Décryptage : Comment rétablir la paix par le dialogue au Sahel ?

Les exécutifs sahéliens ne sont pas infaillibles. En ce sens, c’est en conjuguant leurs efforts qu’ils réussiront à reconstruire la paix par le dialogue.

17 Mai 2025 - 02:08
16 Mai 2025 - 19:56
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Décryptage :  Comment rétablir la paix par le dialogue au Sahel ?
Mohamed Amara

L’instabilité politique malmène les sociétés sahéliennes. Bamako, Conakry, Niamey et Ouagadougou deviennent les arrière-boutiques des mutations. Les luttes entre les acteurs politiques, associatifs, syndicaux et les gouvernants donnent à comprendre des désirs de changement de la jeunesse. Le 3 mai 2025 à Bamako, au Palais de la culture, des jeunes d’univers associatifs, politiques ont montré leur capacité de mobilisation. Il s’agissait d’un premier examen concret de leur performance citoyenne pour manifester ce qu’ils éprouvent sans être sommés de s’expliquer. Décryptage : la manifestation du 3 mai 2025 révèle le caractère fragile des liens entre l’exécutif et la classe politique. La suite : 13 mai 2025, l’exécutif dissout les « partis politiques […] ». La peur du débordement ? Ce qui est certain, la sanction est rude. Pas seulement au Mali.

Un impératif : le dialogue

Dans l’espace de la confédération de l’alliance des États du Sahel (AES), notre voisin nigérien a déjà donné le ton. Le 26 mars 2025, Niamey dissout les partis politiques. Un Big Brother de la restriction des libertés. Certains font la fête. D’autres résistent. Une résistance qui bourdonne dans l’excitation des mariages du dimanche. Elle s’incarne dans les gestes quotidiens pour améliorer les conditions de vie : se soigner, se loger, trouver un emploi, etc. Aujourd’hui à Bamako comme à Niamey, la solution se trouve dans un impératif absolu : le dialogue, Kumaŋɔgɔnya en Bambara, Seelaŋ nda cere en Songhay. Il y a sept siècles, en 1236, Soundiata Keïta faisait la paix entre ses différents territoires grâce à la charte de Kurukanfuga. Elle a permis de favoriser l’égalité et le respect des droits. Cela s’appelle la démocratie. En ce moment de tensions politiques, le Mali gagnerait à s’inspirer de Kurukanfuga pour restaurer le dialogue comme l’avait institué le président Alpha Oumar Konaré.

Du commun

Konaré a compris que partir en guerre contre la démocratie, c’est ouvrir une crise politique sans issue. Car l’enjeu est moins le système démocratique que la résolution des situations d’injustices : corruption, impunité, accès aux services médicaux, éducatifs, sportifs... Par exemple, sa clairvoyance a permis d’obtenir l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) de football en 2002 au Mali, un pays où le football reste le sport roi. Aujourd’hui, les soirs de match du championnat européen, certaines rues de Bamako débordent de jeunes. Faute d’électricité ou par simple envie de soirée amicale, les jeunes supporters se retrouvent chez un commerçant ou un voisin, possesseur de panneau solaire, pour soutenir leur équipe : Barcelone, Manchester United, Olympique lyonnais, Real de Madrid, Stuttgart, etc. À l’image de leurs fans tels que Cissouma, Coulibaly, Diarra, Doucouré, Haïdara, Koné, Mbappé, Salah, Sissoko, Touré, Traoré, Yamal, etc., chacun se voit un jour porter le maillot d’un club de la Bundesliga, de Premier league ou de la Liga. Par le sport, les générations fraternisent. Il leur permet de faire du commun pour construire la paix.

De l’honneur

Au-delà du bal des prétendants, quittons le champ de bataille pour rejoindre l’arbre à palabre pour se parler dans un contexte sécuritaire exacerbé. Djibo (Burkina-Faso), Termit (Niger) et Gossi (Mali) imposent de se rassembler pour sauver les hommes, privés de protection. L’enjeu n’est ni de haïr les États-Unis d’Amérique, ni la fédération de Russie, ni la France, mais de ne pas masquer notre inconséquence. Il est aussi d’agir pour la survie des territoires. C’est enfin de ne pas abandonner les populations du Liptako-Gourma au profit de Bamako, Ouagadougou et Niamey. Les exécutifs doivent écouter et entendre les acteurs : associatif, citoyen, politique, scientifique, syndicaliste, etc. C’est une question d’honneur.

Enfin, il est certain que nous avons intérêt à coordonner nos efforts et à oser dialoguer pour faire la paix et retrouver l’ordre constitutionnel.
 

Mohamed Amara Sociologue

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