2025, année de la culture : Les veuves d'artistes disparus s'engagent dans la salubrité des espaces culturels.
Cette année, le Mali tout entier se lève pour célébrer ce qu'il a de plus précieux : la Culture.

Et dans cette levée d'hommages et de gestes, il est un cortège discret, mais ferme, qui s'avance dans la poussière avec le balai pour étendard : celui des veuves d'artistes maliens, mères veillant sur les traces de ceux qui ont chanté pour nous la joie et la peine, la révolte et l'espoir.
Tous la conduite de Madame Mangala Camara, Astan Niampa, elles ont formé l'AVAM, l'Association des Veuves d'Artistes Maliens. Ce nom, déjà à lui seul, est assez parleur. Derrière chaque syllabe, résonne le souvenir d'un époux disparu ayant marqué la vie culturelle du Mali : Mamoutou Camara dit Mangala, Zani Diabaté, Yoro Diallo dit Mouthatha, Lobi Traoré, Adama Namakoro Fomba s'élève comme un chant d'initiation.
Elles ne viennent pas pour parler ou danser. Elles viennent pour agir pour l'intérêt commun. Le samedi 31 mai 2025, elles seront cinquante femmes, pagnes noués à la taille, têtes hautes et mains vaillantes, pour balayer la cour et la salle du Palais de la Culture, ce haut lieu d'expression artistique et culturelle qui fut l'arène vivante de leurs compagnons, le cœur battant de tant de nuits musicales et de paroles dites. Balayer le Palais de la Culture, n'est pas une simple tâche de propreté. C'est un acte de mémoire. Un rituel de présence. Une manière de dire : "nous sommes là, et nous veillons encore sur la Culture malienne".
Elles ont reçu l'écoute bienveillante du Ministre de l'Artisanat, de la Culture, de l'Industrie Hôtelière et du Tourisme Mamou Daffé, qui leur a donné le feu vert, et le mot d'encouragement. Mais plus encore, c'est l'esprit des ancêtres artistes, soufflant entre les murs du Palais, qui les guide.
Et ce n'est qu'un début. Car ces femmes, au pas lent mais assuré, ont décidé que chaque lieu de culture, chaque espace abandonné à la poussière, recevra leur passage. L'hivernage vient, disent-elles, et il ne faut pas laisser la boue recouvrir les sillons de la mémoire. Elles dérouleront leur programme comme on déroule un pagne cérémoniel : avec soin, avec fierté.
Écoutez-les, ces veuves devenues gardiennes : "Nous ne voulons rien d'autre que faire notre part. Que les jeunes musiciens viennent, que les instruments chantent, que les amoureux de la culture se joignent à nous. Ensemble, nous ferons œuvre commune, et ce sera notre offrande au Mali".
Ainsi va l'AVAM, humble et grandiose, portant la culture non sur leurs épaules, mais dans leurs gestes et au fond du cœur.
Aboubacar Eros Sissoko
Artiste-Écrivain
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