraits de fonds du programme.

Fabou Gakou: Les fonctionnaires du PNLT Individu B et individu C ont fabriqué un grand nombre de documents, y compris des offres, des factures et des bons de livraison qui portaient le nom du vendeur "Fabou Gakou". Les documents suggèrent que Fabou Gakou vendait des sacs (cartables). L’OIG a trouvé 50 documents portant cet en-tête et créés à l’aide d’un logiciel de traitement de texte: les en-têtes ne comprennent pas de logos, ce qui aurait requis une numérisation de ceux-ci ou d’autres logiciels. L’OIG a aussi retrouvé deux de ces documents, identiques, dans des justificatifs de dépenses du programme.

Les Individus B et C ont aussi fabriqué des offres présumées de fournisseurs concurrents et l'OIG  en a conclu que ces celles-ci avaient été soumises afin de créer l'apparence que Fabou Gakou avait obtenu des contrats à l’issue d’un processus concurrentiel. Ces offres portaient les noms de Mamadou Katoga (18 fois) et Ousmane Dabo (4 fois).

Le Globe: De la même manière, l’Individu C et l’Individu B ont fabriqué des documents  au nom du vendeur Le Globe. L’OIG a identifié 44 documents attestant prétendument de l'achat de fournitures de bureau. Un témoin confidentiel a informé l’OIG que ce fournisseur n'avait jamais conclu de transactions avec le PNLT, confirmant que les factures relatives à ce fournisseur étaient fausses. Il semble que le vrai en-tête aurait dû comporter le logo circulaire de l'entreprise. Dans les documents produits, ce logo du fournisseur apparaît trop coupé, ce qui a entraîné  le rognage du bas du cercle.

Les Individus B et C ont aussi fabriqué des prétendues soumissions de fournisseurs concurrents et l'OIG a également constaté que ces données avaient été présentées pour donner l'apparence que les contrats octroyés à la société Le Globe l’avaient été après un processus d'approvisionnement concurrentiel. Par exemple, l’OIG a trouvé des offres prétendues portant les noms de La Flèche et de Aliou Traoré dans les documents justificatifs qui incluaient les factures Le Globe. Après avoir contacté ces fournisseurs, l’OIG a trouvé qu’elles étaient fausses. Aliou Traoré a informé l’OIG que son entreprise avait fermé en 2006, alors que les offres faites en son nom avaient été émises des années plus tard. Le vendeur La Flèche n’existait pas à l'adresse indiquée et la personne rencontrée à cette adresse de contact a confirmé qu'aucune entreprise n'avait jamais existé là.

Fondazione Salvatore Maugeri: Les Individus B et C ont aussi fabriqué des factures relatives à des entreprises situées à l'extérieur du Mali. Par exemple, l'ordinateur de l’Individu C contenait des documents prétendument liés à la Fondazione Salvatore Maugeri, une clinique de réadaptation italienne. Un représentant de la clinique a confirmé à l’OIG que les 48 factures censées représenter le coût d’un séjour de l’Individu C dans cet établissement, que le PNLT avait soumises pour justifier le retrait des fonds afférents, n'étaient pas authentiques.

L’OIG a également trouvé une série de fichiers qui, mis ensemble, montrent comment des documents fictifs ont également été créés pour justifier un séjour présumé de l’Individu B dans la même clinique italienne. Les documents récupérés à partir de l'ordinateur correspondent exactement aux documents présentés par le Programme à la DAF à l'appui de la dépense.

ATHS Sarl: L’Individu C fabriqué des factures, avec des prix gonflés de location de salle, au nom d’un hôtel nommé ATHS Sarl. L’OIG a trouvé des copies de ces factures dans l'ordinateur de l’Individu C et a été capable de retrouver des documents identiques parmi les justificatifs présentés pour justifier des paiements. Dans le cas de la facture 001156, on note un prix de chambre de 15 000 FCFA, alors qu’un un représentant d’ATHS Sarl a informé l’OIG que toutes les chambres de l'hôtel coûtaient  9500FCFA, les prix étant toujours les mêmes. L'inauthenticité des factures ATHS a été confirmée par le fait que l’OIG a retrouvé le cachet utilisé dans le document dans un lot de faux tampons de fournisseurs qui ont été utilisés par l'Individu C (nous y reviendrons plus en détails plus loin).

Société Nouvelle d'Assurance Vie: L’OIG a trouvé plusieurs factures portant le nom d'une agence d'assurances de voyage, la Société NouvelIe d'Assurance Vie, sur les ordinateurs du PNLT, qui correspondait à l'identique (sauf pour la police utilisée dans l’en-tête) aux factures présentées. Dans ce cas, toutefois, le chef d'agence et son assistant ont déclaré que les factures étaient légitimes, et l’individu F a fourni sa signature,  qui correspondait. Cela peut signifier soit que la facture était, en effet, légitime, soit que des membres du personnel de l'entreprise étaient au courant de la fraude et ont donné une fausse version des faits à l'OIG.

(ii) Ordres de mission

L'enquête a montré que des fonctionnaires du PNLT, les Individus C et B, ont été impliqués dans la fabrication de faux ordres de mission, autorisant des déplacements dans le pays ou des voyages internationaux, qui auraient dû provenir soit du ministère de la Santé soit de la DRS, pour justifier des dépenses du programme. Les documents récupérés à partir des ordinateurs de ces individus comprennent des scans d’ordres de mission complets, des scans d’ordres de mission sans corps de texte, des scans de signatures et de cachets seulement et des fichiers Word comportant seulement le corps du texte de l'ordre de mission. Le LFA a confirmé qu'il n'y avait aucune raison légitime pour que le PNLT dispose des versions informatiques non signées des ordres de mission du Ministère de la Santé.

Sur la base des documents découverts, il semble que les fonctionnaires du PNLT aient scanné des documents authentiques et qu’ils les aient, à l’aide de fichiers électroniques et par effacement du corps de texte originel, remplacés par un nouveau texte. Dans l’un de ces documents, la mention "P / Le Gouverneur P/O" apparaît coupée par le haut, comme si elle avait été recouverte par erreur ou effacée. Cela donne des indications sur la manière dont le document a été modifié.

L’OIG a également trouvé des images de pages vierges qui comprenaient seulement les signatures et les cachets d’officiels du Ministère de la Santé. Dans les faits, l’OIG a bien trouvé dans la documentation soumise pour justifier les retraits des documents qui portaient les images (scans) exactes de ces signatures et cachets. La plus répandue est celle de l’Individu E (l’ex Secrétaire général du ministère, NDLR).

A suivre…

Ramata DIAOURE

 

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