Que sont-ils devenus… Boubacar Diarra dit Becken : Joueur dans la cour des grands

Dans l'animation de la rubrique "Que sont-ils devenus ?" rarement nous sommes tombés sur un ami avec lequel nous avons cheminé sur tous les plans.

27 Sep 2025 - 01:22
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Que sont-ils devenus… Boubacar Diarra dit Becken :  Joueur dans la cour des grands

C'est le cas dans ce numéro avec l'ex-international du Djoliba et de Fribourg en Allemagne, Boubacar Diarra dit Becken. Pas de gymnastique intellectuelle pour parler de sa carrière, nous la maîtrisons parfaitement. La réussite de Becken est le fruit de la vie sportive qu'il s'est inculquée dans l'adolescence. A 22 h déjà il abandonnait la grande ambiance du "grin" au profit du lit. Une seule ambition : devenir un grand footballeur et jouer en équipe nationale. Autrement dit, il n'est pas parti du néant pour atteindre le sommet. Entre 1995 et 1997 son destin bascule dans un univers de l'eldorado : sélection dans les différentes équipes nationale, un contrat, un jet privé. Comment tout cela s'est produit ? Qui est cet enfant du quartier populaire du Badialan III ? Quelles sont les raisons de sa rupture avec les Aigles après la Can-2002 ? Eprouve-t-il un regret de sa décision radicale ? Découvrons la particularité de Becken qui se traduit par trois catégories de Can et toutes sanctionnées par une 4e place. Logiquement ce bilan qu'il juge sombre constitue ses mauvais souvenirs.

oubacar dit Becken est un homme humainement irréprochable. Véritable humoriste, il aimait taquiner ses amis sur les anciens souvenirs. Paradoxalement, il était un incapable à un autre niveau. Il nous a fallu toujours au "grin" lui doper le cœur ou lui faire des leçons pour affronter d'éventuelles proies. Mais quand il est devenu une vedette du football malien, les filles l'envahissaient. C'est cela aussi l'une des facettes de la vie juvénile. C'est dans le quartier populaire du Badialan III derrière l'église qu'il prit le sobriquet de Becken, en référence à l'emblématique défenseur allemand Franz Beckenbauer.

Un vrai nègre comme Kunta Kinté, Basile Boli, Marius Trésor, il n'avait qu'un objectif sur un terrain de football : le ballon. Autrement dit s'il devait écraser la tête de l'adversaire dans un duel aérien, ou le piétiner, il le ferait sans état d'âme.

Très véloce, Becken avait également des potentialités de frappe lointaines. Son ambition de devenir footballeur de haut niveau le conduit sur plusieurs fronts en même temps. Sociétaire dans l'adolescence du FC Bleu Blanc, il était pensionnaire au même moment du centre de formation du Djoliba AC avec les Soumaïla Coulibaly, Gaoussou Diallo dit Mahalatini, Sékou Berthé, Daouda Diakité dit Darou, Issouf Mariko dit Miki.

Plus tard il intègrera malgré son jeune âge le grand club du quartier, le FC Kotontala du Badialan III. Principalement c'est la Can des cadets organisée par notre pays en 1995 qui le propulsa au-devant de la scène.

L'euphorie de Tunis 1994 était encore dans les cœurs. Aussi le fait d'avoir organisé une si grande fête du football africain dans notre pays, contribua à donner un engouement à l'événement. C'est pourquoi le stade Omnisports faisait le plein tous les jours de matches. En son temps le président de la Caf, Issa Hayatou, s'est réjoui de cette grande affluence au tour de la Can des cadets. Revenons à Becken pour justifier comment il a été au centre des débats à travers les commentaires de notre confrère et doyen, feu Demba Coulibaly.

Pour cette compétition, l'encadrement technique dirigé par feu Mory Goïta avait opté pour un système classique : procéder par des longues balles à partir de l'axe central. Et c'est Becken qui était chargé de pilonner le bastion défensif adverse pour retrouver Seydou Cissé et Nampalla Diawara. Or, Demba Coulibaly était un passionné du football moderne traduit par des gestes techniques et des petites passes. Surtout que Nampalla était toujours hors-jeu. Ce système ne plaisait pas à Demba. Durant toutes les rencontres des Aiglonnets, le doyen de l'ORTM ne cessait de dire "Diarra balance, c'est le même scenario. Pour l'une des rares fois, il n'a pas balancé, il a préféré jouer avec son latéral". Sans le vouloir Becken est devenu la cible à abattre des supporters à cause des commentaires de Demba Coulibaly. A un moment le "grin" s'est fait le devoir d'enregistrer ses propos, pour les faire écouter par notre ami. Mais insouciant à l'époque, Becken a soutenu qu'il ne faisait qu'appliquer les consignes de son entraineur. Donc il n'en voulait pas au commentateur.

On ne saurait parler de son parcours sans faire allusion à ces deux grands matches : les éliminatoires de la Coupe du monde contre la Libye en avril 2000, où son club a mis sa disposition un jet privé, et cette demi-finale contre le Cameroun en 2002. A titre de rappel, N'Djefi est passé par là. Qu'est-ce qui a motivé l'affrètement d'un avion spécial ? Quelle explication à la débâcle des Aigles face aux Lions Indomptables ?

"Pour le match aller contre la Libye, mon club m'a retenu tout en promettant de me libérer à la manche retour. Malheureusement, par la suite les dirigeants se sont rétractés. Parce que Fribourg devait jouer sa survie en 1ère  division. Face à cette attitude irresponsable des Allemands, la Fémafoot saisit la Fifa. Et l'instance dirigeante mondiale du football a tapé le point sur la table, et brandit une suspension à mon égard. Mon club s'est trouvé dans l'obligation de m'affecter un avion spécial. Donc j'ai joué le samedi en Allemagne, et le dimanche à Bamako. La même nuit je suis retourné. Concernant notre défaite contre le Cameroun, c'est l'expérience qui a fait la différence. Le Mali avait de très bons joueurs, mais face aux Eto'o Fils, Rigobert Song, Rémi N'Jitap, N'Djéfi, Parick M'Boma, Salomon Olymbé, Marc Foé, une défaite des Aigles n'était guère surprenante. Le Mali c'était la fraicheur de la jeunesse, le Cameroun l'expérience".

La carrière de Boubacar Diarra dit Becken, prendra une dimension avec son accession dans l'équipe première du Djoliba et les éliminatoires de la Can junior à laquelle sa génération de cadets s'est qualifiée pour la phase finale jouée au Maroc en 1997. Pour une place de titulaire il devra son salut à l'arrivée de Fagnery Diarra comme entraineur des Rouges. Son premier match à Sikasso en championnat national fut le déclic. La même année, la chance lui sourit à la faveur de la rencontre aller de la Ligue Africaine des champions  qui a opposé à Tunis le Club africain au Djoliba.

Les dirigeants de Fribourg contactent le président Karounga Kéïta dit Kéké à propos de Becken et de Gaoussou Diallo dit Mahalatini. Les pourparlers débouchent sur un contrat de deux ans. Mais Boubacar Diarra restera pendant dix ans (1997-2007). Une décennie blanche en termes de titres. Selon Becken, Fribourg optait pour le mercantilisme, c'est-à-dire que le club formait les joueurs, pour ensuite les revendre aux grands clubs européens. Un système qui démembrait constamment le club allemand.

Après une décennie de disette, il signa en 2007 un contrat de deux saisons avec Kaiserlautern. Il n'a pas pu s'imposer au sens réel du terme. Une fracture au bras impactera sa titularisation. Parce que l'entraineur qui l'avait recommandé au club a été entre-temps limogé. Becken quitte pour le FC Luzerne de Suisse (2008-2010). Il prit sa retraite footballistique en Chine (2011). Pour lui, il n'était pas facile de revenir en Europe pour jouer à un haut niveau.

Dans cette nouvelle vie Becken retourne au Mali pour entreprendre des formations d'entraîneurs. Ce qui lui permettra de rejoindre la barre technique du Mamahira de Kati pendant une saison. En 2015, avec Sadio Baba Cissé, il prendra les rênes du centre de formation de l'ex-international Boubacar Kéita. La même année, le président de la Fémafoot lui fait signer un contrat de deux ans (2015-2017) comme entraineur du Beach Soccer. Il assiste également le coach Baye Bah à l'époque entraîneur des Cadets. Finalement Becken décide de tourner dos au milieu sportif pour s'aventurer en France où il décroche un boulot.

Pourquoi il n'a plus joué avec l'équipe nationale  après la Can 2002 ?

"Après la Can-2002, le nouvel entraineur des Aigles m'a mis sur le banc de touche contre la Guinée équatoriale à Malabo. Pour moi, cela était incompréhensible, d'autant plus que je suis  titulaire à part entière dans un grand club comme Fribourg. Je lui ai posé la question de savoir les motivations de sa décision. Comme réponse, il soutint ne pas me connaitre, et me titulariser serait un risque qu'il ne voudrait pas prendre. J'ai manifesté ma désapprobation et il me rassura de sa compréhension et promit que tout l'effectif aura sa chance. A mon avis l'incident était clos. Au retour de la délégation, un membre de la Fémafoot m'appela pour me notifier une suspension pour deux matches. Motif invoqué ? Indiscipline.

En réplique, je lui ai signifié également ma décision de ne plus jouer avec l'équipe nationale. En réalité, on a profité de cette situation pour régler mes comptes par rapport à mon déplacement sur le Burkina Faso, pendant que l'équipe nationale devrait s'entrainer à Bamako. Mais les autres joueurs n'étaient pas encore venus.

Et avant de bouger j'ai pris la permission avec l'entraineur adjoint Cheick Diallo. Malgré tout, cela a été mal interprété et l'encadrement technique a profité de mon entretien avec le coach principal pour m'assommer avec une suspension. Je ne regrette pas ma décision, parce que je n'accepte pas que des joueurs de 2e division soient alignés, et moi qui joue au haut niveau soit remplaçant".

Marié et père de six enfants Becken retient comme bons souvenirs : les Can cadets et seniors de 1995, 1997 et 2002, l'affrètement d'un avion spécial par son club. Dans la vie il aime la simplicité et déteste l'hypocrisie.                     

 O. Roger Sissoko

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