AES : les États-Unis prennent leurs distances avec la stratégie française au Sahel
Alors que la Confédération de l’Alliance des États du Sahel (AES), réunissant le Mali, le Niger et le Burkina Faso, consolide sa coopération régionale, les États-Unis adoptent une posture différente de celle de la France. Refusant d’aligner leur politique sur celle de Paris, les autorités américaines privilégient un dialogue pragmatique avec les dirigeants sahéliens, dans un contexte de recomposition des équilibres diplomatiques.

Une reconfiguration imposée aux anciens partenaires
Le départ des troupes françaises du Sahel n’a pas été le fruit d’une décision unilatérale. Sous pression des autorités nationales, la France a été contrainte de mettre fin à sa présence militaire, d’abord au Mali, puis au Burkina Faso et enfin au Niger. Ce retrait forcé a mis en lumière un rejet croissant d’une certaine approche sécuritaire, jugée inefficace et perçue comme intrusive.
En parallèle, les trois pays de l’AES ont quitté la CEDEAO et mis en place une confédération axée sur la coopération militaire, économique et politique. Ce recentrage régional s’accompagne d’une volonté claire de diversification des partenariats, notamment avec des acteurs comme la Russie, la Chine, ou encore l’Iran.
Washington choisit le dialogue
Face à cette évolution, les États-Unis ont opté pour une stratégie moins rigide. Après le retrait de leurs troupes stationnées au Niger en juillet 2024, Washington a amorcé un réengagement diplomatique dès le début de 2025. L’arrivée officielle de l’ambassadrice Kathleen FitzGibbon à Niamey, longtemps retardée, a marqué une inflexion. Des visites récentes de hauts responsables américains au Burkina Faso et au Niger, dont celle de Will Stevens, témoignent d’une volonté de reprendre contact avec les autorités en place.
Cette approche s’appuie sur des considérations sécuritaires, économiques et géostratégiques. Les États-Unis entendent préserver une présence régionale, notamment pour suivre l’évolution des groupes armés, sécuriser les routes migratoires et rester compétitifs dans l’accès à certaines ressources naturelles stratégiques.
Une rupture de méthode avec la France
Contrairement à Paris, Washington ne conditionne pas son engagement à une transition politique immédiate ou au respect de modèles institutionnels imposés. Ce choix illustre une volonté d’adaptation aux réalités locales, sans pour autant valider explicitement les orientations internes des gouvernements concernés.
La France, de son côté, reste confrontée à un rejet marqué dans la région. Sa politique, longtemps fondée sur une présence militaire et une coopération sécuritaire prioritaire, est désormais largement contestée. Son retrait forcé du Sahel souligne l’échec d’un modèle d’intervention perçu comme vertical et peu attentif aux aspirations locales.
Vers un nouvel équilibre diplomatique
Les réactions divergentes de Washington et Paris face à l’AES traduisent des visions opposées du rôle des puissances étrangères en Afrique de l’Ouest. Tandis que la France semble en quête d’un nouveau positionnement, les États-Unis avancent prudemment, sans confrontation directe, dans l’objectif de maintenir des relations fonctionnelles.
Cette évolution reflète un tournant dans les relations internationales du Sahel, où les rapports de force se redessinent. Dans un environnement marqué par l’affirmation des souverainetés nationales, la montée en puissance de nouveaux partenaires et la redéfinition des priorités régionales, les puissances occidentales doivent adapter leurs stratégies si elles souhaitent rester des acteurs pertinents.
Source: https://lanouvelletribune.info/
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