Lorsque le 22 mars 2012 un groupe de militaires maliens emmenés par quelques officiers fait brutalement irruption dans le palais présidentiel de Koulouba, sur les hauteurs de Bamako, vidé de son occupant, Amadou Toumani Touré, exfiltré au dernier moment par sa garde rapprochée, la stupéfaction est totale en Afrique comme ailleurs dans le monde. Jusque-là, en effet, et notamment depuis la révolution du 26 mars 1991 suivie d’une transition sans accroc et d’une élection présidentielle considérée unanimement comme transparente, le Mali était systématiquement cité en exemple d’une démocratie en construction, et ce malgré les étapes ultérieures d’une vie politique agitée.

En renouant avec ses vieux démons, le Mali a étalé dans un contexte régional très tendu les nombreuses failles de son système politique. Le coup d’État du 22 mars 2012, avec en figure de proue le capitaine Amadou Sanogo, a été le révélateur d’une grave crise politique et institutionnelle dans laquelle le Mali était plongé depuis quelques années, et qui est venue amplifier l’impasse de la lutte contre le terrorisme à ses frontières.
À quelques semaines de l’élection présidentielle, à laquelle le chef de l’État sortant ne pouvait concourir, selon la Constitution de 1992, le pays était purement et simplement entré dans un état de léthargie multiforme, où la psychose d’un coup d’État était omniprésente. Sur fond de crise institutionnelle présentant tous les traits d’une vacance de l’exécutif, les leviers du pouvoir politique et surtout militaire paraissaient avoir échappé à ceux qui en avaient la responsabilité au sein de l’appareil d’État et en particulier au président Amadou Toumani Touré (dit ATT).
C’est dans ce climat politique déjà lourd – entretenu par de multiples rumeurs persistantes sur les intentions réelles du chef de l’État sortant, voire ses velléités d’accomplir un troisième mandat, comme sur les chances de victoire électorale des chefs de partis « présidentiables » – que s’inscrit la déroute de l’armée malienne face à la résurgence de la rébellion touarègue dans le nord du pays. Les images des rebelles du Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla), d’Ansar Dine (une dissidence du mouvement touareg désormais alignée sur les positions islamistes) et d’Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), paradant dans les villes de Tombouctou, de Gao et de Kidal ont provoqué un véritable cataclysme dans le pays. Elles ont été surtout vécues par l’écrasante majorité des Maliens comme une humiliation dont la responsabilité était principalement attribuée à la classe politique et au pouvoir en place.
C’est sur ce terreau d’impopularité d’Amadou Toumani Touré et de fortes critiques sur son incapacité à faire face aux multiples adversités, notamment militaires, que le coup d’État du 22 mars 2012 a prospéré. Affichant leur inaptitude à s’organiser, à gagner à leur cause le soutien d’une population désemparée, encore moins à définir une véritable stratégie tant sur le plan interne que régional, ses auteurs se sont contentés dans un premier temps d’exploiter le ressentiment des Maliens à l’égard des « politiques ». Il est vrai que l’événement en soi marquait la rupture avec le discours officiel qui avait cours depuis une vingtaine d’années et qui consistait à vanter les vertus républicaines de l’armée malienne, présentée comme le socle de la démocratie.
Les hésitations et les erreurs successives de la junte militaire au pouvoir aggravées par les tergiversations et les ingérences outrancières du médiateur autoproclamé de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), en l’occurrence le président burkinabè Blaise Compaoré, ont provoqué une confusion guère propice à une rapide sortie de crise. D’autant que les rebellions dans le Nord radicalisaient leur discours et étendaient leur emprise à la fois militaire et politique sur une partie de plus en plus importante du territoire national.
1. Le coup d’État militaire : un acte prévisible mais précipité
Les racines du coup de force du groupe de militaires, parti du camp de Kati, mené par le capitaine Sanogo se sont incontestablement nourries de la dégradation de la situation générale dans le pays à quelques mois de l’échéance présidentielle d’avril 2012. Durant cette période critique, la lecture de la presse malienne est à cet égard édifiante. À côté des commentaires sur le retard pris dans les préparations du processus électoral ou encore sur les chances des futurs candidats, déjà connus ou à venir, les organes de presse étaient surtout focalisés sur les conséquences que pouvaient avoir les revers et l’humiliation subis par l’armée malienne sur le calendrier électoral. Les massacres commis par les rebelles le 24 janvier 2012 à Aguelhok – où une centaine de militaires maliens ont été purement et simplement exécutés – ont provoqué un véritable électrochoc qui a fait prendre la mesure des dangers que courait la nation malienne.
Dans ce contexte où les signes d’un effondrement de l’État étaient de plus en plus palpables, la presse malienne a commencé à exprimer des doutes sur la tenue du scrutin présidentiel et, partant, à évoquer différents scénarios allant du report de l’élection à l’éventuelle prolongation du mandat du président sortant, voire à l’instauration d’un régime de transition à propos duquel le nom du président de l’Assemblée nationale, Dioncounda Traoré, était fréquemment cité pour le diriger .
Mais, au-delà des supputations des éditorialistes sur l’avenir de plus en plus incertain du pays, les rumeurs de coup d’État se faisaient de plus en plus insistantes. Ses prétendus commanditaires étaient aussi nombreux qu’inconnus. Parmi eux étaient citées diverses officines nationales et étrangères, dont certaines auraient été actionnées par l’ancienne puissance coloniale – les tensions existant entre le président français de l’époque, Nicolas Sarkozy, et son homologue malien, Amadou Toumani Touré, étant de notoriété publique.
Dans un tel climat de tensions intérieures, les rivalités se sont exacerbées entre les chefs des principaux partis politiques, de même que se ravivaient les frustrations et les trahisons des scrutins de 2002 et 2007. Cette polarisation de la vie politique renvoyait tout particulièrement aux séquelles de la scission intervenue au sein de la principale formation politique du pays, l’Adéma-PASJ, qui avait conduit son président d’alors, Ibrahim Boubacar Keita (IBK) à créer son propre parti, le Rassemblement du peuple malien (RPM) en juin 2000. Depuis lors, la rivalité entre l’ancien président, Alpha Oumar Konaré, élu en 1992, et son ancien Premier ministre, à partir de 1994, Ibrahim Boubacar Keita, a marqué la vie politique des dix dernières années.
C’est dans cette atmosphère délétère, amplifiée par les accusations de corruption visant l’entourage immédiat d’Amadou Toumani Touré et l’impuissance de la hiérarchie militaire face à l’avancée des rebelles dans le nord du pays que le coup d’État du capitaine Sanogo est intervenu. Davantage résignée que favorable à l’irruption de la junte militaire sur la scène politique, la population malienne a dans sa grande majorité affiché un détachement par rapport aux diverses manœuvres qui ont entaché ensuite les rapports entre les militaires putschistes et le pouvoir qualifié tantôt d’intérimaire, tantôt de transition. Ce qui s’apparente bien à des tribulations se sont déroulées sous le regard bienveillant d’une médiation ouest-africaine qui est passée allègrement du ton de la menace de sanctions, militaires notamment, et d’embargo économique, à celui des compromis dans lesquels certains acteurs internes – civils et militaires – et régionaux ont rapidement trouvé leur compte .
2. L’impéritie de la médiation ouest-africaine
Depuis le coup d’État du 22 mai 2012, les décisions qui ont été prises sous l’égide de la Cedeao, au niveau des chefs d’État et de gouvernement, et mises en œuvre par le médiateur, Blaise Compaoré, se sont distinguées par leur caractère le plus souvent improvisé, et parfois contradictoire par rapport au but recherché : la restauration a minima de l’ordre constitutionnel et, à ce titre, le respect de la Constitution en matière de vacance du pouvoir.
Ainsi, l’accord-cadre du 6 avril 2012 signé entre le médiateur et le Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l'État (Cnrdre), une émanation de la junte militaire, a décidé du retrait de la junte du pouvoir. Fixant les modalités de l’intérim de la présidence de la République prévue par la Constitution, il est apparu en totale contradiction avec les initiatives prises par le sommet extraordinaire de la Cedeao réunie à Abidjan le 26 avril 2012 et qui ont été mises en application les 19 et 20 mai 2012 à Bamako. Celles-ci ont étendu, sans aucun fondement juridique et sans un quelconque pouvoir pour le faire, à douze mois le mandat des organes de transition, et ont surtout prévu d’accorder au chef des putschistes, le capitaine Sanogo, les avantages réservés aux anciens chefs d’État – décision qui a été finalement rapportée ultérieurement.
C’est du même registre que relèvent le choix comme Premier ministre de la transition de Cheick Modibo Diarra tout comme la nomination à des postes clés de son gouvernement de personnalités appartenant au premier cercle de Blaise Compaoré – et surtout inconnues des Maliens –, ou encore la présence dans le gouvernement remanié, et à la tête de départements ministériels sensibles, d’officiers proches de la junte.
Toutes ces ingérences et improvisations qui ont jalonné la médiation ouest-africaine ont jeté le discrédit sur les institutions de la transition, ce qui n’est pas sans conséquences négatives sur l’image des personnalités maliennes les incarnant. À l’évidence, la médiation ouest-africaine, incarnée par le président burkinabè, est également traversée par les contradictions et divergences entre les chefs d’État des quinze pays membres de la Cedeao. Parmi ces derniers, certains se sont ouvertement plaints de la conduite très personnelle de la médiation, dont les principales initiatives et orientations ont porté l’empreinte du président du Burkina Faso, en quête permanente de leadership dans la région.
Mais à y regarder de plus près, les initiatives de la Cedeao reflètent tout autant les partis pris politiques ou les ingérences de certains acteurs régionaux, que l’absence de moyens d’action dévolus à l’organisation régionale sur le plan politique et surtout militaire, dès lors que ses actions ne sont pas relayées et confortées tant par l’Union africaine que par les Nations Unies. Or, au-delà des pétitions de principe et des déclarations solennelles, l’Union africaine et l’Onu semblent bel et bien avoir réduit leur implication dans la crise au Mali à la seule dimension sécuritaire, tout particulièrement à l’occupation du nord du pays par les rebelles touaregs et Aqmi vue sous l’angle de la lutte contre le terrorisme.
La Cedeao, en pointe dans les premiers jours qui ont suivi le coup d’État du 22 mars, pour menacer d’une intervention militaire la junte au pouvoir, en concertation avec l’Union africaine et l’Onu, ou pour bouter hors du territoire national, et par l’usage de la force, les rebelles du Nord, semble depuis s’être repliée sur un discours plus conciliant et surtout à portée presque exclusivement interne. La prudence de l’organisation ouest-africaine est sans doute dictée par les difficultés logistiques qu’elle aurait à déployer une force militaire, ne fût-ce que pour «sécuriser», selon l’expression consacrée, les autorités de la transition. Mais cet attentisme est également dicté par la multiplicité des enjeux dans le Sahel, et les différences d’approche et de stratégie des pays de la région, et notamment de l’Algérie.
3. Les difficultés de sortie de crise
Les structures mises en place depuis le coup d’État du 22 mars 2012 ont été caractérisées par un degré de confusion juridique et politique, en raison des rôles successifs, souvent contradictoires, confiés à la junte militaire dans les différents échafaudages institutionnels concoctés par le médiateur de la Cedeao. Dans un premier temps, et dans le souci affiché de revenir rapidement à la « normalité constitutionnelle » prévue par la loi fondamentale du 25 février 1992, un accord-cadre a été signé le 6 avril 2012, au nom du médiateur de la CEDEAO, Blaise Compaoré, par son ministre des Affaires étrangères, Djibrill Bassolé, et par le président du Cnrdre, le capitaine Amadou Sanogo.
Cet accord semblait se conformer aux dispositions de l’article 36 de la Constitution malienne qui prévoit qu’en cas de vacance de la présidence de la République, pour quelque cause que ce soit ou d’empêchement absolu ou définitif constaté par la Cour constitutionnelle saisie par le président de l’Assemblée nationale et le Premier ministre, les fonctions du président de la République sont exercées par le président de l’Assemblée nationale.
C’est sur cette base juridique que le chef de la junte militaire s’est retiré pour laisser place au président de l’Assemblée nationale, investi comme Président par intérim pour une période n’excédant pas quarante jours. Cette concession du capitaine Sanogo faisait suite, il est vrai, à des pressions très fortes exercées juste après le putsch, allant jusqu’à une menace d’intervention militaire des pays membres de la Cedeao.
Mais très vite, cette esquisse de retour à la norme constitutionnelle a été brutalement interrompue. En effet, à peine entré en fonctions, le Président par intérim a pris des décisions à forte portée politique, non autorisées par la Constitution. Il a notamment révoqué, le 17 avril 2012, le gouvernement en place au moment du coup d’État et nommé le nouveau Premier ministre, le même jour, puis quelques jours plus tard les membres du gouvernement. Le même Président, devenu entre-temps Président de transition par la volonté unilatérale du médiateur de la Cedeao, s’est vu imposer la reconduction de Cheikh Modibo Diarra comme Premier ministre le 20 août 2012.
En fait, tout le schéma institutionnel dit de la transition a été bâti à la hâte et en dehors de toute référence au droit constitutionnel malien. Il a obéi à des considérations politiques imposées par la médiation et illustrées par la prééminence d’un Premier ministre doté des pleins pouvoirs. C’est sur un mode identique à celui qui a prévalu pour l’attelage de l’exécutif qu’a été organisée la transition avec des organes dont le mandat a été étendu à douze mois, à savoir un Président désormais de transition, un Premier ministre agissant en toute autonomie et dont les attributions sont très importantes, et surtout une junte militaire dont le statut n’est pas déterminé, mais qui constitue de fait le pôle de pouvoir le plus important. Les trois lieux de pouvoir se neutralisent ainsi et dénotent surtout un imbroglio institutionnel.
Autant dire que les mécanismes de la transition ont ainsi semblé moins voués à réunir les conditions d’une restauration de l’ordre constitutionnel qu’à préparer les futurs agendas politiques de ceux qui sont à leur tête et, à cet effet, de nouer d’ores et déjà des alliances avec certaines forces politiques, militaires et religieuses, en vue des prochaines échéances.
4. Restaurer l’intégrité territoriale : un défi
Élément déclencheur, voire amplificateur, du coup d’État du 22 mars, au même titre, sinon plus, que le délitement des structures étatiques illustré par le départ précipité en exil du président démissionnaire Amadou Toumani Touré, l’occupation par les rebelles et les groupes terroristes des trois régions du nord du Mali, couvrant près de 800 000 km², marque une étape inédite dans l’histoire du Mali depuis son indépendance en 1960. Lorsque, le 17 janvier 2012, le Mnla mené par Mohamed Ag Najim, qui servit comme colonel dans l’armée de Kadhafi, annonce avoir fait subir de lourdes pertes à l’armée malienne dans son avancée vers les grandes villes du Nord, personne n’imaginait les conséquences que cet événement allait avoir sur l’avenir du Mali, et sur la situation de l’ensemble du Sahel.
Le déchaînement de violence aveugle qui a accompagné l’entrée en guerre de la rébellion touarègue, désormais soutenue ouvertement par des groupes terroristes comme Ansar Dine, dirigé par un vétéran de la mouvance touarègue, Aqmi, ou le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), a été jalonnée de tueries, comme celle commise à Aguelhok le 24 janvier 2012. Au fil des jours et des semaines, la rébellion, sur laquelle le Mnla n’exerçait plus la même emprise, a pris le contrôle des principales villes de la région, Kidal, Tombouctou, Gao et récemment, plus au sud, Douentza, et s’est livrée à des scènes de destruction des principaux sites historiques
La terreur instaurée par tous les groupes qui se revendiquent officiellement de la mouvance touarègue a ainsi ouvert une nouvelle page de l’histoire pourtant périodiquement agitée de ce mouvement qui, pendant longtemps et jusqu’aux années 1990, posait ses revendications en termes d’intégration nationale et de participation à l’exercice du pouvoir. C’est précisément de cet esprit que procédaient les accords signés en 1991 et 1994 qui, outre la reconnaissance d’un statut particulier des régions du Nord et l’octroi de crédits accrus pour leur développement, prévoyaient l’insertion des combattants dans l’armée nationale, la police et l’administration.
Les événements qui se sont succédé depuis ce 17 janvier ont été marqués par l’occupation militaire du Nord par des groupes armés coalisées et la proclamation, le 4 avril 2012, de l’indépendance de la « République laïque de l’Azawad ». La nouvelle équation politico-militaire régnant dans le nord du pays rend désormais plus complexe le règlement de la crise institutionnelle et politique malienne. Mais, dans le même temps, la confusion qui prévaut dans la mise en place et le fonctionnement des institutions de la transition rend tout aussi difficile la définition d’une stratégie aussi bien politique que militaire de reconquête du nord du pays. En témoignent les atermoiements de la Cedeao qui, dès les premières heures du coup d’État du 22 mars, a fermement condamné leurs auteurs, tout comme elle a fermement manifesté son opposition à toute partition de fait du nord du Mali, allant jusqu’à menacer d’intervenir militairement pour rétablir l’intégrité territoriale du pays.
Mais, de session extraordinaire en session extraordinaire et d’ultimatum en ultimatum, l’organisation régionale n’a jamais franchi le pas ni usé d’un quelconque moyen de coercition pourtant prévu par ses textes. L’Union africaine, l’Onu, mais aussi les grands pays se sont bornés à des velléités d’intervention militaire contre les groupes armés qui occupent le nord du Mali et se livrent à des violences contre les populations civiles. L’Union européenne, la France et d’autres États européens s’en sont aussi tenus à exprimer leurs préoccupations et à évoquer la possibilité d’une action internationale dès lors qu’elle serait demandée par les autorités maliennes, à travers la Cedeao. C’est précisément à cette condition que répond la demande solennelle adressée par le Président de la transition, Dioncounda Traoré, au président en exercice de l’organisation ouest-africaine. Dans une lettre du 1er septembre 2012, le Président de la transition a énuméré les domaines – sécurisation des institutions de la transition, réorganisation des forces armées et de sécurité et restauration de l’intégrité territoriale du Mali – dans lesquels «l’aide la Cedeao pourrait se matérialiser».
Au-delà de sa formulation, où transparaissent les réticences des militaires au pouvoir à Bamako à une intervention extérieure, la demande d’aide semble surtout être destinée à servir de base juridique et politique à une éventuelle action militaire au Mali, sous l’égide de l’Onu. Celle-ci devrait être débattue en marge de la session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies. Le 26 septembre 2012 s’est tenue à New York, à l’initiative principalement de la diplomatie française, une conférence réunissant plusieurs dizaines de chefs d’État d’Afrique et du reste du monde. Cette réunion à laquelle ont notamment participé, autour du Secrétaire général, Ban Ki Moon les représentants de plus d’une quarantaine d’États, dont le chef de l’État français, François Hollande, la secrétaire d’État américaine, Hillary Clinton et le Premier ministre malien Cheikh Modibo Diarra, n’a débouché sur aucune décision concrète.
Si le principe d’une saisine du Conseil de Sécurité de l’Onu a été évoqué, dans le prolongement de la demande formelle d’intervention militaire adressée par les autorités de Bamako à la Cedeao, en revanche, aucun calendrier n’a été avancé quant à une éventuelle adoption d’une résolution autorisant le recours à la force pour permettre au Mali de recouvrer son intégrité territoriale.
Il va sans dire que la reconquête du Nord, sans laquelle l’unité nationale du Mali volerait en éclats, suppose aussi, et on l’oublie souvent face aux urgences auxquelles est confronté un peuple meurtri par les épreuves subies tout au long des derniers mois, un consensus national autour des objectifs prioritaires. Parmi eux, il y a la reconstruction de l’État et la définition d’un nouveau contrat politique et social qui servirait de socle à un nouveau système politique tranchant avec les expériences démocratiques en trompe-l’œil qui ont eu cours jusque-là. Or, les institutions de la transition mises en place de façon chaotique depuis le coup d’État n’ont ni la capacité ni surtout la légitimité politique pour le faire.
Albert Bourgi professeur de droit public à l’université de Reims.