Grandes vacances : C’est aussi une période d’occupation
Ce temps de repos est accordé aux éléves pour qu’ils fassent le plein d’énergie. Mais certains parents préférent inscrire leurs enfants a des cours coraniques ou de rattrapage. D’autres occupent leurs progénitures avec des activités lucratives

La nécessité d’accorder un temps de repos aux apprenants est une exigence pédagogique à laquelle tous les établissements scolaires publics et privés sont unanimement contraints de respecter. Il est inutile de pérorer sur la pertinence de la question, parce que les pédagogues admettent l’évidence sans aucune difficulté. Mieux encore, ceux qui sont passés par les bancs de l’école ont pu jauger le bienfait des grandes vacances qui participent à l’équilibre de l’élève, parce qu’il faut aussi reposer l’esprit.
Certains pensent qu’il faut bien les grandes vacances où les enfants peuvent s’évader dans des activités ludiques et autres distractions pour qu’on ne leur vole pas leur enfance. Dans certains pays développés, on accorde un petit temps de repos à l’enfant chaque 2 mois et les écoles qui appliquent leur système observent la même pause à la période indiquée.
Dans notre pays, on accorde chaque 3 mois un petit congé aux élèves pour leur permettre de se reposer, parce que pédagogiquement on estime qu’au bout de ce temps d’apprentissage, l’élève est plus ou moins épuisé. Au Mali comme ailleurs, ces temps de repos coïncident avec les périodes de fêtes et sont souvent en fonction du climat. À titre d’illustration, le congé de Pacques est donné en période de chaleur. Les grandes vacances sont accordées pendant la saison des pluies et certains préfèrent occuper les élèves dans des travaux de socialisation.
DES COURS CORANIQUES- Nous sommes donc en période de grandes vacances. Il est un peu plus de 17 heures ce jour dans une mosquée de Baco-djicoroni Golf. Les voix enfantines s’élèvent en chœur, récitant les premières sourates du Coran. Assis par terre, une vingtaine d’enfants de la tranche d’âge de 5 à 12 ans, participe à un cours coranique de vacances mis en place par l’imam principal.
Certains viennent à cœur apprendre la lecture et la récitation des sourates du Saint Coran auprès des maîtres coraniques comme le petit Abba. Ce jeune garçon âgé de 7 ans connait déjà plus d’une vingtaine de sourates et fait prier ses petits cousins à la maison. Mais sa grande sœur Aicha, 8 ans, se plaint que les vacances sont faites pour le repos de l’esprit, autrement dit faire le plein d’énergie. «Malgré cela, elle n’est pas à la traine par rapport à son petit frère», explique leur mère, visiblement fière d’avoir inscrit ses enfants à un cours coranique et d’avoir sacrifié à une recommandation de la religion musulmane.
Aïssata Kiré, mère de cinq enfants réside à Ségou. La bonne dame envoie ses petits dans un des groupes improvisés à deux rues de son domicile pour apprendre les versets du Coran. «Je ne peux pas payer une colonie de vacances pour mes enfants. Ici, ils récitent le saint Livre, apprennent les bonnes manières, conformément aux préceptes de l’islam. En plus, ils restent en sécurité. Ce qui est rassurant pour la mère que je suis. Je peux donc vaquer sereinement à mes occupations. Cela me coûte une cotisation de 5.000 Fcfa le mois», explique Aïssata Kiré.
C’est la période des grandes vacances un peu partout au Mali. Djénné ne fait pas exception. Dans cette localité où les villes anciennes sont classées patrimoine mondiale du Fonds des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), mais aussi chargées d’histoire et de symboles, la lecture et la récitation du Saint Coran est dans l’ADN (en une expression simple, ce sont les caractéristiques essentielles de l’identité) des habitants parce que c’est une contrée profondément religieuse.
Dans les rues de Djénné, les récitations de Coran rythment les matinées. El Hadj Cissé, maître coranique, organise chaque année une session pour les enfants. «Beaucoup d'enfants viennent de Bamako pendant les vacances pour avancer dans leur apprentissage. Les parents y tiennent. C'est une façon de renforcer leur foi», affirme-t-il. Selon le maître coranique, ses efforts se heurtent parfois à la dure réalité, c’est-à-dire des difficultés liées à la précarité des infrastructures, la pléthore, des encadreurs non formés et souvent une chaleur torride. Cependant, il déplore que certains enfants passent plusieurs heures sous un soleil de plomb ou dans des espaces exigus. Parallèlement à ces groupes coraniques, d'autres initiatives se développent.
«VACANCES GASTRONOMIQUES»- Pendant les vacances scolaires, il y a aussi des personnes qui mènent des activités pédagogiques pour se faire un peu d’argent avant la rentrée scolaire. C’est le cas de Moussa Diall, élève de la 10è année dans un établissement secondaire de Bamako. «Nous avons constaté que beaucoup d’enfants traînent dans les rues pendant les vacances. Avec des camarades, on a monté ce groupe de rattrapage pour les occuper utilement. Les cours vont de la grammaire à la mathématique, selon la spécialité de tout un chacun», confie-t-il.
Le Centre de formation groupe gastronomique professionnel (GGP) organise, chaque année, les «Vacances gastronomiques», une activité qui se tient chaque année depuis quatre ans maintenant. La première vague a commencé le 7 juillet et se terminera le 22 août prochain. Elle regroupe 25 adolescents âgés de 10 à 17 ans qui ont payé 70.000 Fcfa chacun.
Pour le promoteur Souradje Moumouni, c’est une activité qui vise à offrir une formation culinaire enrichissante et encadrée par des chefs cuisiniers et pâtissiers passionnés. L’objectif est de permettre aux enfants et adolescents d’apprendre les bases de la restauration et d’être utiles à la maison. Moussa, étudiant en première année universitaire, raconte son parcours avec fierté : «Depuis que j'étais en 6è année, ma mère m'envoyait chaque été dans un atelier de couture à Torokorobougou pour que je ne traîne pas à la maison et prenne les mauvaises habitudes de mes voisins et amis. Elle ne veut pas que je devienne délinquant. Aujourd'hui, je sais coudre, et je gagne un peu d'argent en confectionnant des habits simples chez mon maître tailleur en plus d’aller à l’école», confesse le jeune universitaire.
Autre constat est que pendant les grandes vacances, beaucoup d’enfants exercent de petits métiers ou mènent des activités lucratives pour préparer la prochaine rentrée des classes. C’est pourquoi, ils sont actuellement dans les rues de Bamako pour faire le cirage, essuyer les pare-brises, vendre de l’eau glacée ou proposer des articles divers aux passants. Candidate malheureuse au DEF, Awa Traoré se rend tous les jours dans le centre-ville pour vendre de jouets pour enfants. «Je passe toute la journée au niveau de Railda ou de la Maison de l’artisanat à la recherche de clients. Souvent, je termine la journée avec 3.000 ou 4.000 Fcfa de bénéfices. Avec cet argent, je vais préparer la rentrée prochaine», dit-elle.
En plus de cirer les chaussures, Oumar Kanté qui passe en 8è année l’an prochain, vend aussi des gadgets sur la Rive gauche de la capitale. Son camarade Seydou Fané a préféré être apprenti mécanicien, un métier qu’il pourrait exercer au cas où les études ne vont pas marcher.
Anta CISSÉ
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