Révolution populaire de mars 1991 : Des acteurs du mouvement démocratique s’expriment.

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25 ans après la tragédie du 22 mars 1991, où  les militaires du Président   général ont tiré à balles réelles sur la foule, faisant des dizaines de morts, des acteurs du mouvement démocratiques, s’expriment. Nous les avons rencontrés à la célébration du vendredi noir.

Djiguiba Keïta, PPR : Secrétaire général du PARENA.

« Les idéaux de mars 1991 sont les plus nobles de relèvement de notre peuple et de notre pays ».

 « C’est d’abord un sentiment de reconnaissance envers ceux qui se sont battus pour ce pays. Une pensée pieuse pour la mémoire de ceux qui sont tombés. C’est d’exprimer notre engagement ferme pour dire que la cause pour laquelle ces martyrs sont tombés, ne sera jamais abandonnée, en tout cas par nous membres du mouvement démocratique. La jeunesse peut retenir que les aînés se sont battus pour qu’elle s’épanouisse et qu’elle ait les droits et les moyens de se battre pour consolider cette démocratie. Mais, il s’agit aussi pour eux de se battre pour contrôler les ainés qui ont fait la révolution et qui peuvent souvent tomber. Il faut que la jeunesse relève ceux qui vont tomber. Pour relever les défis  futurs, il faut d’abord rester fidèle aux idéaux de mars 1991. Ces idéaux sont les plus nobles de relèvement notre peuple et de notre pays. Il faut s’y accrocher  et enlever de notre chemin tous ceux qui vont trahir ces idéaux. »

El Hadj Seydou Patrice Dembélé, Secrétaire général Adjoint de l’AMS-UNEEM

 « Retrouvons nous pour reconstruire le Mali ».

« Nos sentiments, c’est toujours la tristesse, l’inquiétude,  quand nous voyons un peu l’insouciance des dirigeants face à la tragédie qui s’est passée ; et que même ce bourreau a été un moment plébiscité et déclaré grand républicain. Avec tous ce qui se passe, nous pensons que c’est une certaine insulte du mouvement démocratique que nous sommes. Notre action s’inscrit toujours dans la continuité de la lutte pour un Mali prospère, fort et où il  fait bon vivre. Hier encore, il y a eu un attentat à l’hôtel Nord-Sud. C’est déplorable. Mais en réalité, qu’est- ce qu’on peut faire ? Aujourd’hui, la marche comme les autres années, c’est le symbole des souvenirs noirs de ce qui s’est passé avant la chute de Moussa Traoré. Je crois  que le déclic de la chute de Moussa Traoré est venue le vendredi noir ou personnellement j’étais ici parmi des centaines de cadavres. Je suis acteur, je ne suis spectateur. J’ai vécu cela le 22 mars 1991. À l’époque, j’étais dans le mouvement démocratique et j’avais des neveux, des nièces et des enfants dans le mouvement estudiantin. Ce sont eux qui ont été les vraies victimes des balles de Moussa Traoré. Vingt-cinq ans après cet évènement, nous pensons qu’il faille que tous les acteurs du mouvement démocratique se retrouvent, qu’on taise nos égos et que nous voyons le positif de chacun et laisser le négatif pour qu’ensemble on fasse une vraie refondation du mouvement démocratique. Retrouvons nous pour reconstruire le Mali. J’ai pitié pour la jeunesse. De mon point de vue, la jeunesse est en train de prendre pour repère l’argent. Ce qui est tout fait très dangereux. Les convictions et idéaux que nous avions, pour nous battre ne sont plus. Hier quand on disait assemblée générale, c’était d’abord pendant la récréation, jamais pendant les heures de cours. Quand on disait assemblée générale à Badala, on allait à pied, personne ne demandait de l’argent pour quoi que ce soit. Aujourd’hui, quand on demande aux jeunes d’aller à une assemblée générale  ou autre activité, toute de suite, on te demande des perdièmes. L’argent a pris le dessus sur la conviction et l’idéologie. »

Prof Tiémoko Sangaré, Président de l’ADEMA-PASJ

« La jeunesse doit s’imprégner de ce qui s’est passé pour assurer la relève ».

 « C’est à la fois des sentiments de fierté et de tristesse, parce que ce carré a été initié avec les corps des 29 jeunes qui sont tombés sous les balles du régime de l’UDPM le 22 mars 1991. Aujourd’hui, en commémorant le 25ème anniversaire de cet évènement, j’ai une pensée pieuse pour ces jeunes gens qui étaient dans la rue avec nous. Avec le rôle que je jouais en ce moment, je peux dire que ces jeunes étaient plus proches de moi que de la plupart des responsables. J’organisais les manifestations, je m’occupais des questions de sécurité. Je sais dans quelle condition les choses se sont passées à l’époque. 25 ans après, nous constatons qu’une bonne partie de ce pour lequel nous nous sommes battus a été réalisé. Parce que, aujourd’hui, la liberté sur toutes ses formes que nous revendiquions est devenue le quotidien de tous les citoyens au point que certains peuvent aujourd’hui dire que  ça été toujours comme ça, alors que ça  n’a pas été toujours comme ça. Il est  évident aussi qu’il reste beaucoup à faire. J’ai bon espoir qu’à travers des commémorations de ce genre, la nouvelle génération s’imprégnera de ce qui s’est passé, de ce qui a été réalisé, pour comprendre la portée du devoir qui est le sein, c’est-à-dire de continuer ce qui a commencé, et éventuellement de corriger les erreurs et les fautes qui ont pu être commises. Je voudrai profiter de cette commémoration pour lancer un appel à la jeunesse du Mali, afin qu’elle puisse prendre conscience des défis à relever pour assurer la relève. »

Pr Ali Nouhoum Diallo, Président de la coordination Malienne des organisations du Mouvement Démocratique.

 « Le vendredi noir ne sera jamais oublié ».

  « Honnêtement, je ne voulais pas parler parce que mes cadets sont là. Nous sommes ici aujourd’hui pour dire que ceux qui sont morts ici, et qui se reposent ici depuis les 22, 23, 24,25 et 26  mars 1991, ne seront jamais oubliés tant que nous sommes vivants. Il y avait un coup d’Etat qui avait été consommé le 21 mars 2012, mais ils ont attendu le 22 mars pour tenter faire oublier le vendredi noir du 22 mars 1991. Et bien le vendredi noir ne sera jamais oublié. Ceux qui se  dépêchent pour dire que le mouvement démocratique est mort, perdent leur temps. Le mouvement démocratique ne mourra jamais, parce que la capacité des maliens à servir et même à s’insurger est immortel. »

Mme Sy Kadiatou Sow,  Présidente de l’ADEMA-Association

 « Je demande aux jeunes d’accomplir leur devoir de génération »

 « A l’époque de la révolution de mars   1991, on s’est mobilisé, on s’est battu. Les jeunes étaient très nombreux à participer au combat. On a obtenu ce qu’on voulait, c’est-à-dire la liberté, la démocratie. Chaque génération a son devoir à accomplir. C’est pourquoi, je demande aux jeunes d’accomplir leur devoir de génération. Ils ne doivent pas oublier d’où ils viennent. Ils doivent surtout regarder vers l’avenir en se battant et en se disant qu’ils peuvent changer les choses. Là où il faut changer, qu’ils se mobilisent pour assurer ce changement. Là où il faut consolider, qu’ils se donnent la main, qu’ils s’organisent pour le faire. »

Propos recueillis par Jean Goïta

 

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