Ce mardi 8 novembre 2011, la présidente sortante du Libéria Ellen Johnson Sirleaf a été réélue sans surprise pour un second mandat à la tête de son pays. Sans rival, elle a remporté le second tour des élections avec un score sans appel de plus de 90% des suffrages. Taux de participation : 37% contre 72% au premier tour. Oui ! Elle a été réélue sans surprise. Son challenger Winston Tubman (neveu de l’ancien Président William Tubman et ex-ministre de la justice de l’ex-Président Samuel K. Doé) arrivé en 2ème position avec 32% des suffrages au 1er tour, ayant décidé, avec sept autres partis politiques, de boycotter le scrutin une semaine à l’avance.
Cette réélection, malgré des irrégularités constatées et dénoncées par l’opposition et la démission avant le second tour, du président de la Commission électorale indépendante (C.e.i) et son départ précipité avec toute sa famille aux Etats-Unis, a été bien accueillie par la communauté internationale. De la C.e.d.e.a.o. à l’U.A. en passant par l’U.E. et l’O.N.U. Le scrutin est qualifié de « juste, honnête et crédible ».
Mais cette légitimation du scrutin et de son vainqueur par les instances internationales est-elle bien vécue par les Libériens ? La septuagénaire, économiste émérite, ancien haut fonctionnaire des institutions de Breton Wood, n’est-elle pas simplement une élue de la communauté internationale qui l’a toujours soutenue politiquement et financièrement en faisant délibérément fi de son passé non glorieux pendant les décennies de la guerre civile libérienne ? Si nous nous en tenions aux recommandations de la Commission « Vérité et Réconciliation » découlant de son rapport 2009, ni la présidente sortante (désormais réélue), ni le candidat Prince Johnson (arrivé 3ème au scrutin présidentiel du 1er tour) n’auraient pu être candidats à la magistrature suprême dans leur pays, au moins pendant trois années. Mais pour des raisons délibérément personnelles, la présidente a écarté soigneusement la clause sur l’éligibilité, évoquant des problèmes de stabilité politique et économique dans son pays permettant à tous de briguer la présidence.
Voilà ce qui lui a permis d’être en lice et de bénéficier de toutes les largesses de la communauté internationale, avec à la clef l’octroi du prestigieux Prix Nobel de la Paix par l’Académie de Stockholm, à quelques jours du 1er tour.
Sinon, comment décerner à un candidat d’un pays fragile, très sensible (qui sort d’une longue guerre civile) dont la victoire au 1er tour a été dénoncée et non reconnue par son opposition, qui a trempé dans la violence aux côtés de plusieurs dirigeants de son pays comme Charles Taylor (accusé de crimes de guerre et aujourd’hui arrêté et jugé à la Haye par la C.P.I) dont elle a été un des bailleurs de fonds à un moment donné. Mieux, Mme Johnson se trouvait être soutenue par le 3ème, Prince Johnson, ancien chef de guerre, aux mains ensanglantées, meurtrier et assassin avéré de l’ancien Président S. K. Doé qui ne cache d’ailleurs pas les raisons de son soutien pour lui avoir, jusque-là, permis d’être libre et conserver ses droits civiques.
Une chose est sûre, c’est que la présidente Sirleaf Johnson hérite d’un second mandat aux destinées d’un pays très déchiré qui a besoin de liberté, de justice et de paix, sans parler de réconciliation nationale. Elle aura besoin de tous les Libériens, sans exclusive, pour reconstruire le pays.
Par Gaoussou M. Traoré