Langues, médias et numérique : Forger un Malien capable de parler au monde

Entre la réaffirmation identitaire et les défis de la modernité, le Mali cherche encore son équilibre.

20 Octobre 2025 - 11:28
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Langues, médias et numérique :  Forger un Malien capable de parler au monde

Valoriser les langues nationales, oui. Maîtriser le français et apprendre l’anglais, c’est nécessaire. Mais à l’heure de la désinformation et du numérique, l’essentiel c’est  surtout former des citoyens capables de penser, d’analyser et de comprendre le monde qui les entoure.

Le retour aux langues du pays, un geste de fierté légitime

Depuis quelques années, le Mali redécouvre la beauté et la force de ses langues.
Le bambara, et les autres langues nationales, devenues aussi langues officielles résonnent dans les discours officiels. Les campagnes de sensibilisation se traduisent dans les langues locales, et l’on rêve d’un enseignement « dans la langue du cœur ».
Cette réappropriation est bien plus qu’un choix linguistique : c’est un acte de dignité, une manière de se regarder à nouveau dans son propre miroir.

« Parler ses langues, c’est affirmer qui l’on est. Mais refuser d’apprendre celles des autres, c’est risquer de se condamner au silence dans la grande conversation mondiale. »

Cette fierté, si légitime soit-elle, ne doit pas devenir un mur qui nous sépare du monde.
Les langues nationales doivent servir à rassembler, pas à s’isoler.

Le français et l’anglais : des clés, pas des chaînes

Beaucoup d’élèves et d’étudiants maliens peinent à s’exprimer dans un français correct.
On dit souvent : « C’est normal, ce n’est pas leur langue maternelle. »
C’est une excuse commode, mais fausse. Le problème n’est pas la langue, mais le système éducatif : un environnement sans culture de lecture, une école qui n’apprend plus à aimer les mots, et des Enseignants parfois sans amour professionnel.

Et pendant que nous débattons du français, l’anglais avance, inexorablement.
Langue de la science, des affaires, des technologies et des relations internationales, l’anglais reste le sésame du monde moderne. Ignorer sa place dans nos écoles, c’est refuser à notre jeunesse les clés de la compétitivité mondiale.

Comme aimait à répéter une illustre personnalité du Mali, vivre au 21ème siècle c’est l’enracinement en soi et l’ouverture aux autres.

Apprendre à lire le monde numérique

Mais la langue seule ne suffit plus. Nous vivons dans une époque où une simple image truquée peut enflammer tout un pays, où une fausse rumeur vaut parfois plus qu’un communiqué officiel.
C’est ici qu’intervient un maillon oublié : l’éducation aux médias et au numérique.

Nos jeunes doivent apprendre à douter avant de partager, à vérifier avant de croire, à analyser avant de réagir. Il faut en finir avec une école qui transmet des mots sans enseigner le discernement.
Former un jeune Malien du XXIe siècle, c’est lui apprendre à maîtriser les écrans avant qu’ils ne le maîtrisent.

C’est lui donner la capacité de transformer Internet en outil de création et de citoyenneté, plutôt qu’en terrain de manipulation.

L’école, laboratoire d’un nouveau citoyen

L’école malienne doit redevenir un espace de construction de l’esprit critique.
Elle doit enseigner la grammaire et la syntaxe, mais aussi la citoyenneté numérique, la vérification des faits et la pensée analytique.

Dans un monde sans pitié, où les algorithmes orientent les opinions et où l’intelligence artificielle redessine les métiers, la véritable défense d’une nation se trouve dans la qualité de ses cerveaux.

« Les nations de demain ne se mesureront pas par la taille de leurs armées, mais par la qualité de leurs esprits. »

Cette qualité se bâtit dès l’école, dans la rigueur de la langue, la curiosité de l’esprit et la maîtrise du numérique.

L’équilibre et l’ouverture comme horizon

Affirmer nos langues nationales, c’est affirmer notre identité.
Maîtriser le français, l’anglais et d’autres langues, c’est s’ouvrir au monde.
Mais comprendre les médias et le numérique, c’est apprendre à survivre et à exister dans un monde nouveau.

Le vrai défi du Mali n’est pas de choisir entre tradition et modernité, mais de les réconcilier dans une même ambition : celle de former des Maliens capables de s’exprimer dans leurs langues, de dialoguer avec le monde, et d’y prendre leur place sans complexe.

Ahmed M. Thiam

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