«La décentralisation a transformé la IIIème République en kleptocratie»

Selon Ousmane Sy, «de l'indépendance à nos jours, tous les dix (10) ans, nous sommes tombés dans une crise.

20 Octobre 2025 - 08:34
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«La décentralisation a transformé la IIIème République en kleptocratie»

Ce genre de schéma ne favorise pas le développement. Car, chaque crise nous ramène à la case départ. Elle ne provoque pas de véritable changement ». Quel est le fond de cette crise ?

Toujours selon M. Ousmane Sy qui a dirigé le processus de décentralisation et ancien ministre de l'Administration territoriale et de la Décentralisation «Notre crise est le résultat du mauvais fonctionnement de notre État. Le fond de cette crise, c'est l'incapacité de notre État à mobiliser les communautés».

«Ces communautés ont subi l'État depuis les indépendances. Aujourd'hui, l'évolution a fait de telle sorte que nous sommes dans des États de droit où on ne peut réprimer qu'auparavant. Ce qui fait que les communautés sont moins soumises. Or, nos États ne sont préparés qu'à gérer des communautés soumises. C'est cela le fond de cette crise. À cette gouvernance héritée de la colonisation, la décentralisation a trois grands objectifs: approfondir la démocratie, installer les services publics de base à proximité des populations et le développement des territoires. Puisqu'il s'agit d'une réforme qui se fait dans la durée, il faut la faire dans la progression. Quand on construit un édifice, on commence par le soubassement qu'on teste avant de passer à la construction en étage. Un véritable débat a eu lieu en 1993 sur la création des communes sur toute l'étendue du territoire national. Un débat qui a conduit à la loi de création des communes. Cette communalisation était le soubassement de la décentralisation».

Cette décentralisation, qui a été dans son application la grande pagaille due au laxisme et à l'impunité des élus avec la complicité des gouvernements successifs, a transformé la IIIème République en kleptocratie.

Et quelle a été la suite ?

Toujours selon l’ancien ministre Ousmane Sy, «La prochaine phase est celle du développement territorial qui est la régionalisation. Parce que nous nous sommes rendu compte que chaque région du Mali renferme des potentialités. Pour tirer profit de celles-ci, il fallait responsabiliser des acteurs qui sont de ces territoires et créer de la richesse et de l'emploi». Malheureusement, cela ne peut être une réalité tant que le pouvoir central qui délègue une partie de ses prérogatives (aux collectivités) n'est pas bien gouverné. Pour les ressources naturelles, par exemple, l'État continue à les gérer au détriment des populations locales. Nous voyons la misère de la région de Kayes, première pourvoyeuse au budget national: pas de route, pas de chemin de fer, pas d'électricité, ni d'eau, pas de développement de la santé, de l'éducation et encore moins de la gouvernance locale.

Cette gouvernance prédatrice explique l'explosion des revendications corporatistes récurrentes à tous les niveaux socio-professionnels. La confiance est rompue entre les acteurs. La démarche démocratique écartant toute contrainte (externe au processus de décision), le dialogue social se fera entre acteurs maliens des communautés de base au pouvoir central en passant par les syndicats, le patronat et toutes les composantes de la société civile. La crise multidimensionnelle que vit le Mali depuis dix (10) ans n'est pas tombée du ciel. Elle résulte des cinq (05) premiers chapitres de la présente étude. Les chapitres 06 à 10 décrivent les procédures et les propositions de voies et moyens d'élaboration d'un nouveau contrat social à même de circonscrire les multiples revendications corporatistes qui paralysent, depuis des années, le développement socio-économique du pays.

Les causes de la crise multidimensionnelle

Les causes internes: une gouvernance n'ayant pas intégré les aspects géopolitique, géo économique et géostratégique du Sahel en général, et de la partie septentrionale du Mali en particulier; une gestion sécuritaire défaillante ayant laissé cette partie du pays aux narcotrafiquants qui ainsi, des années durant, ont tissé de solides réseaux au sein des populations locales, qui a permis le développement d'une économie criminelle; une mauvaise gestion économique, financière et sociale des zones arides et semi-arides, poussant à l'exode les populations de Kidal à Kayes; le bas niveau des revenus des travailleurs; la mauvaise gouvernance de nos ressources minières et agrosylvopastorales.

Les causes externes: Les convoitises sur les ressources naturelles du pays; la destruction de l'État Libyen en 2011.

L’intervention militaire française de 2013 à 2022 avec des intentions inavouables de partition du Mali.

L'intervention française qui a été un succès en 2013 tourné au fiasco de 2014 à 2022 avec l'extension de l'insécurité à l'ensemble du territoire national; abstraction des causes et conséquences de la crise, en ramenant la solution à des élections entre des candidats qui sont en majorité les acteurs de la mauvaise gouvernance ayant entraîné la dégénérescence de l'État malien.

Faut-il rappeler aux donneurs occidentaux de leçons démocratiques que les élections ne sont que le volet final du processus, c'est à dire le choix de ceux qui seront chargés de commun accord; l'incapacité de la communauté internationale à proposer un accord de paix acceptable par le peuple malien. L'accord du 15 mai 2015 en général et son avenant du 15 juin 2015 en particulier ne sont ni applicables, ni acceptables, raison pour laquelle nous assistons depuis exactement 7 ans à la situation absurde du développement de l'insécurité «dans la paix» entre les signataires de l'accord issu du processus d'Alger.

Les conséquences de la crise:

Coup d'État (1991, 2012, 2020,2021);

Généralisation de la corruption et de l'impunité;

La mise du pays sous tutelle française;

Perte de repères moraux et politiques;

Extension de l'insécurité aux pays voisins du Mali;

Croissance sans développement.

À suivre !

Source: «Debout Afrique !» (Diatrou DIAKITÉ)

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