Mariages et divorces : Quand le poids de la bourse détermine la durée du certificat

Les chiffres du divorce au Mali sont alarmants ! Rien que dans le district de Bamako, plus de 150 divorces sont prononcés par semaine devant les tribunaux.

25 Sep 2025 - 02:03
24 Sep 2025 - 15:25
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Mariages et divorces :   Quand le poids de la bourse détermine la durée du certificat

On se croirait certainement à Los Angeles (États-Unis), face à l'exubérance de ces données chiffrées pour un pays du tiers monde. N'empêche, revers de la médaille, les dimanches à Bamako sont foisonnants de cérémonies de mariage. Et pour la bonne cause, la société malienne se montre assez experte pour s'adapter aux bouleversements des mœurs qui ne manquent jamais de survenir dans l'univers glamour d'une cité en perpétuelle recomposition.

 Selon des statistiques officielles, le divorce semble se généraliser et augmenter au Mali, particulièrement dans le district de Bamako et la région de Sikasso, avec une nette augmentation des cas enregistrés chaque année, notamment auprès des jeunes couples. Le district de Bamako a ainsi enregistré plus de 10 000 cas de divorce en 2014 et un total de plus de 8 130 cas en 2022, contre 6 950 mariages. Par ailleurs en 2022, plus de 8 130 cas de divorces ont été enregistrés dans les six communes du district de Bamako contre 6 950 mariages à la même période. Des organisations comme « Deme So » observent une augmentation annuelle de 15 à 20 % du nombre de femmes venant chercher de l'aide. Cette hausse est constatée par les tribunaux et les associations qui tentent d'intervenir. Et les femmes sont souvent à l'origine des demandes de divorce.

Cette situation semble imposer de nos jours une tendance avec l'avènement des mariages dits « clandestins » dans nos mairies où de plus en plus de couples se parent de leurs plus beaux atouts pour converger chez l'officier d'état civil uniquement accompagné d'une poignée de proches parents. En se gardant de mettre au parfum de cette cérémonie sobre, certains amis et connaissances. À ceux-ci, ils leur seraient ultérieurement formalisés l'organisation d'une autre cérémonie plus grandiose à laquelle ils seraient priés de prendre part.

Selon un connaisseur de ce nouveau phénomène, ceci n'est qu'un paravent contre les manifestations de jalousie, les aigreurs et autres scandales récurrents lors des cérémonies publiques et qui gâchent souvent ce qui était prévu comme une belle fête dans la convivialité. Selon les juristes et les observateurs du phénomène des divorces au Mali, à côté des violences, des problèmes comportementaux et autres incompatibilités dans les couples, les premières causes des divorces sont en général d'ordres financiers.

Cette tendance dans les ruptures conjugales mérite qu'on y prête une attention particulière, comme pour décrypter un inextricable écheveau. Dans la plupart des conflits entre conjoints, c'est l'expression d'une immaturité des jeunes couples qui exacerbe les mésententes souvent irréconciliables. Dans certains cas, la jeune femme mariée entre dans son nouveau foyer avec en tête des rêves qu'elle veut coûte que coûte voir se matérialiser sans tenir compte de la situation financière de son mari. Pour elle, tous ses désirs doivent être satisfaits au nom de l'amour. Oubliant que son époux a aussi d’autres lourdes responsabilités à assumer pour le bonheur du foyer. D'où les premières frictions quand Monsieur dit niet.

Dans pareille situation, il est regrettable de remarquer que quand un différend survient dans le couple, chaque conjoint voit sa cause défendue par sa famille respective, qui ignore superbement la possibilité de mettre en cause le comportement culpabilisant de leurs protégés. C'est ce parti pris qui rend les positions très souvent irréconciliables. En notre temps, l'éducation d'une jeune fille est étroitement liée à son épanouissement au foyer conjugal.

Les choses se compliquent parce que les parents d'aujourd'hui font moins cas du vrai sens du mariage auprès de leurs progénitures, surtout dans les moments cruciaux de l'union entre mari et femme. Il était par exemple de  coutume de rappeler l’épouse  au « mougnou ni sabali », autrement dit : endurer et se résigner, quand le foyer était agité par des soubresauts menaçant sa stabilité. Comme disaient les anciens, on ne trouve pas le bonheur sans souffrir. Et quand prédomine le seul aspect pécuniaire, aux dépens du devoir et de la préservation des valeurs qui solidifient le vivre ensemble, on en arrive forcément aux extrémités fatales à la survie du couple.

Nous devrons tirer des leçons de cette déperdition de l'une de nos valeurs les plus sacrées, à savoir la préservation de l'harmonie du foyer conjugal sur laquelle repose en partie le sacrifice et le dévouement consenti par la femme. Ce sont autant de repères qui nous échappent aujourd'hui. Car ces notions sont foulées au pied dans une société assaillie par une acculturation vertigineuse à laquelle nul n'échappe. Alors que la transmission de ces valeurs à la jeune génération devrait s'ériger en principe sacerdotal de la part de ces familles. Anciennement, la conception de la vie familiale reposait, dans le cadre du mariage, sur le rôle joué par les parents du futur marié qui consistait pour ceux-ci de dénicher la bonne épouse pour leur garçon. Et ensuite la vie de couple s'organisait dans la cour familiale sous l'œil vigilant des autres membres de la famille ou tout se partageait presque.

Avec ce système traditionnel de gestion des tensions, aucun conflit ne pouvait avoir lieu ou perdurer, car immédiatement il était étouffé dans l'œuf grâce à l'intervention des parents qui mettaient chaque conjoint à sa place, fautif au pas. Ce rappel est nécessaire pour comprendre les fondements de nos cultures ancestrales qui ont fait leurs preuves dans la stabilisation de la famille malienne où il a encore toute son importance. C'est un repère qui doit éclairer notre génération et nous guider comme une boussole afin de tracer les chemins d'un meilleur avenir à notre jeune société en perte de repères.

À cela, nous ajouterons ce précepte islamique, selon lequel la femme qui demande le divorce sans raison valable ne verra jamais le paradis. Cette prescription de la religion la plus répandue dans notre pays sonne comme un avertissement plus que persuasif qui doit peser dans la balance face aux récriminations féminines dans les différends entre mari et femme.

De nos jours, beaucoup de parents font une grave erreur en croyant que donner leur fille en mariage est une opportunité pour se soustraire du soutien qu'ils lui apportaient jadis. Pour certains, cela est une attitude assez rétrograde et contre-productive à revoir. En effet, au contraire selon eux, ils doivent toujours soutenir leur fille matériellement et financièrement (dans la possibilité de leurs moyens) quand le besoin se fait sentir. Il ne faut pas surtout laisser ce fardeau sur les seules épaules du mari, surtout si les moyens de ce dernier sont limités. D’une manière, chacun a le devoir de contribuer à la consolidation d’un foyer !

Thierno Barro

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