Décentralisation et gestion de la crise au nord : Les élus locaux montent au créneau

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Le Ministre de la fonction publique et de la reforme administrative « L’usage des armes ne donne aucun mandat aux groupes armés de parler au nom de qui que ce soit au nord.»

Le recouvrement de l’intégrité territoriale et la délivrance des populations des zones du nord interpellent les élus communaux qui veulent jouer leur partition. Aussi un forum de 3 jours portant sur la gestion de la crise au Mali par les collectivités territoriales a été organisé au CICB du 05 au 07 novembre dernier.

Présidant la cérémonie de clôture dudit forum, le Ministre de la fonction publique et de la reforme administrative a tapé du point sur la table « Les groupes armés doivent savoir que l’usage des armes ne donne aucun mandat de parler au nom de qui que ce soit. Les populations du nord de notre pays,  toutes ethnies confondues ne veulent ni la sécession, ni la charia. Et personne n’a le droit de les leur imposer par la force. S’il y a négociation c’est juste pour qu’ils comprennent cela, s’ils ne comprennent pas, on le leur fera comprendre par d’autres moyens ». A-t-il menacé.

Profitant de l’occasion, Mamadou Namory Keïta a pointé un doigt accusateur sur les régimes précédents  pour n’avoir pas réalisé que la décentralisation aurait dû être un facteur de paix, de cohésion et de renforcement de l’unité nationale : « Si la décentralisation avait été appliquée dans son intégralité comme prévu par les textes, si la bonne gouvernance a prévalu dans la gestion des affaires publiques, on n’aurait pas connu une crise avec une telle ampleur ».

La crise actuelle ramène à l’ordre du jour les grandes questions que le choix de la décentralisation devrait résoudre. Occasion pour Alhousseïny Abba,  maire sortant de la commune rurale d’Adarmalane, cercle de Goundam, de fustiger l’Etat : « Si le problème dure, c’est parce que l’Etat ne s’est jamais préoccupé de la source du problème. La solution n’est pas d’approcher certains groupes et oublier d’autres. La solution, c’est de comprendre que ces gens ne cherchent que l’indépendance. Et ça c’est même une insulte. J’accuse l’Etat. L’Etat est allé jusqu’à croire dans sa recherche de solution qu’en  les intégrant dans l’armée, il aura la paix. C’est en les intégrant à la douane que la paix sera conclue. Qu’en les introduisant au sommet de l’Etat,  qu’il aura la paix. Le problème que nous vivons aujourd’hui c’est l’Etat qui l’a négocié. Parce que depuis un certain temps, l’Etat n’est plus au nord. C’est les méharistes qui font la loi depuis dix ans. L’Etat s’est désengagé avec les accords d’Alger. Comment comprendre que l’Etat ose créer des cercles autour des puits où il n’y a personne ? C’est de la folie. Il faut revoir le découpage administratif, car si au niveau des régions c’est équitable, au niveau des cercles c’est de la pure folie. Si on veut aller à la recherche de solutions pour la paix, voilà des pistes de réflexion ».

Le forum visait ainsi à identifier les orientations politiques pour la relance de la reforme de la décentralisation. De ce fait, la décentralisation doit évoluer pour contribuer à améliorer la qualité de la démocratie et la bonne gouvernance, mais également de prévenir les conflits. Pour y arriver, les participants au forum des collectivités locales sur la gestion de la crise au Mali, ont recommandé  entre autres, d’insérer dans la constitution que «le  Mali est un état démocratique, décentralisé, d’aller immédiatement à la dévolution intégrale de la maitrise d’ouvrage du développent régional et local aux collectivités, de débarrasser l’état central des  contingences locales, en particulier la gestion des ressources humaines locales et donner aux  collectivités les moyens nécessaires humains, financiers et patrimoniaux.

Pour ce qui est du rôle spécifique des collectivités, le forum a recommandé que les collectivités  jouent un rôle prépondérant dans la gestion de la crise,  qu’elles participent aux actions de secours humanitaires, de sécurisation des populations et de leurs biens sur les sites de retour et d’organiser la réinstallation de l’administration publique et des services publics.

Ce qui a fait dire au ministre Mamadou Namory Keïta que « nous sommes dans une situation d’exception, une situation très difficile, une situation de crise, mais je crois que cela devrait nous motiver à prendre des décisions courageuses pour qu’enfin notre décentralisation joue pleinement son rôle. Son rôle pour le développement local, de la lutte contre la pauvreté, de la cause nationale, de renforcement de la paix et de l’unité nationale. »

Et pour les élus communaux et maires restés dans les zones occupées,  comme c’est le cas du maire de la ville de Tombouctou. A ces hommes et ces femmes qui, chaque jour, mettent leur vie en danger du seul fait de rester  auprès de leurs administrés. A ces hommes et ces femmes qui, chaque jour, font face aux violations incessantes de droits de l’homme. A ceux là, les héros du Mali démocratique, le ministre de la fonction publique et de la reforme administrative, leur dira avec fierté que « Ceux des élus qui ont vécu et vivent encore l’enfer quotidien des populations sous occupation des groupes armés et qui participent à leur résistance, méritent la reconnaissance de la nation »

Ange de VILLER, [email protected]

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