Samuel Sidibé : un rempart contre le bradage du patrimoine culturel national

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A la tête du Musée National depuis 1987, Samuel Sidibé est aujourd’hui l’homme incontournable dans la sauvegarde du patrimoine culturel malien. Ce muséologue, directeur du Musée National, voulait devenir juriste ou journaliste.

«Si vous rêvez de téter les seins de la reine d’Angleterre et que vous vous retrouvez avec les seins desséchés de votre grand-mère, il ne faut pas s’en priver, peut-être qu’au finish vous les trouverez plus intéressants que vous ne l’imaginiez ». Son parcours, Samuel Sidibé ne l’a pas choisi. Il utilise cette phrase pour l’illustrer.

Père de deux filles, Samuel Sidibé est né en 1952 à Somasso village situé à 25 km de San. Il poursuit sa scolarité à l’école primaire protestante de Yorosso chez sa sœur ainée, enseignante. Après le Diplôme d’Etude Fondamentale, il entre au Lycée Badala en 1968, année du putsch contre Modibo Keita, dans l’intention de faire une filière scientifique. Contre son gré, il est recommandé en Philosophie-Langues.

En 1971, son bac en poche, il se fixe pour objectif de faire des études de droit ou de journalisme. Mais un communiqué de la Radio nationale annonce son départ en France pour des études  en muséologie. N’ayant pas pu accéder à l’Ecole du Louvre, à Clermont-Ferrand, Samuel Sidibé décroche une maitrise en Histoire de l’Art avant de présenter une thèse à Paris I Sorbonne sur l’archéologie funéraire de l’Afrique de l’Ouest, nous sommes en 1980. Rentré au pays, l’archéologue est recruté à l’Institut des Sciences Humaines pour diriger des fouilles avant d’être appelé au poste de directeur du Musée National.

Des moments difficiles

Le regard figé, la voie à demi-baissée, la main sous le menton, le ton grave, Samuel  Sidibé évoque avec difficulté la mort de son père pendant ses études en France. « J’aurais voulu qu’il profite un peu de ma réussite». Cet homme, aux traits du visage assez tirés, endurci par les épreuves de la vie ne parvient pas à oublier son père « parti trop tôt ». Cet évènement avec la disparition de sa grande sœur, il y a quatre ans,  sont pour Samuel Sidibé des moments pénibles.

Un regret malgré lui…

Sur le bureau du Directeur du Musée National, pas le moindre espace vide. Le téléphone portable, la tasse de café, les stylos et d’autres petits objets sont posés sur les piles de documents accumulés probablement avec les années. Seul, un écran d’ordinateur, à droite du maitre des lieux, se retrouve au milieu de cette paperasse. Assis derrière ce bureau peu rangé, Samuel Sidibé, 64 ans, parait pourtant dix ans de moins. « Il est à l’image de ses statuettes, il est conservé», goguenarde un de ses collaborateurs.

Quelques rares cheveux gris sont perceptibles de part et d’autre de sa tête coiffée à ras. Doté d’un léger strabisme et  les paupières un peu lourdes, le directeur du Musée national, est parti d’un musée de 400 m2 à une véritable institution classée parmi les meilleurs musées de la sous-région. Malgré ses succès, Samuel pense qu’une corde manque à son arc.

« Il n’y a rien de pire qu’un peuple qui ne s’intéresse pas à son patrimoine culturel. Le patrimoine culturel, c’est l’identité du pays, quand on le détruit, c’est l’histoire du pays qu’on fait disparaitre. C’est pourquoi, les djihadistes se sont attaqués aux mausolées et aux manuscrits de Tombouctou», indique Samuel Sidibé qui regrette de n’avoir pas pu ramener plus de Maliens vers le Musée. Le muséologue ne désespère pas pour autant. Un travail avec des écoles est en train de se faire dans l’intention d’avoir une génération de Maliens qui s’intéresse au Musée, conclut-il.

Mamadou TOGOLA

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